Directeur design chez Baume & Mercier, Alexandre Peraldi revient sur son parcours riche d’un quart de siècle dans le monde de l’horlogerie. Drôle de trajectoire que celle de l’Homme à la jupe, qui avoue s’être retrouvé dans l’industrie du luxe  » un peu par hasard « .

A 15 ans, Alexandre Peraldi rêve de fabriquer de robustes armoires normandes et entre à l’Ecole Boulle à Paris. Hélas, les ateliers d’ébénisterie affichent complet, il doit se rabattre sur la gravure ornementale.  » Et en fait, j’ai trouvé ça extraordinaire.  » Il décroche un stage en joaillerie chez Cartier, mais l’absence de fonctionnalité du bijou ne l’emballe pas :  » J’avais bien trop de liberté. Or, je ne conçois pas mon travail de designer sans contrainte, sinon ça devient un travail d’artiste. Les contraintes m’arrangent parce qu’elles me dérangent. J’ai besoin de ne pas être satisfait pour avancer.  » A l’issue de son cursus, il est embauché chez Cartier, division Accessoires :  » Arts de la table, lunettes, briquets, stylos, ça m’intéressait beaucoup plus. De fil en aiguille, je suis passé à l’horlogerie.  »

Après plus d’une décennie chez Cartier, Alexandre Peraldi a des envies d’ailleurs. C’est tout naturellement qu’il se rapproche de la Suisse, berceau de l’industrie horlogère, et s’installe dans la banlieue française de Genève.  » J’aime la façon de penser et de bosser de ses habitants, puis la qualité de vie est magnifique. En signant chez Baume & Mercier, j’ai découvert un autre univers. Comme un musicien qui doit faire dix ans de Conservatoire classique avant de faire du jazz, après mes gammes classiques chez Cartier, je me suis mis au jazz chez Baume.  » Et ça swingue depuis douze ans aux bords du lac Léman. Le défi quotidien étant de proposer quelque chose de neuf, tout en préservant l’héritage d’une maison fondée en 1830.  » Cet équilibre compliqué, c’est ce qui rend mon job passionnant. Tout a déjà été fait, il faut donc trouver des idées à revisiter.  » Comme dans le cas de la montre Clifton, élégante réinterprétation d’un modèle des années 50, présentée au Salon International de la Haute Horlogerie, du 21 au 25 janvier à Genève. Et si Baume & Mercier profite du retour en grâce actuel de la tendance rétro, pas question de succomber aux sirènes de la mode, les produits doivent avant tout résister à l’épreuve du temps :  » Idéalement, notre montre ne vieillit pas. On ne cherche pas à démoder nos propres créations pour susciter un nouvel achat. Ce n’est pas ça, le luxe. Le luxe, ça doit durer.  » Matériaux et finition se doivent donc d’être irréprochables, avec un soin tout particulier accordé à l’ergonomie.  » La montre doit être belle, mais aussi agréable à porter. Quand on me dit qu’une montre est tellement confortable qu’on l’oublie, c’est un des plus beaux compliments.  »

Ce souci du confort, Alexandre Peraldi le cultive jusque dans son look. Ses célèbres jupes sont devenues sa signature et il s’en amuse.  » La jupe, l’essayer, c’est l’adopter. Je trouve ça aussi élégant que commode, en plus je dessine moi-même mes modèles, bref j’adore. Je suis designer, je peux mettre une jupe, si j’étais financier, je ne pourrais peut-être pas. Je n’aime pas les étiquettes mais franchement ça me fait marrer.  » Une approche totalement personnelle et décontractée, inutile d’y chercher un quelconque prosélytisme vestimentaire :  » Je ne milite pas, je ne porte aucun combat. Les femmes ont dû se battre pour porter des pantalons, aujourd’hui on n’en est plus là, chacun fait ce qu’il veut.  » Mais est-ce que ça ne l’énerve pas de toujours ramener les choses à ses jupes ?  » Pas du tout, surtout que c’est un peu de ma faute. Bien sûr, j’aimerais qu’on se rappelle plutôt de mes designs, mais on se souvient surtout de mes jupes. Ce n’est pas très grave car, en général, on finit quand même par parler un peu de mon travail !  »

PAR MATHIEU NGUYEN

 » LA JUPE, L’ESSAYER, C’EST L’ADOPTER.  »

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