Pour les jeunes créateurs, défiler à Paris et se frotter à son héritage  » couture  » tient du baptême du feu. Mais Londres l’irrévérencieuse, Milan la glamour et New York la pragmatique sont également de formidables incubateurs à talents. Repérés aux points cardinaux de la planète mode, voici les futurs grands sur lesquels Le Vif Weekend parie.

PARIS: IRIS VAN HERPEN, L’INNOVATRICE

En mars dernier, à Paris, Iris van Herpen dévoilait sa première collection de prêt-à-porter Femme – boléro en résine grillage imprimé en 3D, innovation textile, chemise en soie devant classique, dos découpé graphique, robe en agneau surpiquée de maille serpent. Chez cette créatrice néerlandaise née en 1984, le futur, c’est maintenant. Elle travaille l’infiniment petit, les mouvements électrostatiques et les perceptions sensorielles, qu’elle traduit en vêtements pensés et réalisés en 3D dans des matériaux innovants. Entre mode et art contemporain. Depuis 2007, juste après des débuts chez Alexander McQueen et un diplôme de l’ArtEZ Hogeschool voor de Kunsten, à Arnhem, elle invente une silhouette sculpture et avant-gardiste. Dès juillet 2011, elle défile dans le calendrier de la Haute couture, puis dessine la robe de Björk pour son album Biophilia. Elle est déjà entrée au musée : ses créations, vues au Groninger Museum aux Pays-Bas, s’exposent désormais à la Cité internationale de la dentelle et de la mode, à Calais.

www.irisvanherpen.com

PARIS: NICOLAS ANDREAS TARALIS, LE TAILLEUR-NÉ

Il vient de l’autre côté de l’Atlantique, ça n’en fait pas un outsider pour autant. Naissance à Toronto (1975), études à la Parsons The New School for Design, à New York et, sous la direction d’Helmut Lang, en arts appliqués à l’université de Vienne, assistant d’Hedi Slimane pour Dior Homme, voilà pour la formation. L’aventure personnelle débute en 2003, quand Nicolas Andreas Taralis fonde son label – Homme et Femme mélangés – et présente sa première collection pour l’automne-hiver 04-05. Un travail ensuite à temps plein pour Cerutti durant deux ans et relance de sa maison en 2008. Signe distinctif ? Le sens des matières et du tailoring impeccable et la volonté de tout produire en Europe. Suite logique, en juillet 2012, Bruno Pieters l’invite à dessiner une petite collection capsule pour son projet éthique Honest by, ces deux-là parlent le même langage.

www.nicolasandreastaralis.com

PARIS: JACQUEMUS, L’AUTODIDACTE

Simon Porte Jacquemus a grandi dans le Lubéron, entre soleil et plants de carottes, est monté à Paris, a fait un rapide détour par l’école de mode Esmod et versé dans le happening pour s’imposer. Le règne de la débrouillardise pour cet autodidacte de 23 ans qui crée sa marque en 2009, la met sur le dos de la it-girl Jeanne Damas, puis fait le forcing devant Emmanuelle Alt (rédac’ chef de VogueFrance) avec des mannequins en  » grève de style  » – le genre de truc qui buzze. Depuis, il a quitté les trottoirs pour une piscine et un automne-hiver inspiré qui vit des filles défiler les cheveux mouillés et les clapettes aux pieds avec une fraîcheur décapante. Il n’a pas peur des volumes (il est aussi vendeur chez Comme des Garçons, une bonne école), découpe ses robes au laser, aime les couleurs franches et a les honneurs des boutiques pointues (Dover Street Market, Opening Ceremony, Hunting and Collecting). Et pour emballer le tout, il s’offre un  » documentaire sur la glande « , appelé forcément La piscine.

jacquemus.com

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PARIS: ANTHONY VACCARELLO, LE LAURÉAT

Il fait marcher ses filles sur des escarpins eiffeliens, cambrure de gagnante, et sur Yes Sir, I can boogie, du duo Baccara. En Anthony Vaccarello, le monde est forcément à vos pieds. Rien d’étonnant à ce qu’il soit le chouchou de ces demoiselles, qui se bousculent pour défiler pour lui. La faute à l’allure folle  » qui se lâche, sensuelle et graphique, mais cool  » qu’il dessine depuis 2009 maintenant, comme si c’était à même les corps de liane de Karlie Kloss ou d’Anja Rubik. Rien ne le retient, ni se lancer seul avec son binôme Arnaud Michaux à l’assaut de la planète mode et de Paris, encore moins le travail de la maille, de l’oeillet et du cuir pour cet hiver, avec un talent acéré. Biberonné en Belgique, formé à La Cambre mode(s), passé par Rome et Fendi, primé à Hyères puis par l’Association nationale pour le développement des arts de la mode, il avance pas à pas, mais si sûrement.

