De la rencontre entre Olivier Echaudemaison, directeur

artistique de Guerlain, et Laudomia Pucci, Image Director

de la maison qui porte son nom, est née une ligne de maquillage d’été, en édition limitée. Interview croisée exclusive.

Quand un grand nom de la mode s’associe au leader mondial de la cosmétique de luxe, le résultat ne peut qu’être exceptionnel. Pour preuve : la collection de make-up exclusive signée  » Guerlain by Emilio Pucci « . Pour le créateur comme pour la prestigieuse maison parisienne, il s’agit d’une toute première expérience de crossover. Essai transformé, sans doute grâce au talent et à la complicité d’Olivier Echaudemaison, directeur artistique de Guerlain, et de Laudomia Pucci, Image Director de l’institution fondée par son père dans les années 1950. Chacun s’est enrichi du talent de l’autre. Edition limitée oblige, le coffret yeux, la réédition des Météorites, le pinceau dans son écrin, les quatre brillants à lèvres et le blush mousse ne seront distribués que dans la  » Maison Guerlain « , au 68 de l’avenue des Champs- Elysées, à Paris, et, pour la Belgique, dans certaines parfumeries sélectives (retrouvez-en la liste exhaustive sur www.weekend.be). En attendant la sortie prévue le 19 mai prochain, Olivier Echaudemaison et Laudomia Pucci nous dévoilent comment a éclos cette jolie collection aux couleurs de l’été.

Weekend Le Vif/L’Express :  » Guerlain by Emilio Pucci  » est une première pour vos deux grandes maisons. Comment vous êtes-vous choisis ?

Olivier Echaudemaison : J’ai toujours adoré la mode. Dans ce sens, chez Guerlain je me sentais à la fois heureux, parce qu’on peut tout imaginer très librement, sans les contraintes imposées par une maison de mode, mais aussi un peu  » frustré « . En 2005, j’ai proposé ce projet à Laudomia Pucci parce que la rencontre entre deux grandes maisons, qui ont en commun le goût des couleurs et la recherche de raffinement, était selon moi particulièrement judicieuse.

Laudomia Pucci : L’idée de collaborer avec une maison de prestige nous a immédiatement séduits. Le défi était d’autant plus intéressant que Pucci n’a jamais eu de ligne de cosmétiques. Mon père a fait beaucoup de choses très diverses, des uniformes aux tapis en passant par la porcelaine, mais jamais de ligne de maquillage. Sans doute parce que l’occasion ne s’est pas présentée : pour toutes ses collaborations, il a toujours réagi au coup de c£ur, à l’enthousiasme du moment. Pucci et Guerlain partagent aussi un sens de la fluidité, de la sensualité, qui fait que des rapports privilégiés étaient possibles entre nous.

Deux années se sont écoulées entre le projet et sa concrétisation. Pourquoi un si long délai ?

O. E. : Effectivement, cela peut sembler long pour créer une minicollection. Mais il faut savoir que nous avons tous les deux le même souci de perfection ! Chaque petit détail a été approuvé par les deux maisons. Nous avons par exemple beaucoup réfléchi sur la signature : fallait-il la placer sur le pack-aging, à l’intérieur des boîtiers ? Une foule de petites choses qui font le raffinement discret de Guerlain et de Pucci, car c’est dans la subtilité que l’on reconnaît le vrai luxe, jamais dans l’ostentation.

L. P. : Il ne s’agissait pas seulement de décliner l’imprimé Pucci dans une ligne de maquillage. Pour ce projet, nous avons travaillé comme si Pucci et Guerlain formaient une seule maison : il n’était pas question de se répartir les tâches, nous avons tout élaboré ensemble, ce qui prend forcément plus de temps. Chacun a beaucoup appris de l’autre : c’était un travail très constructif, rendu possible par la confiance et le respect que chacun a mis dans les requêtes de l’autre. Comme tout se passait entre Florence et Paris, on s’envoyait des paquets toutes les semaines. DHL nous dit merci !

Comment êtes-vous parvenus à concilier les codes de Pucci, en particulier l’exubérance des couleurs, avec ceux de Guerlain, qui s’inscrivent dans un esprit plus  » boudoir  » ?

