Les produits injectables – tels que le Botox et les fillers, littéralement  » remplisseurs  » – permettent d’estomper les rides et de rajeunir le visage. Aujourd’hui, ils ne sont plus seulement l’apanage des stars. Pourquoi cet engouement ? Et quels sont les dangers de ces pratiques ? Les réponses de spécialistes.

« Tu es encore bien.  » Le mot  » encore  » est généralement celui de trop, celui qui fait prendre conscience aux femmes, à chaque fois qu’il est prononcé, qu’elles ne sont plus toutes jeunes. Entre les poches qui campent sous les yeux, les sourcils qui se raréfient, les joues qui se creusent et les rides qui s’installent entre les ailes du nez et aux commissures des lèvres, l’adolescente au visage frais et pimpant des albums photo semble décidément bien loin. Les solutions ? Se résigner et se dire que la maturité a du bon… ou prendre les choses en main. La première option est celle que beaucoup prétendent choisir, la seconde celle dont la plupart rêvent secrètement. Pour preuve, ces cliniques privées de chirurgie plastique, de traitements au laser et de blanchiment des dents qui poussent comme des champignons. Quant aux substances telles que le Botox et les fillers, qui permettent d’éliminer les rides et de combler le volume perdu du visage, elles ne cessent de gagner en popularité.

Monique Lindeboom, journaliste beauté et fondatrice de la plate-forme online BeautyJournaal, estime que l’intérêt pour ces pratiques s’inscrit bien dans l’air du temps.  » Les fillers offrent un résultat rapide. Nous sommes fascinés par les femmes et les hommes beaux et c’est le principe même du processus de sélection biologique. Si des moyens permettant d’améliorer son physique existent, il est normal que les gens en fassent usage.  »

Reste que les produits injectables sont controversés. Ceux qui avouent ouvertement y avoir recours sont souvent considérés comme vaniteux, voire irresponsables. Les médias adorent mettre sous le feu des projecteurs des personnalités comme l’actrice Nicole Kidman qui a tellement abusé du Botox que son visage ne présente plus aucune émotion et qu’elle semble tout droit sortie de chez Madame Tussauds. La presse n’hésite pas à se moquer des pommettes gonflées de Madonna ou à mettre l’accent sur les conséquences désastreuses en cas d’échec de ces pratiques.

S’il est bien entendu essentiel d’informer le public des éventuels dangers et désagréments liés aux interventions, il est également important d’être à l’écoute des personnes satisfaites des résultats et dont le traitement n’est pas, ou à peine, perceptible. Pionnière dans le domaine de la chirurgie cosmétique, le Dr. Helga van den Elzen compte dix-huit années d’expérience dans les produits injectables. Elle gère depuis huit ans sa propre clinique à Naarden, aux Pays-Bas, et donne des conférences dans le monde entier. Selon elle, l’envie d’améliorer son image est compréhensible.  » Quand on est beau, la vie est bien plus simple. L’économiste américain Daniel S. Hamermesh vient de sortir un livre sur le sujet : Beauty Pays – Why Attractive People Are More Successful ( La beauté paie – Pourquoi les gens beaux ont plus de succès, Princeton University Press). L’auteur a consacré une partie importante de sa carrière à étudier l’impact de l’apparence sur l’économie. Sa conclusion ? Celle-ci détermine non seulement grandement le degré de bonheur d’une personne mais aussi son salaire. Les individus au physique agréable gagneraient 17 % de plus.  »

Faut-il dès lors arborer un visage parfaitement lisse pour espérer compter aux yeux des autres ? Fort heureusement non.  » L’intérêt d’une personne dépend à 97 % de son caractère, ses aptitudes et son discours. Les 3 % restants ont trait à l’esthétique et sont également déterminants. L’enjeu n’est pas de devoir présenter un visage ultralisse, d’être beau et éternellement jeune mais plutôt d’être socialement attractif « , précise Annemarie van Gaal, éditrice de magazines.

LE DÉFI : RESTER SOI-MÊME

Longtemps prioritaire pour la plupart des médecins esthétiques avec, pour conséquence, des visages manquant parfois de naturel, l’objectif  » beauté  » passe donc aujourd’hui au second plan. Ainsi, le Dr van den Elzen estime qu’il est inutile de faire disparaître l’ensemble des rides.  » Leur effet est surestimé. Elles n’ont qu’une influence minime sur notre charisme et notre attractivité. On se focalise nettement plus sur les nôtres que sur celles des autres. « 

L’expérience aidant, le Dr. van den Elzen exerce désormais sa profession d’un autre £il.  » Tout a commencé avec une patiente qui se trouvait un air trop sévère. Les commissures de ses lèvres tombaient, tout comme ses paupières. Son visage avait une jolie forme mais on ne le voyait même plus. J’ai relevé les commissures et supprimé l’excès de peau des paupières, ce qui a permis de rouvrir son regard. Elle semblait être une tout autre personne sans pour autant paraître plus jeune ou plus jolie. Lors de notre première rencontre, elle m’avait expliqué qu’elle se sentait toujours obligée de raconter une blague pour indiquer à ses interlocuteurs qu’elle n’était pas aussi sévère qu’elle en avait l’air. Aujourd’hui, elle n’a plus besoin d’agir ainsi.  » Si le Dr. van den Elzen en conclut que le but n’est pas de rendre belles toutes les personnes qui viennent la voir, Monique Lindeboom émet toutefois quelques réserves.  » Prétendre ne pas souhaiter rendre une femme plus jolie mais vouloir lui permettre de rester elle-même s’apparente, selon moi, à un slogan publicitaire. Mais il est vrai que la plupart des gens souhaitent simplement avoir l’air moins sévère ou fatigué. « 

ET À L’AVENIR ?

La recherche médicale et pharmaceutique permet aux techniques de s’améliorer sans cesse. Pour le Dr. van den Elzen, les fillers sont le futur.  » La chirurgie sera de moins en moins utilisée. À l’avenir, la nanotechnologie, qui travaille sur les cellules de la peau à un niveau moléculaire, jouera un rôle essentiel. Nous serons toujours plus performant pour permettre à la peau de conserver son capital jeunesse. La technologie se focalisera davantage sur la prévention. « 

 » Les innovations actuelles sont minimes, affirme pour sa part Monique Lindeboom, à l’exception des fillers à base d’acide hyaluronique auquel sont ajoutées des substances antioxydantes qui pénètrent plus profondément dans la peau. Mais leur fonctionnement et leur efficacité sont peu connus. Actuellement, je les considère plutôt comme des stratégies du marketing.  » L’avenir, la journaliste le voit plutôt dans les produits injectables fabriqués à partir de cellules adipeuses autologues, c’est-à-dire provenant de son propre organisme.  » La graisse corporelle est par exemple prélevée du ventre ou des jambes puis injectée dans le visage. Le résultat est particulièrement naturel, à condition que ce traitement soit effectué par un spécialiste. La graisse contient également des cellules souches pouvant donner un coup de fouet à la peau. Mais les effets secondaires de cette technique ne sont pas encore connus, ce qui suscite quelques interrogations. Les cellules adipeuses ont en outre la caractéristique de stocker les substances toxiques issues de l’environnement et de l’alimentation. Il est essentiel d’étudier les conséquences que ces substances toxiques stockées peuvent avoir en cas d’injection de graisse. « 

PAR HANS BLOMMAERT

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