Phnom Penh, la capitale cambodgienne, exhale un subtil parfum exotique, charmant et inattendu. Caprice d’esthètes, y flâner est devenu un must. Visite.

Bâtie sur une colline (Phnom) dénommée Penh, la capitale du royaume cambodgien s’étend au confluent de trois fleuves, le Mékong, le Tonlé Sap et le Bassac. Dès son arrivée, tout visiteur parcourt de spacieux boulevards aux trottoirs de dalles roses. Des immeubles colorés, dépassant rarement quatre ou cinq étages, alternent ici et là, avec de beaux vestiges d’architecture coloniale, quelques témoins de modernité ou bien encore des quartiers en construction. Une ville à dimension humaine nimbée d’une trompeuse quiétude…

Son tracé quadrillé, décidé par les Français lors du Protectorat (1864-1953), a survécu. Toutefois la numérotation des immeubles offre aujourd’hui un joyeux fouillis. Ainsi, trouver son hôtel relève parfois du véritable jeu de piste. Sourire aux lèvres, le chauffeur de tuk-tuk (cyclo-pousse motorisé) saura pourtant toujours vous y conduire. Du sublime et luxueux Raffles Le Royal aux simples guesthouses, tous les hôtels jouent ici à fond la carte de l’ancienne Indochine et ponctuent leur décoration de souvenirs nostalgiques. Arrivé à bon port, il est difficile de ne pas se laisser pénétrer par cette douce langueur sensuelle typique des tropiques. Difficile aussi de ne pas capter les sons et les odeurs de la rue, tout ce grouillement de vies qui interpelle notre âme d’explorateur… Première destination, la  » Promenade des Anglais  » locale, le long du quai Sisowath bordant le fleuve Tonlé Sap. Palmiers, drapeaux, réverbères à la française se succèdent jusqu’à l’horizon. Dans la foule bigarrée, on devine beaucoup de sang-mêlé chinois ou vietnamiens parmi les éblouissants visages Khmers dont le teint mat trahit une lointaine parenté indienne. Dans cette foule bavardent ou se promènent nonchalamment, quelques moines en robes safran, des jeunes en bandes, des marchands ambulants et leurs préparations étranges, des familles entières avec leurs bébés ou encore des mendiants et enfants vendant des livres, des cartes postales et des mouchoirs…

Un par un, les quartiers de Phnom Penh bénéficient de rénovations et de nouveaux immeubles sont bâtis. Ici tout et tous se mélangent : petits métiers et grosses entreprises, coiffeurs, dentistes, marchands de glaçons, sculpteurs de bouddhas, spécialistes en informatique, tailleurs et couturières spécialisés en robes de mariée ou encore marchands de fournitures scolaires… Dans un joyeux tumulte, on se bouscule et le spectacle se renouvelle sans cesse. Endroit plus paisible, le Palais Royal, serti dans un immense jardin, comporte divers élégants pavillons dont la structure s’inspire de la sculpture khmère. La salle du trône et son Bouddha d’or et de diamants, la  » Maison de fer  » offerte au roi Norodom par l’impératrice Eugénie, épouse de Napoléon III et la célèbre Pagode d’argent ainsi baptisée pour ses plus de 5 000 dalles d’argent massif de plus d’un kilo chacune couvrant le sol ainsi que les fresques peintes sur les galeries tout autour, sont autant de merveilles éblouissantes. Jouxtant le palais, le Musée national est un autre lieu ravissant avec son architecture aux envolées de toits gigognes. Dans cette vaste bâtisse ocre rose, percée d’un patio central aux bassins d’eau couverts de fleurs de lotus, on contemplera les statues pré-angkoriennes (ive – ixe siècles) de Vishnou et Shiva ou encore les Bouddhas post-angkoriens (après le xive siècle). C’est là aussi que l’on admire assise en posture de méditation, la divine statue de Jayavarman VII, le roi qui a donné ses lettres de noblesse au peuple Khmer. Ce souverain a bâti les plus beaux palais de la glorieuse Angkor, d’où proviennent la plupart des statues du Musée national.

Comme le reste du pays, Phnom Penh jouit enfin de la paix retrouvée après trois décennies de guerre civile et de terreur. Pol Pot est mort, mais le procès des derniers Khmers rouges tarde toujours à se dérouler… Pour ne pas oublier ce pan terrible de l’histoire du pays, on se rendra au Musée Tuol Sleng, un ancien lycée transformé sous les Khmers rouges en prison de haute sécurité (S21). Entre 1975 et 1978, plus de 17 000 personnes y ont été torturées, photographiées puis exécutées. Le Musée est sobre avec ses vieux lits en fer, ses chaînes et ses barres de tortures puis, surtout, ses milliers de portraits en noir et blanc où des hommes, des femmes et des enfants si tristes et désemparés font face à la folie meurtrière de leurs pairs…

Entre lourd passé et futur prometteur

Trente ans d’horreur ont ainsi eu raison de plus de deux millions d’âmes et livré à eux-mêmes plus de 6 millions d’enfants (41 % de la population a moins de 14 ans). Aujourd’hui, de nombreuses ONG jouent un rôle clé dans le développement du pays. Pour les diriger, des expatriés impriment plus ou moins discrètement leur mode de vie avec divers beaux restaurants et boutiques de luxe. Ainsi, autour du Palais et du Musée national, les rues  » 184  » et  » 240  » sont les plus fréquentées. La première recèle quantité de petites galeries d’art et la seconde, une foule de boutiques originales rivalisant d’élégance. Ici, on y trouve vêtements et accessoires en soie – dont les coupes n’ont rien à envier aux plus grands couturiers parisiens -, objets de décoration, £uvres d’art ou encore beaux livres. De superbes bars, restaurants et boulangeries tearoom ponctuent cette succession de belles boutiques. Depuis quatre ans, on peut même se plonger dans les délices du Spa Bliss proposant derrière sa belle boutique de déco, une foule de soins et massages raffinés.

Pour les fashionistas, à quelques minutes de là, il ne faut pas manquer de se rendre en  » moto-dop  » (moto-taxi, moyen de locomotion très prisé) à la boutique Ambre tenue par Romyda Keth, une créatrice cambodgienne formée à Paris. On complète sa malle à souvenirs sur l’épatant Russian Market (Psar O Russei), au sud du boulevard Mao-Tse-Toung, où dans un vaste labyrinthe, on trouve à petit prix (à condition de bien marchander) des vêtements en soie et coton, des foulards, des sculptures, des vraies et fausses antiquités ou encore des bijoux… Pour la couleur locale, on chinera plutôt sur le Nouveau Marché (Psar Thmei), un grand bâtiment jaune Art déco surmonté d’une coupole. Marché principalement dévolu aux habitants de la ville, il déborde de produits frais et autres bien utiles à la vie quotidienne. C’est là que l’on trouvera la vaisselle traditionnelle cambodgienne en faïence blanche et bleue (ou verte et orange) délicatement peinte de libellules.

Le soir approchant, on se rendra près du fleuve pour y prendre l’apéro sur les terrasses des quais, tandis que d’autres embarquent pour une petite croisière permettant d’admirer un magnifique coucher de soleil derrière le Palais Royal.

Sophie Dauwe et Jean-Jacques Serol

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content