PARIS: MAXIME SIMOENS, L’AMBITIEUX

Une gueule de premier de classe, une formation à la Chambre syndicale de la Couture parisienne, un premier défilé, en janvier 2011, à 25 ans, une robe pour Beyoncé sur la pochette de son album 4, un passage chez Léonard, une petite pause et l’entrée d’un investisseur de luxe dans sa maison, LVMH, avec soutien financier et stratégique à la clé. En mars 2013, Maxime Simoens s’offre un défilé prêt-à-porter très Lac des Cygnes, jupes corolle (cf. le tutu), noir (cf. black swan), chaussures (cf. les ballerines), imprimés  » liquide  » (cf. le lac) et motif pied-de-poule composé d’un M et d’un S (cf. Maxime Simoens). Depuis, il a montré sa pré-collection,  » accessible et commerciale « , a conçu une suite pour l’hôtel-spa Les Caudalies à Martillac, près de Bordeaux, finalise un sac et vise un développement à l’international.

www.maximesimoens.com

PARIS: OLYMPIA LE-TAN, LA FRONDEUSE

On peut dire d’elle qu’elle est à la fois française, britannique et vietnamienne, qu’elle aime Faulkner, Fitzgerald et Hemingway et que tous les accessoires qu’elle crée sont des hommages à ces auteurs-là. Il faut rajouter qu’elle fit ses classes chez Chanel puis Balmain, qu’elle débuta en 2009, presque sur un coup de tête et qu’elles sont belles, ses pochettes et minaudières faites main. Quoi d’autre ? Olympia Le-Tan a tout du titi parisien djetteuse, porte toujours du rouge à lèvres  » très  » rouge, sinon elle se sent  » nue « , s’est essayée au film d’animation en stop-motion avec Spike Jonze et Simon Cahn (Mourir auprès de toi) et a lancé une ligne de vêtements à son image, en mars 2012. La dernière en date, celle de cet hiver, conjugue l’effronterie au style, sans jamais minauder.

www.olympialetan.com

MILAN: FAUSTO PUGLISI, L’AMI DES CÉLÉBRITÉS

C’est un autodidacte. A 18 ans, ce Sicilien s’envole pour New York, puis Los Angeles, avec le rêve de percer dans la mode. Un temps assistant du photographe David LaChapelle, Fausto Puglisi travaille pour la styliste Arianne Phillips… et se fait remarquer par Madonna. Il n’en faut pas plus pour que Katy Perry, M.I.A., Beyoncé ou Nicki Minaj fassent appel à lui. En 2006, il développe son style flamboyant et baroque dans sa propre collection de prêt-à-porter. Son amie et muse Anna Dello Russo, fashion editor de Vogue Japon, porte régulièrement ses créations et a largement contribué à faire connaître son style. A noter que depuis septembre 2012, l’Italien est aussi directeur créatif de la griffe Ungaro, où son esprit aussi sexy qu’extravagant est apprécié.

www.faustopuglisi.com

MILAN: GABRIELE COLANGELO, LE LUXE INTEMPOREL

Pour cet Italien qui a grandi dans une famille active dans l’industrie de la fourrure, les mots artisanat et grâce ont très tôt eu une résonance particulière. Ils se retrouvent, aujourd’hui encore, dans les collections que Gabriele Colangelo imagine depuis 2008. Celui qui a commencé sa carrière chez Versace et Cavalli est passionné par la recherche de matériaux de haute qualité. Dans ses collections, chaque détail est précieux. Ses créations se distinguent par une élégance intemporelle. Son hiver 13-14 associe matières fluides et lourdes, tissus mats et scintillants, avec une maîtrise de la coupe et des proportions. Coup de coeur pour ses manteaux structurés au joli dégradé.

www.gabrielecolangelo.com

MILAN: MARCO DE VINCENZO, LE JEU DES TEXTURES

L’Italien a étudié à l’Institut européen de design de Rome, avant de travailler pendant dix ans pour Fendi, comme chef du département accessoires. En janvier 2009, Marco de Vincenzo se lance en son nom propre à Paris, durant la semaine de la Haute couture. Et, quelques mois plus tard, se décide finalement pour le prêt-à-porter, en défilant à Milan. Celui qui est déjà cité comme l’un des membres de la nouvelle vague de créateurs italiens aime jouer sur les effets graphiques. Pour sa collection automne-hiver 13-14, ce passionné de technologie et de recherche de matières a puisé son inspiration dans le Manifesto Blanco du mouvement spatialiste. Les textures sont métamorphosées, pour un résultat toujours très élégant.

www.marcodevincenzo.com

LONDRES: SISTER BY SIBLING, L’AMOUR DE LA MAILLE

Joe Bates, Sid Bryan et Cozette McCreery sont trois amis de longue date, qui ont enchaîné les collaborations transversales pour des artistes, musiciens et marques de mode, avant de fonder leur propre label, en 2008. Leur matière de prédilection ? La maille, qu’ils utilisent dans leur ligne Homme, mais aussi, depuis trois saisons, dans une collection féminine, baptisée Sister by Sibling. Le trio s’appuie notamment sur une bonneterie écossaise de grande tradition pour réaliser ses pièces. Des modèles basiques en apparence, enrichis par des détails et de la couleur. Le résultat, qui se veut  » utile, amusant et optimiste « , vient de séduire le jury du Woolmark Prize : Sibling représentera en effet l’Europe à la grande finale internationale de ce concours, en février prochain.

