Ville d’étudiants, ville de bière, ville gourmande et animée… Il suffit pourtant de quelques coups de pédales pour que la vieille cité au coeur chargé d’histoire et de bicyclettes devienne paisible et champêtre. Suivez-nous !

10h

Départ pour une balade originale de près de 30 km autour de Louvain, depuis la gare (1.). Nous avons opté pour l’une des quatre promenades à vélo thématiques organisées par l’Office du tourisme et renseignées sur des cartes disponibles dans ses bureaux ou sur son site Internet. La boucle choisie part du centre-ville pour s’échapper dans les bois et dans la campagne alentour. Pour avoir le temps de combiner ce circuit avec une visite de l’abbaye des Prémontrés du Parc et du musée M, nous raccourcirons néanmoins le parcours, à hauteur de Vaalbeek, pour nous rendre plus directement aux étangs du Zoet Water.

Cet itinéraire en main, nous prenons un peu de temps pour nous situer et nous imprégner de l’animation matinale urbaine, et au fil de la circulation, nous apprivoisons notre moyen de transport du jour… Deux ou trois boulevards à traverser, une ou deux ruelles à remonter, et hop, nous voilà le long d’une voie ferrée qui incite notre regard à glisser au loin, là où l’abbaye résonne de toutes ses cloches. Quelques joggeurs nous montrent déjà le chemin de la tranquillité…

10h30

Rendez-vous avec Thomas Matei, historien de l’art, au parloir de l’abbaye (2.), ancien haut lieu spirituel où la culture et la nature se rejoignent désormais au coeur même du vieux Brabant. L’édifice, endormi depuis des décennies, semble renaître de ses cendres : grâce à l’intervention du gouvernement flamand et de la Ville de Louvain, il est actuellement en pleins travaux de restauration. Resté trop longtemps méconnu du grand public, le site pourrait à l’avenir devenir un attrait touristique racontant l’Histoire et invitant à de tranquilles balades, avec un potentiel de 42 hectares protégés. Sur place, on trouve un potager, un verger, des ruches, un moulin, des étangs, des prés… et une salle d’exposition qui, à terme, sera remplacée par un musée bien plus grand.

Aujourd’hui est un grand jour : au brouhaha des travaux se mêle l’effervescence des préparatifs d’une cérémonie officielle. Le but de cette dernière ? Fêter le retour des magnifiques vitraux du bâtiment datant du milieu du XVIIe siècle. Enlevés en 1828, ils ont été disséminés aux quatre coins de la planète, et en partie revendus à l’université de Yale, aux Etats-Unis, qui, par manque de moyens pour les installer, les maintenait cachés dans ses caves. Grâce à un fonds pour le patrimoine, l’abbaye a tenté de retrouver ses petits… en vue de reconstituer le cycle des quarante-et-un vitraux qui entouraient l’immense cloître. Une seule pièce manque encore à l’appel ; on ignore si elle a été détruite ou si elle se trouve dans une collection d’art quelque part dans le monde.

L’abbaye date de 1129, à l’époque où le sud-est de Louvain était encore un vaste territoire boisé que le Duc de Brabant, qui avait élu domicile dans la localité, employait comme parc de chasse. Une partie de ce territoire (35 000 ha) fut offerte à la communauté religieuse des Prémontrés de Laon afin de créer un centre spirituel proche de la ville et de développer l’activité économique de la région. La balade dans les bâtiments est impressionnante : un dédale de couloirs très bien conservés, des galeries et un cloître splendides. Le domaine a, par chance, gardé un grand nombre d’éléments de la propriété d’origine : le cloître, l’église, mais aussi la ferme, les portails, le logis de l’abbé, les chambres des moines, les plafonds en relief du réfectoire et de la bibliothèque, le moulin, les étangs… Encore quelques pas dans le parc et nous quittons notre guide.

11h30

A vélo, nous continuons à longer le chemin de fer pour nous éloigner de la ville vers le sud (Heverlee). La circulation diminue, les trottoirs s’élargissent, les maisons deviennent plus bourgeoises et notre route passe devant le très beau château d’Arenberg (3.), sur un site splendide et paisible. Y fourmille pourtant une activité intense, puisque là est implanté le campus des sciences exactes de l’université de Louvain, où de nombreux étudiants ingénieurs réalisent des recherches. Un lieu ancien et moderne à la fois, à l’image de Louvain. Le parcours se poursuit et traverse des quartiers plus cossus, qui font penser à certains coins de la périphérie bruxelloise…

Et puis le paysage change en entrant dans la majestueuse forêt de Meerdael où les arbres centenaires impressionnent. Le bois est dense, ordonné, incitant à la balade et à la contemplation. Un moment de silence s’impose pour regarder, écouter, sentir. On reprend son chemin pour s’enfoncer au coeur de la quiétude, les coups de pédale rythmant notre voyage dans cette immensité. Plus loin, une clairière dévoile une étendue de hautes herbes qui fait la part belle au timide soleil de ce jour-là. Dans la forêt, l’Arboretum du Bois d’Heverlee abrite 350 espèces d’arbres et de buissons indigènes et exotiques.

