Avec un seul mot – paix – Clara Halter compose une ouvre à nulle autre pareille. Découvrez cette artiste singulière. Elle a ouvert à Weekend les portes de son atelier parisien conçu comme un cocon… où elle reçoit aussi ses visiteurs.

Depuis toujours, Clara habite dans le quartier du Marais, à Paris, où elle est née. Depuis son mariage avec l’écrivain Marek Halter, elle demeure dans cet immeuble, sis près de la célèbre place des Vosges. Son appartement est niché quelques étages au-dessus de son atelier, qui est aussi la pièce où elle reçoit.  » Marek, raconte Clara, a commencé par peindre ; aujourd’hui, il écrit. Et j’ai suivi une trajectoire symétrique…  » Elle écrivait, dirigeait la revue  » Eléments « , consacrée à la recherche de la paix au Proche-Orient, et, depuis une quinzaine d’années, elle met ses talents au service des arts plastiques. Elle n’a pas quitté les lettres pour autant. D’abord parce qu’elle travaille dans la même pièce que son écrivain de mari, et que leurs créations respectives ne sont jamais totalement étrangères l’une à l’autre ; ensuite parce que la matière première de son travail de plasticienne, ce sont les lettres. Clara adore les alphabets û elle en a recueilli près d’une trentaine, des cinq continents, tous encore utilisés par des langues vivantes û et elle joue avec les lettres pour le plaisir de les voir s’assembler, pour l’émotion d’en voir naître des mots et des sens. Elle réduit les lettres qu’elle dessine jusqu’à les rendre illisibles, puis elle les agrandit, de façon tellement démesurée qu’elles en deviennent, gigantesques, de nouveau illisibles… Les lettres, sous ses pinceaux, se réduisent à leurs formes géométriques, à leur dessin, n’ont aucun sens û  » peu m’importe d’être comprise… « , assure-t-elle û , et ne servent, au bout du compte, qu’à écrire un seul mot : paix. Elle l’écrit, ce mot, en toutes les tailles, en toutes les langues, sur tous les matériaux, elle le dessine, en arabesques et en bâtonnets, en japonais et en chinois, en persan, en grec, en caractères latins, elle le calligraphie, le dessine, jusqu’à le rendre profondément désirable… Un travail de titan, une £uvre de plusieurs années, pour n’écrire qu’un seul mot : paix.

Du mot paix, Clara compose des tableaux, elle grave du bois ou de la pierre, elle incruste des matières plastiques, du verre ou du marbre, elle imprime des tissus précieux, elle frappe l’argent, elle sculpte l’acier ou le nickel, le béton, elle orne le papier calque, la toile, imprime les pellicules photographiques… Elle trouve toujours aux lettres qu’elle assemble des harmonies nouvelles, et par ces simples signes û en des langues parfois si éloignées de la sienne qu’ils en deviennent ésotériques û, elle écrit des raisons d’espérer… De ces quatre lettres û ou d’autant d’idéogrammes û, elle décore foulards, stylos, pièces d’orfèvrerie, tee-shirts, meubles, écharpes ou parapluies : la paix doit être partout. Les éditeurs prestigieux auxquels elle s’est associée n’en ignorent rien.

Mais c’est au c£ur des villes, cependant, que Clara, en association avec l’architecte Jean-Michel Wilmotte, a réalisé ses £uvres les plus spectaculaires. Au c£ur de Paris, sur le Champ-de-Mars, elle a créé le  » Mur de la Paix « , et à Saint-Pétersbourg, pour le trois centième anniversaire de la création de la ville, elle a installé la  » Tour de la Paix  » haute de dix-huit mètres. Elle est en verre et en acier, résolument contemporaine, mais indémodable.

Son atelier est entièrement dédié à son £uvre et à la paix. Il est calme, serein, et lumineux. C’est un vaste volume, somptueusement éclairé par de hautes fenêtres du XVIIe siècle, qui n’est entravé par aucune cloison, et encombré d’aucun volume superflu. C’est là que Clara reçoit, et son atelier bénéficie d’équipements dont un appartement bourgeois apprécierait le prix : meubles de designers (table basse d’Andrée Putman, siège de Mies Van der Rohe, table de salle à manger du danois Poul Kj£rholm, table de travail créée par Jean-Michel Wimotte…), services de table précieux, objets anciens (coffre espagnol, buffet picard…). Par-dessus tout, l’atelier de Clara est rempli des £uvres de Clara : les unes sont achevées, d’autres en cours d’élaboration, certaines sont à l’état de projet û à jamais inabouties ? û, des £uvres attendent, des £uvres décorent, des £uvres sont testées, d’autres sont oubliées. Toujours la paix. Si c’est à sa lumière qu’il doit son allure, c’est à l’art que l’atelier de Clara Halter, rempli de vie et de culture, doit son caractère.

Robert Colonna d’Istria

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