Le salaire est aussi rock’n roll que la fille : avec 25 contrats, il avoisinerait les 30 millions de livres sterling (soit 44,5 millions d’euros) selon un tabloïd de la presse britannique. Alors, normal que le succès de cette sexy girl de 32 ans n’en finisse pas de susciter le débat. Les esprits bien pensants brandissant l’argument désormais imparable : Kate, une personnification de la drogue. Une belle hypocrisie du politiquement correct…

De tous temps, les stars ont flirté avec les limites et c’est précisément ce que nous, citoyens lambda, leur demandons d’incarner : notre fantasme de transgression. A travers le miroir du papier glacé, ils nous permettent cette catharsis. Kate est de celles-là. Pas une de ses frasques avec Pete Doherty, son  » boyfriend  » du moment, n’échappe à la presse people. Précisément parce que l’attitude provocatrice et rebelle que seules les célébrités peuvent se permettre fait rêver. Exigeant, le public leur demande l’impossible : afficher des caprices de stars, tout en adoptant un comportement exemplaire, être sage comme une image… de mode. Bref de réussir à marier les contraires, à mêler toutes nos contradictions. Un état d’esprit proche de la passion amoureuse, qui à la fois idolâtre et condamne l’autre, souvent d’ailleurs pour les mêmes raisons. En 1961, dans son film  » Vie privée « , Louis Malle dénonçait déjà les dérives de cette mythification à travers le personnage interprété par une autre icône… BB. Plus près de nous, rappelez-vous la pression humiliante infligée, à la suite d’une incartade sexuelle, à l’acteur britannique Hugh Grant qui avait dû présenter des excuses en public tel un petit garçon qui aurait commis une faute. Tout bénéfice pour la presse anglo-saxonne, gourmande sur le sujet.

Kate, elle, a été surprise, en plein délit de consommation de cocaïne. Prisonnière de sa success story, prise au piège d’une affaire dont on peut soupçonner qu’elle était montée de toutes pièces, victime, peut-être consentante, des mises à l’écart temporaires des maisons de luxe, elle, au moins, a eu l’élégance de se dispenser de demander pardon. Elle a su garder ses distances. C’est pour cela qu’on l’aime.

Au-delà de la polémique, Miss Moss représente la vraie séduction, une fille nature et sexy, tant dans sa version glamour qu’au  » saut du lit « . Tout ce que l’on exige d’une top. Pas plus, pas moins. Le reste, la gréguerre moralisatrice, n’a pas sa place. Kate, c’est une fille comme beaucoup, ni trop belle, ni trop jeune, ni trop star. Reality Kate. Voilà pourquoi on ne s’en lasse pas. Au contraire, au fil des pages, elle est devenue presque une amie, pour ne pas dire la jolie voisine de pallier, la top à laquelle on peut plus facilement s’identifier, à la beauté presque accessible.

Et puis elle incarne mieux que quiconque la cool attitude londonienne. Gueule d’ange, look nature, elle est la fille qui a du style par excellence. La première à avoir lancé la mode grunge chic, celle du jean super skinny porté avec les ballerines léopard, des bottines 1980 avec un mini-short, ou encore celle du grand sac… Un sens unique du look qui la différencie de celles qui ont simplement du goût, rappelle très justement la journaliste de mode Vanessa Friedman dans sa chronique publiée dans le  » Financial Times  » (1).  » Là où le goût suit un certain classicisme, le style, lui, invente. Le style reflète quelque chose de la personnalité de celui qui le porte, le style est risqué et presque impossible à copier.  » Et pour étayer sa démonstration, la journaliste de prendre pour modèle (voilà bien un domaine où la petite Moss a valeur d’exemple !)… la brindille qui, seule, maîtrise cet art subtil d’associer les vêtements de façon originale et inattendue. Tout ce qu’elle porte brille sur elle d’un tout autre éclat. Le petit supplément d’âme d’une fille qui a de la personnalité. Kate Moss est une visionnaire de mode. Un indicateur de tendances. Et rien que pour ça, total respect. Sa vie n’est peut-être pas exemplaire, son look, en revanche, est safe. Un argument qui, en mode, la hisse au rang des sages.

(1)  » Are you a Kate Moss or a Katie Holmes « , In  » The Financial Times « , 2 décembre 2006.

Agnès Trémoulet

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