D’un océan à l’autre

Le Biomuseo dessiné par Frank Gehry. © FERNANDO ALDA

Panama – Trait d’union entre Amérique centrale et Amérique du Sud, ce petit pays devient furieusement tendance. Et n’a pas à rougir de son célèbre voisin costaricain. Voici trois manières de l’arpenter… et d’en repartir charmé.

1. Version urbaine, Panama City

Miami ? Rio ? Dubai ? Non, Panama City ! Lorsqu’on l’approche par la mer, on découvre une immense skyline de tours de verre et d’acier. Elle est la ville qui a le plus grandi sur le continent ces dernières années et son surnom de  » Manhattan du Pacifique  » n’est vraiment pas usurpé. Les vingt-sept plus hauts bâtiments d’Amérique latine sont ici, le premier métro d’Amérique centrale sillonne son sous-sol, et on ne compte plus les rooftops aménagés en bars ou en boîtes de nuit, à l’instar du Lazotea, sa vue imprenable sur la skyline, ses savoureux cocktails et même son excellente table. L’une des meilleures manières de découvrir la ville  » by night  » consiste d’ailleurs à emprunter un  » chiva « , ce bus traditionnel outrageusement décoré et animé par un DJ, où l’on peut même apporter ses propres boissons à bord…

Une capitale entre passé et modernité.
Une capitale entre passé et modernité.© ERIC VANCLEYNENBREUGEL

En journée, dans la baie qui vient lécher la ville, une flottille hétéroclite attend en permanence son tour pour pénétrer dans le fameux canal et rejoindre l’Atlantique. Récemment redessiné, le front de mer est planté de jardins et doublé d’une immense piste cyclable que les familles parcourent à pied, en trottinette ou en cuistax. A Finca del Mar (calle Primera San Felipe) dans la vieille ville, on s’installe pour un mojito dans d’insolites sièges balançoires au milieu de la verdure… et on enchaîne avec un ceviche.

De l’autre côté de la baie, Casco Viejo achève de faire succomber le visiteur. Entièrement inscrit au patrimoine de l’humanité, ce district historique à l’ambiance bohème rappelle La Havane mais en mieux rénové. Rues bordées de palais aux élégants balcons, églises et places plantées de kiosques, jardins et fontaines invitant à la flânerie… Longtemps délaissé, ce quartier ne cesse de s’embellir au rythme de longues rénovations, et le magazine Forbes l’a récemment classé parmi les dix endroits du monde à découvrir absolument. Pour se sustenter, direction le Santa Rita (avenue Eloy Alfaro), l’une des meilleures adresses du coin, qui régale de grillades de poisson ou de viande.

D'un océan à l'autre
© ERIC VANCLEYNENBREUGEL

En plein développement, le Panama regorge d’une biodiversité quasiment unique au monde. Avant de partir en forêt, rien de tel qu’une visite au Biomuseo de Panama City, seul édifice d’Amérique latine dessiné par Frank Gehry. Sa muséographie moderne transporte au coeur de la nature panaméenne et souligne l’importance du pays en tant que trait d’union entre sud et nord des Amériques. Il faut encore s’arrêter chez I Love Panama Chocolate pour y faire le plein de délices cacaotés, voire y suivre un petit atelier pour fabriquer ses propres tablettes. Ensuite, il ne reste plus qu’à partir en excursion dans le gigantesque parc national métropolitain forestier, un océan de verdure riche d’écosystèmes divers qui s’étend juste à côté de la ville moderne.

Le canal de Panama et son Pont de l'Atlantique.
Le canal de Panama et son Pont de l’Atlantique.© BELGA IMAGES

2. Version nature, les terres

Couvert de 60 % de forêts tropicales et riche d’une incroyable biodiversité, le Panama a protégé un quart de son territoire par de magnifiques parcs nationaux. Celui de Soberania sommeille à trente minutes à peine de Panama City et est réputé pour sa faune ailée. A observer depuis la Canopy Tower, une ancienne tour radar américaine qui abrite sept chambres. Autre must : la Pipeline Road, un chemin d’observation à travers la jungle jalonné de plusieurs plates-formes. En prenant la direction du nord, on découvre un paysage de collines ondulantes. Le relief grimpe même à 3 500 mètres au volcan Baru, cerclé du parc du même nom. Du sommet, il est possible d’embrasser d’un seul regard la mer des Caraïbes et l’océan Pacifique…

Visite d'un village embéra.
Visite d’un village embéra.© ERIC VANCLEYNENBREUGEL

Autre parc national : celui de Chagres, irrigué par le fleuve du même nom. Couvert de forêts humides, il joue aussi un rôle non négligeable dans le fonctionnement du canal puisque ses cours d’eau alimentent le lac Gatun et assurent le fonctionnement des écluses. Une excursion en pirogue permet de rejoindre un village embéra en remontant durant deux heures le rio Chagres. Ces Amérindiens vivent comme leurs ancêtres, ayant peu de liens avec le reste du monde, sans électricité et sans autre compromis avec la vie moderne que les moteurs de leurs pirogues. Une rencontre émouvante et inoubliable avec un peuple timide mais attachant, autour d’un repas et d’une danse traditionnelle.

