« Time Magazine  » l’a rangé, en 2002, parmi les 25 personnalités les plus influentes de la planète mode. Franco Pené, président de Gibo, a fait sortir de l’ombre Paul Smith, Jean Paul Gaultier, Alexander McQueen, Viktor & Rolf, Hussein Chalayan, Marc Jacobs, Helmut Lang, Michael Kors, Antonio Berardi, en passant avec eux des accords pour la production et la vente de leurs collections. Il présente comme un défi personnel le lancement de sa ligne en nom propre, qu’il qualifie, avec un certain humour, de  » Ferrari du prêt-à-porter « . Cette collection-là, au moins, aucun grand nom du luxe ne viendra la lui souffler !

Weekend Le Vif/L’Express : Pourquoi cette envie soudaine de posséder une collection propre ?

Franco Pené : La réflexion autour du lancement d’une ligne propre remonte à plusieurs années déjà. Ma principale motivation est le challenge que cela représente ! Depuis 1995, Gibo a joué le rôle d’incubateur pour de nouveaux stylistes et a développé les affaires de ces derniers avec un certain succès. Sans Gibo, Prada n’aurait jamais racheté Helmut Lang et Gucci ne se serait pas intéressé à Alexander McQueen. Mais les relations que nous développons avec les stylistes pour tout ce qui relève de l’activité opérationnelle (production, planning des collections, etc.) ne s’étendent pas à la création. Le challenge, pour moi, consistait donc à voir si nous étions aussi capables de créer quelque chose.

Vous avez choisi Londres pour votre premier défilé et pour la première boutique Gibo : est-ce la nouvelle capitale de la mode ?

En démarrant de zéro, nous avions le choix de la localisation. Il s’est avéré que notre concept collait mieux à l’image de Londres qu’à celle de Paris ou Milan parce que c’est là qu’il y a le plus de liberté créative. Londres a connu des hauts et des bas, mais c’est le lieu de la création par excellence : un jeune créateur peut y donner toute la mesure de son talent bien plus facilement qu’à Paris ou à Milan.

Comment l’industrie de la mode va-t-elle évoluer ces prochaines années ?

Je ne pense pas que nous revivrons la folie de ces deux ou trois dernières années. Certaines entreprises ont grandi démesurément au point de représenter, aujourd’hui, le mass market du luxe. Trop de produits, trop de magasins, trop de publicité. Au final, trop c’est trop. Ces marques ont perdu leur clientèle historique et je pronostique qu’elles vont avoir davantage encore de problèmes. Cela ne signifie pas forcément une chute de chiffre d’affaires car il y a de nouveaux marchés, de nouveaux consommateurs. Je veux simplement dire qu’elles alignent leur stratégie sur celle de fabricants de produits de masse, comme Procter & Gamble, ce qui est exactement contraire aux principes qui régissent traditionnellement le marché du luxe. Il est important que le consommateur sente l’authenticité de la marque et une certaine concordance entre les racines de l’entreprise et le produit qu’elle vend. Cette année sera très difficile pour un certain nombre d’entreprises et certaines d’entre elles n’y survivront pas.

Cela ouvre la voie à de possibles acquisitions. Est-ce votre intention ?

Nous sommes effectivement intéressés par d’éventuelles acquisitions. Nous avons la santé financière et l’ambition de nous développer, mais pas de manière désordonnée et exagérée.

Propos recueillis par Chantal Samson n

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