La viticulture belge se porte bien, merci pour elle. Pour s’en convaincre, direction le Pays des collines et plus précisément le domaine de l’Entre-Deux-Monts, où l’oenologue Martin Bacquaert produit des vins blancs raffinés… et primés !

La commune de Heuvelland valait déjà le détour pour ses paysages idylliques et sauvages, son patrimoine historique et ses délicieux restaurants (lire par ailleurs). Depuis environ cinq ans, l’endroit est également réputé pour ses… vignobles. Ceux de la famille Bacquaert, propriétaire du domaine Entre-Deux-Monts à Westouter, s’étendent entre le Mont Rouge et le Mont Noir, sur la frontière franco-belge. Martin, 32 ans, fait partie de ce clan qui façonne des breuvages depuis quatre générations :  » Mon arrière-grand-père produisait une bière locale, et mon grand-père possédait un négoce… que mon père Yves a repris. Autant dire que je suis tombé dedans quand j’étais petit. Mais c’est très vite devenu une passion, qui m’a poussé vers des études de bio-ingénierie à Gand. Lorsque mon père a eu l’excellente idée de planter des vignes sur des terres appartenant à mon grand-père, j’ai enchaîné avec des études d’oenologie à Montpellier, puis à l’Ecole Nationale d’Ingénieurs des Travaux Agricoles, à Bordeaux. J’ai également effectué des stages en Italie. En 2008, on a rénové l’ancien entrepôt situé entre les plantations. Un lieu résolument moderne par rapport aux châteaux de vignobles « classiques ». Nous produisons donc nos vins dans la cave, tandis que le premier étage accueille l’espace dégustation, avec vue sur l’atelier et le vignoble…  »

Le patriarche se consacre à la commercialisation des bouteilles et à l’organisation des visites guidées. Il entretient également des contacts étroits avec quelques restaurants haut-de-gamme tels que le Hof van Cleve, Oud Sluis et In De Wulf. Martin, lui, s’occupe de tout le reste. Un travail à temps plein :  » La production de vin comporte de nombreuses facettes : récolte, mise en bouteille ou étiquetage, mais aussi gestion du site Internet, paperasses, accueil des visiteurs… On ne s’arrête jamais.  » Bien entendu, parmi les étapes cruciales de ce travail incessant, il y a un élément qui sort du lot : le choix des variétés de raisins.  » C’est extrêmement important. Elles doivent être en adéquation avec le climat de la région. Nous possédons environ 40 000 pieds de vigne de divers cépages, qui s’adaptent parfaitement à notre ciel nordique : pinot gris, pinot noir, chardonnay, auxerrois, kerner (un pied de vigne allemand de la famille du riesling) et siegerrebe (de la famille du gewürztraminer). Le sol sur lequel ils sont plantés est également déterminant. Celui de notre région est pauvre et sec, composé de loam sableux et de minerai de fer. Le taux d’humidité est idéal et le fer veille au transfert de la chaleur vers la surface. Les raisins mûrissants en font bon usage. Les insectes ne nous dérangent pas outre-mesure et nous n’utilisons ni insecticides ni herbicides. Quant aux prédateurs naturels, ils permettent de maintenir un certain équilibre : par exemple, pour chasser les petits oiseaux chanteurs qui se nourrissent des raisins, nous employons des faucons crécerelles. Enfin, nous préparons aussi une bouillie bordelaise, un mélange à base de souffre et de cuivre, afin de lutter contre le mildiou.  » Tout cela sur une superficie assez impressionnante : au total, le domaine couvre dix hectares, dont neuf sont des vignobles…

SEC, AROMATISÉ ET FRAIS

 » Chez Entre-Deux-Monts, nous privilégions la technique traditionnelle, détaille Martin Bacquaert. Un pressoir pneumatique broie les raisins. La température est contrôlée durant toute la durée du processus de production. Ensuite, le jus de raisins fermente dans des cuves en inox, à l’exception du chardonnay qui sommeille dans des fûts en bois. Les ventes se portent bien et, actuellement, nous sommes même en rupture de stock. Cela ne signifie pas que tout est acquis : l’investissement a été considérable et il a été envisagé sur le long terme. L’an dernier, par exemple, la récolte a été décevante, car il faut savoir que le travail du vigneron dépend étroitement des humeurs de la nature. Mais bien sûr, nous faisons de notre mieux pour produire des vins de qualité. Des vins secs, fraîchement aromatisés et légèrement alcoolisés (11 à 12 °); des vins blancs authentiques et élégants, bénéficiant d’une AOC. On ne cherche pas à impressionner, mais c’est une vraie reconnaissance, doublée d’une certaine fierté, lorsque des crus sont primés. La kerner Cuvée Raphaël 2009 nous a permis de remporter la médaille d’argent lors du Concours mondial de Bruxelles. Et on sait que notre mousseux Wiscoutre est très apprécié partout où il est dégusté. Il est élaboré « à l’ancienne », avec des grappes de kerner. Pour l’anecdote, le nom fait référence à l’ancienne appellation franconienne du village flamand de Westouter, où est produit cet excellent vin.  » Que réserve l’avenir ? Martin Bacquaert a l’ambition de lancer prochainement sur le marché un autre mousseux, exclusivement à base de chardonnay, sous le nom de Bacquaert.  » Ma tante, Françoise Bacquaert, réalisait auparavant son propre champagne. Elle a malheureusement arrêté la production, mais nous tentons de renouer avec le passé grâce à cette nouvelle cuvée. Il s’agit d’un vin produit selon la méthode traditionnelle et composé de variétés de raisins également utilisées dans le champagne. A part cela, je vais me marier cette année, mais disons que c’est une autre histoire…  »

Entre-Deux-Monts, 69a, Rodebergstraat, à 8954 Westouter. Tél. : 0496 99 18 29. www.entre-deux-monts.be

PAR PIETER VAN DOVEREN / PHOTOS : FRÉDÉRIC RAEVENS

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