Au sortir du bois (4.), nous délaissons le balisage de l’Office du tourisme en partant à droite, vers Valbeek, sur une artère de village assez importante qui mène plus directement au Zoet Water, soit un ensemble de trois étangs situés de l’autre côté de la forêt. Avant le premier étang, un petit sentier sur la gauche permet de quitter le macadam rapidement. Un détour par les vignes qui produisent le chardonnay Meerdael (5.), un vin mousseux brut et délicieux, quelques tours de roues encore et une pause s’impose à la brasserie St-Jean, située au bord du troisième étang du Zoet Water (6.). Le ravitaillement est accompagné d’un bon verre de chardonnay… histoire de remettre un peu de carburant dans les jambes !

14h30

Difficile de remonter en selle… Heureusement, la route descend lorsqu’on reprend vers le nord pour commencer à fermer la boucle de la promenade. Passage par le village de Korbeek-Dijle – qui, comme son nom l’indique, passe au-dessus de la Dyle -, où quelques tracteurs remuent le foin pour l’aérer de leurs fourches en pattes d’araignée. Puis, on rejoint le chemin de fer avant de se faufiler sur une petite route pavée et sablonneuse qui monte assez fort, à travers une végétation abondante. La transition est immédiate, nous voilà à nouveau en pleine nature. Ce large sentier mène à un beau plateau en contre-bas duquel champs de blé et de colza s’étendent à perte de vue. Au loin, Louvain. Ce changement de perspective est agréable : c’est enivrant de rouler à vélo dans le vent à côté des vanneaux et des premiers coquelicots.

Quelques kilomètres encore à avaler (7.), le temps d’apercevoir des ruches postées au bord d’un champ… Un pont rouge permet d’enjamber le ring, vers la banlieue sud-est… et ses maisons-témoins. Retour au bruit, à la circulation, au mouvement. Petit à petit, le circuit s’achève. On repasse derrière le Château d’Arenberg puis replonge dans un bois qui invite à la promenade (8.). Des écoliers rentrent chez eux en vélo… Ça a l’air bien, la vie quotidienne au rythme de la bicyclette, de la ville et des chemins forestiers.

La sortie du bois révèle l’entrée de la cité (9.), la limite même où la nature flirte avec elle. Une image qui donne à Louvain un petit côté berlinois pas désagréable. Une image aussi qui contraste énormément avec le coeur historique de la ville. C’est vers lui que se poursuit la balade, arpentant les rues qui nous rapprochent de notre point de départ, plus précisément de la Grote Markt, où l’on s’arrête pour visiter le musée M (10.), dont la collection permanente retrace l’histoire de Louvain sous une perspective artistique, après avoir pris un verre au M-Café.

16h30

De l’extérieur, le bâtiment tout blanc et cubique du musée dénote dans la vieille ville, engoncé entre les petites ruelles et les maisons mitoyennes aux charmantes façades. Il a été conçu par le Belge Stéphane Beel, qui a associé les bâtiments existants à deux nouveaux volumes pour assurer la complémentarité de la nouvelle architecture et de l’ancienne. Un dialogue très réussi entre les époques où l’exposition permanente consacrée à la peinture ancienne est magistralement mise en valeur par le décor contemporain. Jusqu’au 25 août prochain, l’institution accueille un accrochage temporaire intrigant, Open M, sur le thème I could have lived here. Il ouvre ses portes aux oeuvres plastiques d’artistes liés à la province du Brabant flamand.

Ce jour-là, nous avons la chance de rencontrer le curateur Emmanuel Lambion :  » Sur 330 dossiers reçus, on a sélectionné 27 artistes « coups de coeur », avec le déplacement dans le temps et l’espace comme fil rouge.  » Une petite visite exclusive des coulisses de l’expo encore en plein chantier présage d’un parcours qui vaudra certainement le détour. Petit passage par le toit-terrasse accessible qui offre un joli panorama sur les environs, et retour à l’endroit où attendent nos montures pour rejoindre la gare à travers les rues animées de Louvain et clore cette agréable journée, moral et mollets regonflés !

PAR STÉPHANIE GROSJEAN / PHOTOS : ANNE-CATHERINE DE NÈVE

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