Parce qu’elle a révolutionné la mode, et pas seulement la belge. Parce qu’elle a inventé un style qui porte désormais son nom. Parce qu’elle fête ses 50 ans. L’Académie royale des beaux-arts d’Anvers, département mode, est notre Personnalité de l’année 2013. Deux ou trois choses à savoir sur elle.

Elle pourrait avoir l’air d’une vieille dame, elle fête un double anniversaire, ses 50 ans et les 350 ans de sa maison mère, l’Académie royale des beaux-arts d’Anvers. Mais l’audace est son mantra, dès le début de son histoire. Car la section  » mode  » naît d’une décision, celle de Mark Macken, directeur de l’Académie. Son projet ne fait pas l’unanimité, il n’en a cure, il affirme que  » dans l’histoire, la mode est tellement liée à l’art de son temps qu’elle en est inséparable. Il n’y a pas plus révélateur du temps présent que la mode. Le risque, c’est que l’Art avec un grand A devienne une mode. Mais ce n’est pas une classe de mode à l’Académie qui changera la donne « . Il la confie à Mary Prijot, qui aime Chanel, les chignons et les jupes au-dessus des genoux et a acquis sa notoriété en peinture. La première et unique machine à coudre sera dégotée à l’Armée du Salut, le cursus se basera alors sur le dessin de mode, l’élégance sera de mise et le réfectoire, la scène du premier défilé, millésime 1966.

Elle n’est ni de chair ni d’os, quoique, elle pourrait être constituée de l’addition de tous ceux qui, dans ses murs, ont aimé, pleuré, grandi, coupé, cousu, dessiné, décortiqué un vêtement, pensé et révolutionné la mode. Elle aurait alors le visage de tous ces visages, une mosaïque qui débuterait en 1965 avec Denise Deneef et se terminerait, mais sans fermer les portes, en 2013, avec Ehssan Morshed Sefat. Entre ces deux diplômés  » Mode ontwerp « , on reconnaîtrait Isabelle Baines (1977), Martin Margiela, Walter Van Beirendonck (1980), Ann Demeulemeester, Dries Van Noten, Marina Yee, Dirk Van Saene (1981), Dirk Bikkembergs (1982), Carine Gilson (1989), Filip Arickx, An Vandevorst (1991), Kris Van Assche (1998), Stephan Schneider (1994), Veronique Branquinho (1995), Bernhard Willhelm (1998), Bruno Pieters (1999), Christian Wijnants, Tim Van Steenbergen (2000), Peter Pilotto (2004), Marc-Philippe Coudeyre (2007), la liste n’est pas close. Tous ont reçu cette formation spécifique, qui repose sur le principe du cocon, axée sur l’innovation et la créativité.

L’école a donné vie à un style auquel son nom est désormais associé, à jamais, à l’instar du Bauhaus. Car dans le vocabulaire fashion,  » Anvers  » ou aussi  » Académie d’Anvers  » colle à la peau d’un certain avant-gardisme, défini dès la fin des années 70 par une bande de jeunes gens bien décidés à en découdre. Walter Van Beirendonck, Ann Demeulemeester, Dries Van Noten, Marina Yee, Dirk Van Saene, Dirk Bikkembergs et Martin Margiela rêvaient tout haut de mode, étaient fascinés par Milan, Paris et les Japonais, se sont frottés à cette formation solide dispensée par l’Académie. Dans les rues, en Flandre, on assistait alors à une renaissance culturelle. Willy Claes avait lancé le Plan Textile, la promotion de la mode belge était devenue une préoccupation politique, tandis que l’Institut du textile et de la confection de Belgique mettait en place un concours, La Canette d’or, qu’Ann Demeulemeester remportera lors la première édition en 1982. Il y aura ensuite une réédition du défilé de la deuxième Canette d’or au Japon, puis le stand de la bande, au milieu des robes de mariée, au British Designer Show, à Londres, en 1986, et la postérité qui retiendra leur nom générique, Les Six d’Anvers + 1 (pour Margiela). Aujourd’hui, à la tête de ce département mode de l’Académie, Walter Van Beirendonck sait mieux que personne ce que les uns et les autres ont en commun, ce qu’il doit à l’école, ce qu’elle lui/leur doit. C’est sans doute pour cela qu’il persiste avec ardeur à  » protéger ce foyer créatif unique et particulier dans lequel ce sont les émotions et la passion qui règnent « .

Happy Birthday dear Academie, au ModeMuseum, à Anvers, et Antwerp Icons, dans les rues de la ville, jusqu’au 16 février prochain.

PAR ANNE-FRANÇOISE MOYSON

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