Au centre de Bruxelles, un ancien tri postal a trouvé une nouvelle vocation et abrite désormais une série d’habitations répondant aux aspirations d’esthétique et de confort modernes. Comme ce loft, exemple de convivialité et de sérénité.

Imposante et majestueuse, la bâtisse a du caractère. Ses origines remontent au début du XXe siècle. Une imprimerie s’y installe. Dans les années 1940, on y a ajouté des ailes supplémentaires, en respectant scrupuleusement le style architectural originel : lignes vigoureuses tracées à la verticale et à l’horizontale, habillage de briques rouges, grandes baies vitrées aux angles droits. Les imprimeurs sont partis et la poste a pris possession des lieux. Au milieu des années 1990, les locaux se vident. Les promoteurs s’emparent du bâtiment et lui imaginent une reconversion remarquable. Après de longs travaux, cet ensemble prestigieux accueille aujourd’hui, sur quatre étages, 17 lofts, dont la surface varie de 150 à 215 m2, ainsi que deux mégalofts de 400 m2 chacun.

L’habitation qu’on visite a une surface intermédiaire de 170 m2. Elle a été magnifiquement repensée et remise au goût du jour par le bureau d’architecture Arts & Architecture (Olivier Provoost, Marie Raucent et Vinciane Cauderlier).  » Nous disposions d’un superbe volume, vaste et haut de 3,50 mètres, ainsi que d’une structure exceptionnelle, déterminée par les six colonnes porteuses en fonte, les poutrelles métalliques et les voussettes, explique Olivier Provoost. Notre souci consistait à mettre en évidence ces qualités et d’assurer une continuité visuelle de l’espace et des plafonds.  » Certes, il a fallu isoler certaines pièces (tels la cuisine et le vestiaire de forme ovoïde) par des parois en dur, mais les séparations n’atteignent jamais les plafonds. Des vides horizontaux ainsi créés apportent une sensation de liberté, de légèreté, de fluidité et renforcent l’identité originelle des lieux.

Le vaste séjour est ponctué par un mobilier sobre et discret. Les fauteuils portent la signature Leolux, marque de design néerlandais. Dans la salle à manger, la table Zeus en acier ciré s’entoure de chaises, dessinées par René Herbst dans les années 1930. Sur une structure en acier laquée, pour un maximum de confort, le designer a confectionné le dossier et l’assise avec des élastiques.

Le regard ne se heurte par ailleurs à aucun objet superflu, aucun détail anecdotique. L’attention est captée par un espace lisse, par la pureté du plancher en chêne, par les belles perspectives et par le jeu des volumes. Un dépouillement très reposant. On s’approche d’une longue cloison argentée, voisine de la salle à manger. Olivier Provoost a dessiné cette armoire de rangement, recto verso, à la fois esthétique et fonctionnelle. Une structure en bois est recouverte d’une tôle fine de 2,5 mm d’épaisseur d’aluminium brossé et rythmée par trois rubans lumineux bleu pâle. Cette intervention métallique s’inscrit bien dans l’esprit industriel du loft. Toutefois, les reflets chauds et laiteux de l’aluminium créent une ambiance actuelle et plus tendre qui s’éloigne de la tendance originelle, plus brute.

L’autre originalité ? La modularité. Durant la semaine, seul, le maître des lieux, originaire d’un pays voisin, vit ici. Le week-end, il est rejoint par sa famille. La fonction des pièces à vivre doit alors changer et le petit salon qui jouxte le vaste séjour, doit se transformer en chambre. Olivier Provoost a tourné la difficulté, en exploitant habilement le concept du mobilier intégré et en jouant, une fois de plus, la carte du recto verso. De l’autre côté de la grande bibliothèque, réalisée avec d’épaisses lames de chêne, l’architecte a conçu un dressing, pris dans un châssis et surmonté d’une imposte vitrée de 60 cm. Celle-ci peut être entièrement occultée par des stores. Le salon devient ainsi une chambre complètement fermée. Le châssis, en acier naturel vernis, cercle la maçonnerie dans un contraste vigoureux et souligne bien le caractère industriel de l’habitation. On retrouve la même idée dans l’espace cuisine. La généreuse échancrure, cerclée d’acier, dévoile un aménagement simple, lisse et élégant. Les plans de travail, très confortables, bénéficient d’une vue généreuse sur le loft. Les rangements sont relégués en dessous, dans des modules de 80 cm, protégés par des portes nettes, sans poignées. En face, l’architecte a aligné toute la partie technique : le four, le frigidaire, le lave-vaisselle et le micro-ondes, de façon la plus discrète possible. Quant aux petits appareils électroménagers, ils peuvent être vite rangés dans un espace protégé par un volet.

L’intimité de la chambre des propriétaires et de la salle de bains, situées à l’arrière, est parfaitement préservée. A l’origine, le bâtiment se prolongeait naturellement dans cette partie. Lors du partage et de l’aménagement des lofts, il a été coupé du côté chambre. On a recomposé la façade avec des parois vitrées. La salle de bains,  » prise en sandwich  » entre la chambre et le séjour, ne bénéficie pas d’éclairage direct, d’où le parti pris de l’architecte de travailler avec des cloisons translucides. L’aménagement est minimaliste, largement souligné par des  » interventions  » en inox, comme le veut la tendance. Une très jolie palette chromatique réchauffe agréablement l’ambiance. Au sol, le marbre portugais Azul Cascais se marie admirablement avec la mosaïque couleur prune qui habille, à l’extérieur, la douche cylindrique. L’intérieur est tapissé de mosaïque gris clair. Dans un coin, l’architecte a dissimulé une porte qui permet d’accéder discrètement à l’autre chambre, via le séjour et en traversant le grand meuble en aluminium…

Bref, les bonnes idées et l’originalité s’accompagnent d’un confort à toute épreuve et d’un raffinement discret. En prime ? L’absence de bruit. La preuve qu’on peut encore trouver, en plein centre-ville, un îlot de paix et de calme, un petit coin de paradis.

Barbara Witkowska

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