L. P. : C’est sans doute une déformation liée à mon métier, où tout passe par des croquis, mais j’ai besoin de voir les choses pour pouvoir les appréhender. La toute première étape de notre collaboration a donc été la création d’un foulard – c’est de là que tout part toujours chez Pucci – mariant les couleurs qu’Olivier nous indiquait comme celles de l’été 2007 :  » lavander « ,  » aqua « ,  » rosy pink  » et  » bright white « . Ce carré, qui reprend aussi le pinceau, les célèbres Météorites et le  » G  » chers à Guerlain, a joué le rôle d’épreuve d’artiste, il a servi à lancer toute la collection.

O. E. : Nous avons ensuite décliné l’esprit du foulard dans les huit produits de cette griffe. Les codes des deux maisons ont été interprétés de manière à ce que chacune s’y retrouve, pour arriver à quelque chose d’unique, d’immédiatement identifiable comme étant  » Guerlain by Emilio Pucci « . Au-delà de cette collection, notre collaboration marque la fusion de deux histoires. Ce qu’il y a de plus magique, c’est le fait que ces deux institutions ont donné naissance à quelque chose de très moderne tout en respectant leurs identités fortes.

On sent qu’un effort tout particulier a été fait sur le packaging, qui est tout à la fois extrêmement élégant et ludique.

L. P. : Là aussi, il s’agit d’un mariage entre les signes distinctifs de nos deux griffes. Pour l’occasion, Guerlain a abandonné sa traditionnelle référence à l’or au profit de l’argenté. Et chaque coffret yeux est unique, puisqu’il a été façonné dans un morceau différent du foulard que nous avons dessiné pour l’occasion.

O. E. : J’aime que les femmes retrouvent un plaisir de petites filles à manipuler leurs maquillages. Avec les gloss bicolores ou avec le coffret yeux, on est vraiment dans le ludique. J’ai imaginé les couleurs et les textures en pensant à une femme heureuse, amoureuse, dont les yeux brillent devant les boîtiers, les crayons…

A quelle femme s’adressent les pastels acidulés de la palette  » Guerlain by Pucci  » ? A l’heure où le  » nude  » fait fureur, cette palette est surprenante…

O. E. : Nous avons travaillé sur ces couleurs dans un esprit  » vacances à Capri « . Mais qu’on ne s’y trompe pas : ces couleurs semblent vives, mais elles sont très tendres, transparentes et légères au niveau des matières. Et il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un maquillage d’été, et que la lumière forte a tendance à absorber les couleurs. Je pense par ailleurs qu’avec la tendance  » nude  » qu’on a vue l’hiver dernier et ce printemps, on aura envie de choses plus colorées. Cette palette s’adresse à toutes les femmes, pour le jour comme pour le soir. Aujourd’hui, en make-up, on est au-delà de la dichotomie jour-soir. Je conseille toujours d’utiliser les mêmes tons, quitte à accentuer davantage la bouche en soirée.

L. P. : J’avoue avoir été surprise par le gloss turquoise ! Mais en réalité, il a un rendu très naturel. Selon moi, cette palette va séduire des femmes très différentes : les jeunes filles, qui aimeront le côté fashion, exclusif de  » Guerlain by Emilio Pucci « , les trentenaires qui en apprécieront le côté  » charming  » et élégant et les femmes plus âgées qui seront séduites par la référence à la culture d’une grande maison de mode. Sans oublier toutes celles qui raffolent des collectors, puisqu’il s’agit d’une édition très limitée.

Justement, pourquoi proposer une période de distribution aussi courte ?

L. P. : Dans l’univers de la mode et du luxe, tout va de plus en plus vite. Nous avons voulu non seulement que  » Guerlain by Pucci  » soit une édition limitée, mais qu’elle ne soit en outre distribuée que dans certains points de vente sélectionnés et pendant quelques mois, pour accentuer encore le côté exclusif.

O. E. : La gamme sera distribuée de mai à août prochains. Après, ce sera la rentrée, on aura envie d’autre chose.

La belle réussite de ce projet vous a-t-elle donné envie, à l’un comme à l’autre, d’aller plus loin, de continuer à explorer la voie des collaborations ?

O. E. : Non, nous avons d’autres projets d’associations mais pas avec l’univers de la mode. Très peu de marques me font vibrer comme le fait Pucci.

L. P. : Ce projet est unique et exclusif, il faut le prendre comme quelque chose qui tient à la magie de l’instant et pas comme un point de départ pour une collaboration qui se pérennise ou un tremplin vers d’autres plans.

Propos recueillis par Delphine Kindermans

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