Coco Chanel, c’est aussi une longue histoire d’amour avec Paris. Parmi ses lieux de prédilection dans la Ville lumière : sa suite au Ritz et son QG de la rue Cambon. Deux adresses qui exhalent un parfum de légende.

Qui se souvient de Joseph Cambon, membre de la Convention qui donna son nom de famille à l’étroite rue parisienne qui fait face aux jardins des Tuileries ? Certainement pas les aficionados de la mode pour qui un seul nom vient à l’esprit : Chanel ! Est-il besoin de rappeler que c’est ici, au n° 31, que bat le c£ur de la maison de couture où Mademoiselle travailla sans répit jusqu’à sa mort en 1971 ? Combien de fois sa frêle silhouette s’est-elle reflétée dans le fameux escalier aux miroirs ? Grâce à un jeu de glaces, Coco l’intraitable, pouvait voir sans être vue. On l’imagine sans peine, avec ses deux petits yeux perçants, sa cigarette Kent aux lèvres, scannant de haut en bas les mannequins défilant à huis clos dans les salons d’essayage du premier étage. Prête à bondir au moindre pétale de camélia revêche. Ces salons haute couture ont été remaniés depuis par Karl Lagerfeld, le directeur artistique de la griffe au double C, qui en a conservé l’esprit d’élégance.

En empruntant l’escalier aux mille reflets, on accède au deuxième étage (le troisième est réservé aux ateliers), où se nichent les appartements privés de Coco Chanel, où tout a été conservé dans l’état d’origine. Pénétrer dans ce saint des saints, c’est comprendre ce qu’était intimement cette grande créatrice de mode. L’entrée du sanctuaire révèle son goût pour les paravents en Coromandel, des laques de Chine, dont elle commit le crime de lèse-majesté de les détacher de leur support pour en tapisser les murs !

Esprit libre et frondeur, Coco aménagea le salon annexe avec la même liberté de ton. Le total look a été banni au profit d’un amoncellement d’objets hétéroclites et sublimes. Chacun d’entre eux raconte la femme derrière la créatrice. Cette bible tannée, rangée dans la bibliothèque, rappelle son attachement au catholicisme. Cette table basse ornée d’un pied en forme d’épi est un symbole de prospérité puisque Mademoiselle était superstitieuse. Cette main en bronze moulée ? Une création de son ami Giacometti. Les branches d’un lustre en métal forment le monogramme de la griffe, soit un double C enchâssé, double car le deux était un chiffre fétiche.

Et cette cage miniature de la taille d’un dé à coudre ? Bien sûr, c’est celle qui inspira Jean-Paul Goude pour une publicité Chanel où l’oiseau Paradis, Vanessa, retenue prisonnière sur sa balançoire, signa l’esthétique des années 1980. Coco qui détestait l’ennui racontait que le buste de cet ecclésiastique qui repose sur la cheminée de la salle à manger était un membre éminent de sa famille. Le récit variait du tout au tout en fonction de ses humeurs.

Il y a aussi un salon, à l’autre bout de l’appartement mais guère de chambre. Car, à partir des années 1930, Coco vécut au Ritz. Par amour du luxe et par commodité : le célèbre palace parisien a une entrée secondaire rue Cambon qui lui permettait de rallier son QG en quelques secondes. Elle occupa longtemps la suite 302 qui porte désormais son nom, au dernier étage. La chambre et ses salons dominent majestueusement la place Vendôme. Ils affichent bien des similitudes avec les appartements de la rue Cambon. Ce penchant pour les murs miroirs, les ornements à pampilles ou les paravents laquésà Et aussi la présence d’une boule en cristal, où le destin de Coco s’inscrivait en volutes et en C majuscule.

Le Ritz était le refuge de Coco. Bien qu’elle aimait fréquenter le restaurant du palace – où elle avait sa table à l’année, elle se faisait fréquemment servir des huîtres dans sa chambre non par goût mais pour tenter de s’y habituer ! Entourée de ses domestiques, elle y vécut ses derniers jours, ne quittant jamais son chapeau ni son tailleur. Elle qui affectionnait tant les maximes, affirmait :  » On s’habitue à la laideur, jamais à la négligence. « 

Antoine Moreno

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