A l’occasion de son 140e anniversaire, l’horlogerie et joaillerie de luxe suisse a présenté sa dernière collection, Extremely Piaget, lors de la Biennale des antiquaires et de la haute joaillerie de Paris. La montre manchette y tient toujours une place de choix.

Accessoire iconique de Piaget, cette fameuse montre-bijou dont le nom fait référence à une manchette de chemise intègre l’entièreté du cadran dans le bracelet, de façon à former une sorte de cylindre. Aujourd’hui encore, les historiens tergiversent quant à son véritable inventeur.  » D’autant plus que les modèles comportant un large bracelet en cuir peuvent également être considérés comme tels, note Béatrice Vuille, directrice du département Brand equity & patrimony chez Piaget, un des fleurons du groupe suisse de luxe Richemont. Ce qui est en revanche certain, c’est que la marque fut la première maison horlogère à en proposer en nombre sur le marché et à s’imposer dans ce domaine grâce à son savoir-faire, son inventivité et son sens de l’esthétisme. Elle a ainsi réussi à faire entrer le garde-temps dans le monde de l’art.  »

Piaget réalise son premier exemplaire en 1969. Le joyau, composé de 1 113 diamants et d’une vingtaine d’éléments en nacre, n’est pas baptisé mais reçoit la même année un prix lors de la cérémonie des Diamonds international awards. Ce prestigieux concours a permis à un certain nombre de créations de s’imposer parmi les plus originales et les plus influentes de l’industrie du diamant et du bijou en général.  » Cette récompense accordée à la manchette a donné naissance à la Collection du XXIe siècle, composée d’une série d’autres modèles mis sur le marché entre 1969 et 1974, tellement avant-gardistes qu’ils ont marqué leur époque, raconte Béatrice Vuille. Les années 70 furent en effet une période de grande liberté, tant en termes de look que de matériaux et de couleurs.  »

Avant d’en arriver là, la route fut toutefois longue pour la marque fondée en 1874 par Georges Edouard Piaget à la Côte-aux-Fées, un village du Jura suisse. Durant les mois sombres d’hiver, de novembre à avril, ce jeune horloger – il avait alors 19 ans – fournissait, grâce à sa petite entreprise, une activité et un revenu de substitution aux agriculteurs locaux désoeuvrés. Un demi-siècle plus tard, en 1957, Piaget connaît une première percée majeure. Cette année-là, lors du Salon de Bâle, la griffe présente son calibre 9P : un boîtier manuel dont l’épaisseur ne dépasse pas les 2 millimètres. Parallèlement, Valentin Piaget, petit-fils du fondateur et alors directeur de l’entreprise avec son frère Gérald, dépose quelques brevets relatifs à un mécanisme automatique extraplat. Le calibre 12P est, lui, dévoilé en 1960. Grâce à l’intégration ingénieuse d’un micromoteur excentrique, il est d’à peine 2,3 millimètres. Une prouesse technique qui fait entrer Piaget dans le Guinness Book mais qui représente aussi une avancée majeure puisque la taille des mouvements horlogers limitait jusqu’alors la créativité. Désormais, les cadrans peuvent être ornés de pierres (semi-)précieuses sans pour autant rendre le boîtier trop massif. La frontière entre bijoux et montres s’efface…

NOUVELLE ÈRE

Ce dispositif ultrafin, couplé à l’arrivée d’une nouvelle génération à la tête de la société dans les années 60 – avec notamment Yves Piaget, arrière-petit-fils du fondateur – signent le début d’une révolution esthétique dans le secteur. Profitant de l’engouement pour l’Op Art, la marque propose dès 1963 des modèles aux cadrans colorés sertis de pierres semi-précieuses. Leurs nuances subtiles confèrent un caractère unique à ces créations, les transformant en véritables bijoux. En 1957, Piaget opte également pour un parti pris fort : désormais, l’entreprise misera exclusivement sur les métaux précieux. Un choix qui lui permettra de développer une grande expertise dans le travail de l’or et du platine, donnant par exemple à des bracelets métalliques la souplesse du tissu. Soucieuse de maintenir en interne la production, la marque acquiert en 1961 ses premiers ateliers spécialisés dans le traitement de l’or, devenant par là l’une des rares manufactures à maîtriser le métier de bijoutier chaîniste.

DÉFI DÉLICAT

Les montres manchettes de Piaget ont toujours été adulées par des icônes du style telles que Jackie Kennedy. Durant les seventies, Andy Warhol était même un fervent collectionneur de la maison.  » La prouesse consiste à proposer un accessoire qui tombe harmonieusement sur le poignet et qui soit agréable à porter, note Alain Borgeaud, gestionnaire du patrimoine historique de Piaget. Ce qui rend la tâche complexe, c’est la rigidité de la manchette. D’autant que certaines structures sont plus délicates que d’autres. Les pierres semi- précieuses ornant le bijou peuvent, en raison de leurs poids, augmenter la fragilité de la composition. Le défi consiste à trouver constamment l’équilibre entre ce qui est possible et ce qui ne l’est pas.  » Démonstration magistrale avec Extremely Piaget, la nouvelle collection de haute joaillerie inspirée par l’héritage de la marque. Une ode à la couleur, aux pierres décoratives et aux codes stylistiques de la maison.

www.piaget.fr

PAR ANJA VAN DER BORGHT

Durant les seventies, Andy Warhol était un fervent collectionneur de la célèbre maison.

Piaget propose dès 1963 des modèles aux cadrans colorés sertis de pierres semi-précieuses.

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