On raffole de ses currys au lait de coco et de ses herbes fraîches… Mais dans sa large palette gustative, la cuisine thaïe offre bien d’autres saveurs. Découverte à Bangkok des délices de sa célèbre  » street food « … avant de mettre la main à la pâte avec des recettes aux vivifiants parfums épicés.

Les spécialités gastronomiques du Tyrol du Sud et celles de la Sicile, les mettriez-vous à la même sauce ? Eh bien, il en va de la cuisine thaïe comme de l’italienne… Elle est plurielle. La comparaison n’est pas fortuite car les deux pays s’étirent en longueur, à cette différence près que, du nord au sud, l’Italie compte 1 250 km et la Thaïlande plus de 1 750 km. Autre aspect non négligeable : dans l’ex-royaume du Siam, la différence de climats est patente entre, au nord, la frontière birmane, à la limite des contreforts de l’Himalaya, où l’on compte de vraies saisons et où les températures nocturnes sous zéro ne sont pas rares en hiver, et le sud, où les conditions météo sont tropicales.

Globalement cependant, la plupart du territoire thaïlandais jouit d’un climat agréable, qui permet entre autres de récolter des légumes toute l’année. Comme d’autres pays d’Asie ou d’Amérique du Sud qui possèdent des côtes immenses et un ciel clément, la Thaïlande a développé une véritable industrie de la pisciculture. De nombreux poissons et la quasi-totalité des crevettes mis sur le marché sont issus d’élevages à l’intérieur des terres ou de fermes installées sur le littoral.

La Thaïlande s’impose aussi dans le secteur de la volaille. La viande de poulet et de canard est largement exportée, sous forme congelée ou incorporée à des plats préparés. Les producteurs locaux ont conçu des systèmes d’élevage à la pointe des technologies. Enfin, le pays – qui compte environ 15 % de musulmans, contre 80 % de bouddhistes – est à la pointe dans la production et la certification de la nourriture halal.

La cuisine thaïe reflète bien entendu toutes ces réalités. On peut toutefois la résumer en quelques grandes lignes. Tout d’abord, plus on descend vers le sud, plus les repas sont épicés, jusqu’à dépasser la limite du supportable pour un palais non habitué. En second lieu, elle est dominée par la fraîcheur, grâce notamment à ses ingrédients aromatiques : citronnelle en bâton, basilic doux, coriandre (avec sa racine), citrons verts, feuilles de combava… À la différence de la cuisine chinoise, qui l’a cependant généreusement inspirée, elle utilise beaucoup les légumes crus. Au cours du repas, ceux-ci – souvent amers – permettent de contrebalancer l’agressivité du pimenté des préparations.

La cuisine thaïe décline également toute une gamme d’assaisonnements typiques. On pense à la fameuse sauce nam pla, obtenue en faisant fermenter de petits poissons sous l’effet d’un salage, la pâte de poissons, la pâte de crevettes, la sauce soja… Côté textures, elle jongle avec les croustillants frits, que ce soit des  » crackers  » à base de riz ou de manioc ou encore de la peau de porc ou des intestins de poissons soufflés. Et pour ce qui est des cuissons, mis à part le riz et les nouilles qui sont préparés à l’eau ou à la vapeur, le wok est l’instrument à tout faire. Il permet une exécution rapide des différents mets et donc de cette fameuse cuisine fraîcheur.

DES PETITS PLATS BIEN GÉNÉREUX

La fraîcheur, toujours elle, et quel bonheur, se retrouve au c£ur de la street food, un mode de restauration généralisé dans tout le pays, campagne et ville confondues. Le nombre de ces  » micro-restaurants  » se chiffre par dizaines de milliers, peut-être davantage. Les plats – salés comme sucrés – que l’on peut acheter tout au long de la journée sur les marchés ou dans la rue, sont confectionnés par une légion de femmes, à la maison, très tôt le matin, parfois aidées par leurs maris. À défaut de disposer d’une  » infrastructure « , ne fût-ce que de quelques tables, elles vendent surtout des mets à emporter – parfois même une seule recette – dans un contenant aussi simple qu’un petit sachet en plastique.

En Thaïlande, la street food est d’une très bonne qualité gustative. Et on prend peu de risques en la consommant. En effet, les plats sont réalisés quotidiennement et la vente stoppe dès que le stock du jour est épuisé… À Bangkok, un de ses hauts lieux est la Chinatown locale, une bande qui strie la ville sur environ 1 km de longueur et où se sont installés, il y a au moins un siècle, des immigrants chinois. Ce sont leurs descendants qui, aujourd’hui, sont les virtuoses du genre.

Pour découvrir l’immense palette des saveurs thaïes, il ne faut donc pas rater une escapade gourmande à Chinatown, à l’écart des circuits de  » la cuisine royale thaïlandaise  » servie dans les restaurants guindés. Pour goûter à cette incroyable diversité de mets présentée d’échoppe en échoppe, il reste alors à se fondre dans les coutumes locales. La table thaïe est basée sur le partage. On commande plusieurs plats de légumes mélangés ou non avec de la viande ou du poisson, voire du tofu. Généralement s’ajoute à la liste un tom yam, la soupe pot-au-feu nationale, souvent très épicée. La majorité des restaurants proposent en accompagnement les deux cuissons du riz : à la vapeur et à l’eau (dans ce dernier cas, pour un résultat ressemblant davantage à un porridge). Les boissons, elles, se limitent à de l’eau, des sodas, voire de la bière, fortement dilués dans des glaçons. À noter enfin : selon le savoir-vivre thaï, les baguettes sont uniquement utilisées pour manger les nouilles. Pour déguster les autres plats, la fourchette permet de pousser les ingrédients sur la cuiller que l’on porte ensuite à la bouche.

PAR JEAN-PIERRE GABRIEL

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