Parc national de Chagres.
Parc national de Chagres.© GETTY IMAGES

Tout cela à quelques dizaines de kilomètres du canal le plus fréquenté de la planète. Qui, reliant les deux océans, reste incontournable à visiter, surtout au niveau de ses impressionnantes écluses. Il demeure l’un des ouvrages humains les plus incroyables de l’histoire, permettant notamment de diminuer par deux le trajet d’un navire reliant les côtes est et ouest des Etats-Unis. Charles-Quint l’avait déjà envisagé 400 ans plus tôt, mais il fallut attendre 1914 pour voir ce rêve se concrétiser par des ingénieurs américains. D’une importance stratégique capitale, le canal demeura jusqu’en 1999 sous juridiction américaine mais aujourd’hui, il rapporte des milliards au Panama. Face à l’accroissement du trafic maritime et des gros tonnages, il a fallu percer un frère jumeau entré en service en 2016 après neuf ans de travaux. Ce dernier permet le passage de bateaux au tonnage beaucoup plus important. Surréaliste de voir avancer placidement ces gigantesques monstres des mers dans un paysage de forêts. Le spectacle prend encore de l’ampleur au passage des écluses. Chaque année, ils sont 15 000 à franchir le canal, un seul passage générant des droits de plusieurs milliers de dollars (jusqu’à 500 000 pour les plus gros tonnages !) mais nécessitant pour chaque bateau 200 millions de litres d’eau. Cet approvisionnement constitue d’ailleurs l’un des gros défis auquel le pays devra faire face dans un avenir proche.

D'un océan à l'autre
© ERIC VANCLEYNENBREUGEL

Pour faciliter le percement du canal, il avait d’abord fallu tracer une ligne ferroviaire. Un parcours que l’on peut à présent suivre d’un océan à l’autre dans de confortables wagons aux boiseries Belle Epoque et aux toits vitrés. Le trajet est une expérience insolite, offrant des vues imprenables sur le lac Gatun et ses forêts immergées, mais aussi sur des portions sillonnées d’immenses porte-containers. Destination finale : Colon, sur la côte caribéenne. De là, il reste à visiter les nouvelles écluses d’Aguas Claras et le fort de Portobello, d’où transitaient l’or et l’argent du Pérou à destination de l’Espagne.

3. Version paradis, les îles

Etendu tout en longueur entre Pacifique et Caraïbes, le Panama compte près de 2 500 km de côtes et plusieurs milliers d’îles. Au large de la côte caraïbe, l’archipel de San Blas compte, dit-on, au moins autant d’îles que de jours dans une année, toutes nimbées de sable blanc et de cocotiers. Il a aussi ceci de particulier qu’il est le refuge du peuple kuna, métissage de Mayas et d’Indiens d’Amazonie. Au nombre de 50 000, on les reconnaît à leur habit traditionnel chamarré constitué de milliers de petites perles de couleur. Beaucoup s’étaient réfugiés dans les îlots à l’arrivée des Espagnols. Aujourd’hui, une cinquantaine sont devenues des îles- villages mais la plupart restent inhabitées. Il est possible d’y partir en excursion à la journée pour profiter des eaux paradisiaques de la mer des Caraïbes, et des chambres ont même été aménagées sur certaines d’entre elles. Y loger deux ou trois jours permet de s’imprégner de la douce langueur de ces lieux hors du temps.

D'un océan à l'autre
© ERIC VANCLEYNENBREUGEL

Pour d’autres plages de rêve, direction l’archipel Bocas del Toro, plus au nord, que l’on sillonne idéalement en bateau-taxi. A fleur d’eau, 9 îles principales, 200 îlots et 52 bancs de sable invitent à la baignade et au farniente. La façade Pacifique compte également de très belles plages, à commencer par celles de l’archipel des Perles. Au XVIe siècle, les perles naturelles que l’on y trouvait étaient des plus réputées en Europe. Aujourd’hui, on n’y dégotte plus de pépite nacrée mais sa proximité de Panama City, ses fonds coralliens riches en vie et ses splendides côtes sablées en font une destination détente idéale. Quant à ceux qui se contentent d’un citytrip, ils devraient bientôt pouvoir s’offrir aussi les plaisirs balnéaires puisque la municipalité de Panama City annonce la réalisation d’un grand projet de réaménagement de plages style Copacabana à proximité du centre… Rendez-vous là-bas en 2021 ?

D'un océan à l'autre

5 choses à savoir

Le plus petit droit de passage du canal (36 cents) fut payé par un Américain qui s’aventura à le franchir à la nage en 1928.

Le panama, c’est aussi un chapeau. Qui n’a rien à voir avec le pays puisqu’il est fabriqué en Equateur.

A l’image du Costa Rica, le pays n’a plus d’armée et sa sécurité est garantie par un consortium de dix pays.

Le Panama produit les rhums les plus chers du monde mais aussi un café, le Geisha, que l’on paie plus de 30 dollars la tasse.

La plus grosse perle du monde provient de l’archipel des Perles et elle fut propriété de nombreux personnages célèbres, dont Marie Tudor, Napoléon Ier et Elizabeth Taylor.

En pratique

Se renseigner

visitpanama.com

Ce voyage a été mis sur pied par Sudamerica Tours. Spécialiste belge des destinations latino-américaines, l’agence propose un choix immense de formules et d’itinéraires affutés, souvent à la carte.

sudamericatours.be

Y aller

Air Europa assure quatre liaisons hebdomadaires Bruxelles-Madrid-Panama City sur un avion Dreamliner, pour environ 600 euros A/R.

aireuropa.com

Se loger

Hôtel Central. Magnifiquement situé face à la cathédrale de Panama City, le lieu fut inauguré en 1874 et hébergea des hôtes illustres (dont Ferdinand de Lesseps ou Theodore Roosevelt). Le must : sa piscine sur le toit offrant une vue imprenable sur la vieille ville.

centralhotelpanama.com

Playa Tortuga. Sur Isla Colon, ce très bel hôtel promet des nuitées paisibles et, surtout, des journées douces grâce à sa jolie piscine en front d’océan.

hotelplayatortuga.com

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