www.siblinglondon.com

LONDRES: SIMONE ROCHA, L’ESPRIT ROMANTICO-PUNK

Cette Irlandaise née en 1986 est déjà la chouchoute des concept stores, comme Colette (Paris), Dover Street Market (Londres) ou Smets (Bruxelles). Il faut dire que la jeune femme, formée au Central Saint Martins College of Art and Design, a la mode dans le sang, puisque son père n’est autre que le créateur John Rocha. Depuis ses premiers pas sur les catwalks de la Fashion Week de Londres – c’était pour sa collection hiver 11-12 -, Simone Rocha cultive un univers romantique et fragile, réveillé par quelques touches plus masculines, voire punk. A noter que sa collection pour cet hiver est inspirée par ses grands-mères et propose, une fois encore, un jeu de matières des plus intéressants.

www.simonerocha.com

LONDRES: J.W. ANDERSON, LA CONFUSION DES GENRES

Si ce comédien irlandais avait d’abord choisi de dédier sa vie au théâtre, son amour des costumes l’a finalement poussé à étudier le prêt-à-porter masculin. Jonathan William Anderson se lance en 2008 et, deux ans plus tard, imagine une collection féminine. La confusion des genres constitue le fil rouge de son travail, avec une androgynie poussée à son paroxysme et un grand sens du tailoring, sur fond d’imprimés graphiques. Un point de vue d’ores et déjà célébré, puisque le créateur a gagné l’Emerging Talent Award – Ready to Wear, aux British Fashion Awards de 2012. Il y a quelques mois, il a aussi officié aux côtés de l’Italienne Donatella Versace, qui l’a choisi pour dessiner la première collection capsule de Versus, sa seconde ligne.

j-w-anderson.co.uk

NEW YORK: CUSHNIE ET OCHS, LA SEXINESS ATTITUDE

C’est l’association entre deux créatrices : Carly Cushnie et Michelle Ochs (prononcez  » ox « ). Ces deux-là se sont rencontrées sur les bancs de la Parsons The New School for Design, à New York. Et ne se sont plus quittées depuis. En 2008, elles imaginent leur première collection, immédiatement louée par la critique. Pour André Leon Talley, célèbre plume de Vogue US, le label Cushnie et Ochs a tout compris, en trouvant le juste compromis entre un esprit edgy et des vêtements portables dans la vraie vie. Ces derniers s’adressent à une femme sexy et sophistiquée, qui aime des tenues près du corps, à l’ourlet court et aux découpes savamment placées. Tout sauf une timide, en somme. Mais jamais rien de vulgaire à l’horizon. La preuve ? Michelle Obama a déjà porté l’une de leurs robes.

cushnieetochs.com

NEW YORK: NATALIE RATABESI, LA FÉMINITÉ AU QUOTIDIEN

Le CV de Natalie Ratabesi est solide. Cette femme de 34 ans est diplômée du Central Saint Martins College of Art and Design de Londres et a fait ses classes chez les plus grands : Dior, Oscar de la Renta, Gucci, Valentino et Ralph Lauren. Désormais, elle officie comme directrice artistique de Philosophy, la seconde ligne d’Alberta Ferretti. En février dernier, elle a présenté sa première collection pour le label, à New York. Ses silhouettes sont féminines et romantiques, comme le veut l’ADN de la marque. Mais Natalie Ratabesi met un point d’honneur à ce que ses créations puissent être portées au quotidien. Cet hiver, elle donne une large place au mohair, associé avec une jupe ample. Une mode contemporaine, qui s’affiche en toute discrétion.

www.philosophy.it

NEW YORK: SUNO, L’IMPRIMÉ ÉTHIQUE

En 2008, Max Osterweis est témoin de violences post-électorales au Kenya, qui menacent l’économie et l’industrie de ce pays cher au scénariste américain. Grâce à une série de tissus traditionnels africains vintage qu’il a acquis au gré de ses voyages, il lance une collection de vêtements éthiques haut de gamme, en collaboration avec Erin Beatty, diplômée de la Parsons The New School for Design et jusqu’alors styliste pour Gap et Generra. La griffe utilise au maximum ses racines africaines et organise sa production au Kenya, mais aussi en Inde, au Pérou et à New York, où est installé son quartier général. Combinant techniques traditionnelles et tailoring de pointe, l’ensemble est optimiste et moderne. Il vient d’ailleurs de recevoir le Swarovski Award qui récompense une marque de prêt-à-porter féminin, dans le cadre du Council of Fashion Designers Awards (CFDA).

www.sunony.com

PAR ANNE-FRANÇOISE MOYSON ET CATHERINE PLEECK

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