Il a hérité de son père ce regard intense et cette distance tranquille. Malgré l’effervescence autour de son paternel depuis la sortie du livre de Nadine Descendre, Pierre Paulin. L’homme et l’oeuvre (Albin Michel), et à l’annonce de la rétrospective qui lui sera consacrée prochainement à Paris (*), Benjamin Paulin, auteur-compositeur passé du rap à la pop, garde les pieds sur terre. Son objectif : redonner vie, avec l’aide de Maïa, sa maman, aux centaines de dessins et prototypes laissés par son papa. Et ce à travers une structure baptisée Paulin, Paulin, Paulin.  » Elle a pour vocation de mettre en lumière la créativité de mon père, l’acuité de son regard et sa liberté d’esprit, explique le trentenaire. Nous souhaitons insuffler de la cohérence entre les différents éditeurs et accompagner toutes les initiatives – livres, expos, etc.  »

Comment expliquez-vous ce regain d’intérêt pour ses meubles ?

Ils incarnent la modernité. C’était un visionnaire. Il a été le premier à utiliser des toiles de maillot de bain en Stretch pour recouvrir les assises en mousse. Et l’un des premiers à concevoir, dans les années 60, du mobilier  » organique  » ou à travailler, dans les années 70, sur le concept de modularité. Il a toujours eu plusieurs longueurs d’avance. Il se définissait comme une queue de comète de l’ère fonctionnaliste. Il était aussi rigoureux dans la réalisation des meubles que novateur et joyeux dans les couleurs, les textures et le design.

Votre père se considérait-il comme un artiste ?

C’est un mot qu’il détestait. Néanmoins, son oeuvre est irrésistiblement artistique. A l’origine, il se rêvait sculpteur. Mais, un jour, en travaillant, il se blesse et doit renoncer à sa vocation. Virtuose du crayon, il se tourne alors vers le design. Mon père avait le talent de visualiser instantanément l’objet en 3D et de le reproduire sur le papier. Il ne s’arrêtait jamais. Le mot  » passe-temps  » ne faisait pas partie de son vocabulaire. Dans notre maison de famille, il était perpétuellement en mouvement. Quand il ne coupait pas les arbres, il sculptait la roche, bricolait ou inventait des objets. Entre nous, la communication passait non par le dialogue, mais par le  » faire « . Cela dit, je me souviens de quelqu’un de tendre et attentionné.

Y a-t-il d’autres valeurs qu’il vous a transmises ?

Ado, je me rebellais contre son intransigeance, mais je reconnais qu’il m’a appris l’exigence, même si ce n’était pas toujours facile de répondre à son désir d’excellence. Le laisser-aller était sa hantise. Mais je dois admettre qu’il a forgé mon goût pour les belles choses, intemporelles, loin du superflu ambiant.

(*) Pierre Paulin, Centre Pompidou, à 75191 Paris. www.centrepompidou.fr Du 11 mai au 22 août prochains.

S.W.

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