A Bruxelles, chez Charles Kaisin, architecte, artiste et designer, tout est beauté, tout est vanité. A la fois habitation et atelier, son appartement offre un écrin de prestige à ses créations et aux oeuvres d’art contemporain qu’il affectionne.

Le rêve de beaucoup de citadins est de réduire la distance entre leur résidence et leur lieu de travail. Ce rêve, Charles Kaisin l’a réalisé à la perfection, puisque son habitation et son bureau sont dans le même espace, et certaines pièces ont, au choix, un usage professionnel ou une affectation privée.

Charles Kaisin estime avoir une autre chance, au moins aussi importante que des temps de trajets réduits : il vit de ce qui le passionne.  » Faire ce qu’on aime, assure-t-il, est très difficile. On ne trouve ce qui nous convient qu’en travaillant, et pas seulement en méditant ou en voyageant.  » Autre atout dans sa manche : le jeune homme est riche d’une formation multiple. Il est d’abord architecte – ses années d’études ont été ponctuées par une collaboration avec le Français Jean Nouvel. Il a ensuite suivi un cursus en design, à Londres, qu’il a eu l’occasion de mettre à l’épreuve en passant du temps aux côtés de Ron Arad. Il a enfin étudié au Japon toute une série d’arts appliqués, notamment les tissages et les origamis.

Ses activités, aujourd’hui, sont le fruit de cette éducation protéiforme. Il conçoit des bâtiments – une maison à Tanger et un hôtel à Marrakech sont en train d’être habillés par ses soins -, il crée des objets, et, en artiste pur, enfin, propose des installations. Ainsi a-t-il récemment orné le palais de Justice de Bruxelles de 10 000 origamis fabriqués par des prisonniers – rétribués – à partir de pages de codes civils périmés, dont la disposition composait une fleur d’iris, symbole de la Région bruxelloise.

Aidé de Suzon Ingber, architecte d’intérieur anversoise, il a, il y a peu, aménagé au centre de la capitale, à deux pas de la place Sainte-Catherine, un lieu enthousiasmant, qui réunit son habitation et ses bureaux. L’espace est grand, lumineux, ouvert. Il comporte une partie ancienne, à l’avant, riche du charme de parquets en chêne, de cheminées en marbre noir, de proportions rassurantes, de fenêtres et de portes-fenêtres à petits carreaux, où l’art de vivre des siècles passés semble intact. L’endroit comprend également, à l’arrière, une partie contemporaine qui fournit un résumé d’élégance et de pureté architecturales. Charles Kaisin et Suzon Ingber n’ont pas ménagé leur peine pour mettre ces deux entités en harmonie, recourant massivement au nombre d’or, et n’employant, en tout et pour tout – peintures, poignées de portes, etc. -, que des objets et des matériaux conçus spécialement.

Pour créer ce lieu de vie et de travail, Charles Kaisin semble avoir mis en pratique la célèbre formule de Léonard de Vinci :  » La sophistication ultime, c’est la simplification.  » Le minimalisme auquel il est parvenu résulte d’une grande exigence et d’une grande rigueur. Tout paraît évident, et tout a été mûrement réfléchi, soupesé, pensé. C’est le fruit d’une solide culture et du rêve fou d’incarner la beauté absolue dans les formes de la vie quotidienne.

Quand il est en mode  » bureau « , l’endroit est stimulant. C’est là qu’entouré de ses collaborateurs, Charles Kaisin donne corps à des objets neufs, emploie des matériaux jusqu’ici méprisés – il a longtemps réfléchi aux problèmes de la récupération -, mettant en oeuvre des techniques, celles du pliage en particulier, qu’on trouve rarement dans la création de mobilier… C’est notamment le cas pour des commandes spéciales pour petit h de Hermès, matérialisées sous la forme de  » meubles animaux  » (un secrétaire  » éléphant « , une étagère  » écureuil « …). Quand, à l’inverse, l’espace sert d’habitation, rien n’a été négligé pour que l’art de vivre le plus convivial puisse s’y épanouir. Il suffit de jeter un coup d’oeil à la cuisine qui, derrière ses allures strictes, presque froides, permet de préparer les repas les plus savoureux, activité à laquelle Charles Kaisin se livre avec expérience et passion.

Le charme principal du vaste appartement vient de ce qu’il est rempli d’oeuvres d’art des meilleurs artistes contemporains, tels Ivo Dimchev, Kris Martin, Georges Rousse, Wim Delvoye et Kailiang Yang. Le maître des lieux les a choisies en fonction de ses goûts et de ses affinités, mais en tentant de ne jamais perdre de vue une idée directrice : la vanité de toute chose. Les oeuvres réunies évoquent la fragilité de l’existence, sa précarité, et le ridicule qu’il y aurait à oublier que l’on est mortel. C’est un très vieux thème qui inspire les artistes depuis la Renaissance, que beaucoup de créateurs contemporains – et Charles Kaisin – ont su illustrer et renouveler.

Le grand appartement bruxellois, au total, est aussi réjouissant pour les sens que stimulant pour l’esprit.

www.charleskaisin.com

PAR LUXPRODUCTIONS ET MATHIEU NGUYEN

Le rêve fou d’incarner la beauté absolue dans les formes de la vie quotidienne.

Les oeuvres réunies évoquent le ridicule qu’il y aurait à oublier que l’on est mortel.

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