Barbara Witkowska Journaliste

Elle utilise exclusivement des pierres qui font vibrer l’âme et parlent aux sens. Mariées à l’or fin, ses parures sont des merveilles de simplicité, de délicatesse et de féminité. Pleins feux sur Marie-Hélène de Taillac et ses créations inspirées.

Carnet d’adresses en page 142.

Connaissant le travail de Marie-Hélène de Taillac et sa fascination pour l’Inde, on s’imagine, en sonnant à sa porte, pénétrer dans un décor des Mille et Une Nuits, tapissé d’étoffes chatoyantes et baigné d’effluves d’encens voluptueux. Et puis, non. La jeune femme évolue dans une ambiance épurée sans être minimaliste, au design ludique et coloré. Dans le salon, le plancher sombre, entièrement nu, met en valeur le canapé vert d’eau de Philippe Hurel et des fauteuils bleus  » tulipe  » de Pierre Paulin. Les luminaires sont de Tom Dixon, la bibliothèque, inspirée du style sinueux des années 1960, a été dessinée par Christian Biecher, un jeune designer qui fait beaucoup parler de lui à Paris. Au mur : un tableau blanc parsemé de neuf pastilles colorées. Les objets ou les bibelots  » bavards  » n’ont pas leur place ici, toute anecdote est bannie. L’atmosphère est nette et sobre et, à la fois, gaie et très accueillante.

Marie-Hélène, de blanc vêtue, parle doucement, sourit amicalement. Ses gestes sont lents et calmes. Elle raconte son enfance nomade et cosmopolite, imprégnée très tôt par le fascinant Orient. Elle est née en Libye. Papa travaille dans le pétrole et, quelques années plus tard, la famille le rejoint à Beyrouth. Marie-Hélène dévore des yeux cette ville vivante et multiculturelle, réfléchit à son avenir et s’interroge. Elle adore l’archéologie, se passionne pour les Phéniciens et les Byzantins. Elle passe aussi beaucoup de temps dans les ateliers des artisans bijoutiers, admire leur travail. Les pierres l’émerveillent à tel point, qu’elle entreprend, à 18 ans, les études de gemmologie à Londres. Mais, tout bien considéré, elle bifurque vers la mode qui la comblera pendant dix ans. Elle dirige tout d’abord la maison de couture de Victor Edelstein, couturier de lady Diana, puis assiste Philip Treacy, le modiste londonien qui imagine des couvre-chefs époustouflants.  » Philip est un passionné, complètement impliqué et investi dans la création de chapeaux, confie la jeune femme. Je voulais moi aussi avoir une passion, trouver un métier qui me transporte…  » Marie-Hélène s’octroie alors une année sabbatique. L’Inde est le pays tout indiqué pour la réflexion. Direction Jaipur.  » Ici, le rythme de vie est très différent. C’est un pays qui vous remet les pieds sur terre.  »

Le langage des pierres

Un dicton populaire dit  » Qui cherche, trouve.  » Un jour, c’est la révélation. En franchissant les portes du Gem Palace à Jaipur, fief des frères Kasliwal, bijoutiers des maharadjahs depuis cinq générations, Marie-Hélène (re)découvre le travail des tailleurs de pierres et des artisans joailliers. La boucle est bouclée. La jeune femme renoue avec ses rêves d’adolescente et se voue désormais, corps et âme, à la création de bijoux. Lucien Pellat-Finet (ses pulls en cachemire, très haut de gamme, sont un must) lui donne le dernier coup de pouce et présente sa première collection dans sa boutique. Depuis, Marie-Hélène passe six mois par an à Jaipur. Elle sélectionne les pierres et les fait tailler en forme de goutte ou de poire.  » J’ai relancé la briolette, cette taille en poire, un peu oubliée aujourd’hui « , souligne-t-elle. Une bonne dizaines d’artisans façonnent à la main les montures délicates et patinent l’or, suivant les dessins de la créatrice. Puis ils y apposent les pierres multicolores qui, comme des gouttes d’eau, ruissellent sur le décolleté, les doigts, les bras ou les oreilles.  » Mon approche des bijoux est différente, dans la mesure où je ne sertis pas les pierres. Toutes les pièces ont ce côté duveteux, tandis que les pierres sont en mouvement perpétuel : quand elles bougent, elles donnent beaucoup de lumière. J’aime aussi ce travail à la main où l’on peut remarquer quelques imperfections. Elles confèrent aux bijoux un côté magique.  »

L’histoire des pierres, les mythes et les légendes qui s’y attachent, font partie de cet envoûtement. Marie-Hélène a dévoré tous les livres à ce sujet. Améthyste, calcédoine, iolite, péridot et citrine n’ont plus de secrets pour elle et elle est intarissable sur leur pouvoir.  » En Inde, on voit son astrologue qui vous conseille la pierre bénéfique. Il faut alors la porter tout le temps et elle doit toucher la peau. Rien de tel pour la rendre encore plus belle. « Ce n’est pas un hasard si les femmes se tournent vers certaines pierres. Marie-Hélène fait ce constat plutôt troublant :  » Parfois, je me rends compte que les personnes choisissent instinctivement les pierres pour leurs propriétés, sans même les connaître, plutôt que pour leurs couleurs ou leurs formes.  » Ainsi, ces deux femmes, fraîchement séparées de leurs compagnons et qui ont acquis, chacune, une tourmaline rose qui  » réactive le c£ur lorsque celui-ci s’est renfermé à la suite d’une peine  » ou encore cette troisième qui a vécu une enfance bien malheureuse et qui a succombé à la beauté d’un quartz rose. Or, toutes les légendes rapportent, depuis la nuit des temps, que cette pierre est sécurisante, qu’elle  » compense les carences et les traumatismes affectifs de l’enfance et apprend à gérer ses émotions « .

Marie-Hélène nous enseigne encore que l’améthyste est la pierre de la spiritualité, repousse l’ivresse et protège contre les infections, que le corail protège les enfants et que le péridot, de couleur vert absinthe, est la pierre du coup de foudre et a la vertu de faire éclore des amours inattendus et émouvants. Au fait, quelle est sa pierre préférée ? C’est la spinelle, une pierre de Birmanie, proche du rubis. Une pierre spirituelle et énergisante qui aide à prendre conscience de sa vocation personnelle et permet de nouvelles aspirations.

Barbara Witkowska

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