Bruegel, Bellotto, Picasso, Vermeer,… autant d’invitations à humer le parfum printanier des grandes cités. Le temps d’un long week-end.

Madrid Picasso, le grand cannibale

Installé à Cannes dans le splendide isolement de la villa La Californie, Picasso entreprend, à l’automne 1955, sa fameuse série des  » Ateliers « . Par leurs fenêtres grandes ouvertes à l’air de la mer, par l’exubérance capricieuse des palmiers, par leur sobre architecture où flotte un parfum oriental, ces tableaux forment un hommage éclatant à Matisse. Ils inaugurent une époustouflante suite de variations sur un thème. Picasso y revisite, à sa manière, les chefs-d’oeuvre de la peinture : des  » Ménines « , de Vélasquez, au  » Déjeuner sur l’herbe « , de Manet, de  » L’Enlèvement des Sabines « , de Poussin, aux  » Femmes d’Alger « , de Delacroix. Réunies dans les vastes salles immaculées du Reina Sofia, le Beaubourg espagnol, ces séries constituent un extraordinaire exercice de cannibalisme artistique.

Museo nacional centro de arte Reina Sofia, 52, calle Santa Isabel. Tél.: + 34-91-467 50 62. Jusqu’au 18 juin.

Zurich Giacometti surréaliste

Né en 1901 au fond d’une vallée oubliée des Grisons, Giacometti aurait eu 100 ans cette année. Pour fêter cet anniversaire, le Kunsthaus de Zurich réunit un remarquable ensemble de 90 sculptures et d’une centaine de peintures et dessins, dont beaucoup sont présentés au public pour la première fois. Sans faire l’impasse sur les merveilles de la maturité, cette exposition met en lumière un groupe d’oeuvres moins connues, datant de sa période surréaliste. Avant d’inventer ses légendaires silhouettes filiformes, Giacometti fut en effet, dans les années 1930, un des compagnons de route du surréalisme. Ses sculptures-objets enthousiasmèrent Dali et Breton. Ce dernier conserva toute sa vie un exemplaire de la  » Boule fendue  » : une sphère dans une cage suspendue par une corde, qui glisse sur un croissant de lune. Ce qui n’empêcha pas Breton d’excommunier Giacometti du mouvement.

Kunsthaus Zürich, 1, Heimplatz. Tél.: + 41-1-253 84 84. Jusqu’au 2 septembre.

Venise Les vedute de Bernardo Bellotto

Difficile de succéder à un oncle célèbre, surtout lorsque celui-ci s’appelle Canaletto. Qu’à cela ne tienne! Bernardo Bellotto (1721-1780) relève le gant. Mieux : il reprend à son compte le genre qui a fait la gloire du célèbre tonton : la veduta, vue de ville animée de petits personnages. Situé face à la Basilique Saint-Marc, dans un palais néoclassique élevé sur ordre de Napoléon, le musée Correr retrace, en 60 tableaux, la brillante carrière de cet enfant de Venise dont les cours de l’Europe des Lumières s’arrachaient les précieux tableaux. Très vite, Bellotto renonce aux reflets dorés qui ont fait le succès de Canaletto. Baignés d’une lumière froide, à la poésie lunaire, place, quais et façades acquièrent sous son pinceau une précision cristalline, accentuée par l’utilisation de la chambre noire qui assure un rendu infaillible de la perspective.

Museo Correr, piazza San Marco, Venise. Tél.: + 39-041-522 56 25. Jusqu’au 27 juin.

Florence Place aux mélomanes

Juste derrière le Teatro Verdi, en longeant les quais de l’Arno, vous tomberez sur le Teatro Communale, coeur du Mai musical Florentin, dont Zubin Mehta est le maître. En cette année du centenaire de la mort de Verdi, il a choisi  » Il Trovatore « , avec, notamment, Roberto Alagna, qui vient de chanter pour la première fois, le rôle-titre à Monte-Carlo. La popularité du Requiem ne s’émousse pas. Alors pourquoi ne pas le donner deux fois, sous la baguette de Zubin Mehta puis de Bruno Bartoletti, sur la superbe Piazza della Signoria. Les mélomanes plus curieux préféreront  » Penthesilea « , d’Othmar Schoeck, joué pour la première fois en Italie et mis en scène par Harry Kupfer. La France sera aussi représentée avec le danseur étoile Manuel Legris, dans  » Proust ou les intermittences du coeur, un ballet de Roland Petit.

Jusqu’au 30 juin. Tél.: + 39-055-211 158.

Londres Vermeer et l’école de Delft

Au début du XVIIe siècle, la bonne ville de Delft se souciait plus de commerce que de peinture. Mais, vers 1650, elle est touchée par la grâce : l’école de Delft est née, brillant foyer de la peinture hollandaise du Siècle d’or. L’exposition de la National Gallery raconte, en 75 tableaux, l’histoire de ce miracle. A tout seigneur tout honneur, Vermeer triomphe avec un somptueux ensemble de 13 oeuvres. Parmi celles-ci figure la célèbre  » Allégorie de la peinture  » de Vienne, la toile la plus ambitieuse et la plus énigmatique du maître, absente de la grande rétrospective de La Haye, en 1996. Des peintres remarquables qui se pressent autour de Vermeer : Pieter De Hooch et ses intérieurs poétiques; Carel Fabritius, brillant élève de Rembrandt, coloriste hors pair; Emmanuel De Witte, magicien tranquille de la perspective.

National Gallery of Art, Trafalgar Square. Tél.: + 44-207-839 33 21. Du 20 juin au 16 septembre.

Rotterdam Les trésors sauvés de Bruegel l’Ancien

Elue capitale culturelle de l’Europe pour 2001, Rotterdam accueille une rareté que les amateurs d’art ancien ne sauraient manquer sous aucun prétexte : la quasi totalité des dessins de Bruegel l’Ancien (vers 1525-1569). Fondateur de la dynastie qui porte son nom, le grand maître flamand du XVIe siècle avait détruit un grand nombre de ses oeuvres peu de temps avant de mourir, pour ne pas nuire à sa veuve : la Flandre était alors sous le joug impitoyable de l’Espagne, 61 dessins ont tout de même survécu. 57 sont présentés au musée Boymans, par ailleurs propriétaire d’un des taleaux les plus célèbres du maître : La Tour de Babel. A cet ensemble s’ajoute la totalité de ses gravures. Moins connus, les paysages sensibles, réalisés lors d’un voyage en Italie, frémissent encore du bruit des feuillages agités par le vent, du fracas de la charrue sur les chemins empierrés.

Museum Boymans-Van Beuningen, 18-20, Museumpark, Rotterdam. Tél.: + 31-10-44 19 400. Jusqu’au 5 août.

Jérôme Coignard et Franck Erikson

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