Ils sont deux et tout part d’eux: la Brésilienne Camila Perez et le Belge Frédéric Marien voient la vie et la mode en tandem. Un choix doublement gagnant.

Leur univers, un bâtiment industriel de style Art nouveau datant de 1915 et situé non loin de la trendy rue Dansaert (Bruxelles), leur ressemble. Harmonie et équilibre, ouverture de l’espace et de l’esprit, élégance faussement épurée, chaleur du geste et de l’ambiance, lumière qui coule sur leurs visages et se répercute au fil des tissus chatoyants et des matières magiques… chaque chose, ici, révèle l’osmose solide et superbe qui unit Frédéric Marien (26 ans) et Camila Perez (25 ans), charismatique couple  » nord-sud  » de créateurs prometteurs. Quand on leur dit que leur mode est à leur image, c’est-à-dire vibrante de beauté et empreinte d’un chic spontané, ils se marrent gentiment.  » Nous fonctionnons à la fois en harmonie et en dualité, confient Camila et Frédéric. Nos goûts, nos idées, nos coups de coeur sont similaires. Et nous vous assurons que ce n’est pas prémédité! Mais nos origines différentes, latine et flamande, pimentent cette entente impeccable et lui évitent de tomber dans la monotonie. Cet état d’esprit se retrouve évidemment dans nos créations, et nous constatons avec plaisir que les gens y sont sensibles. « 

Camila et Frédéric ne se haussent pas du col ( NDLR: à Bruxelles, on dirait qu’ils ne jouent pas les  » dikke nek « ) bien que leur savoir-faire ait beaucoup d’étoffe. Sous le label  » Marien Perez « , ils livrent un prêt-à-porter féminin dont le luxe discret et l’originalité ravissent l’oeil et la silhouette.  » Nous tenons à ce que chaque création ait un petit côté unique, comme s’il se réclamait de la haute couture mais avec des prix nettement plus raisonnables, précisent les deux jeunes designers. Le choix des matières et des couleurs, que nous effectuons toujours ensemble, est primordial. En outre, nous attachons beaucoup d’importance aux détails et aux finitions léchées. Nous ne voulons pas d’un vêtement ostentatoire; nos modèles sont conçus pour mettre en valeur la personnalité de chaque femme, pas pour l’étouffer.  » Chez Marien Perez, la féminité, au lieu d’être asservie, comme c’est souvent le cas, aux canons improbables d’une beauté virtuelle, sublime les représentantes du beau sexe… avec leurs atouts et leurs défauts mêlés. Cette approche peu commune du stylisme repose également sur une vision très construite, très architecturale du vêtement, porte-parole idéal des lignes simples et puissantes, des drapés subtils, des justes proportions, des volumes virevoltants, de la récurrence de l’asymétrie et du biais, des tissus aux tons changeants et des matières naturelles où se profile, parfois, un léger accent technologique.  » Nous admirons le travail structuré du couturier espagnol Cristobal Balenciaga ainsi que la démarche haute en couleur de l’architecte mexicain Luis Barragan « , expliquent Camila et Frédéric.

Ceci explique cela: né à Gand, Frédéric Marien a en effet étudié l’architecture d’intérieur au Centre des arts décoratifs de Bruxelles avant de faire un stage à Londres chez le pape du minimalisme, le designer John Pawson. Quant à Camila, native de Sao-Paulo au Brésil, elle a suivi une formation en histoire de l’art à Boston (Etats-Unis). Cupidon ignorant les frontières, c’est à l’Istituto Marangoni de Milan, où ils décrochent un Masters de stylisme de mode, que nos deux esthètes voyageurs se rencontrent en 1996. Après avoir effectué chacun un stage auprès de noms fameux de la mode (Stephan Janson pour lui et Laura Biagotti pour elle), ces têtes (très) bien faites et bien pleines rempilent à Paris, histoire d’améliorer encore leurs connaissances techniques grâce à un an d’études du patronnage et du moulage qu’ils achèveront en 1998.  » Chaque apprentissage nous enrichit, élargit nos horizons et nous permet d’avoir une vision humaniste de la mode, celle-ci étant d’ailleurs en évolution permanente, à l’instar de notre couple « , note Camila Perez de sa voix chantante. Je dois avouer que la mode m’a toujours attirée, mais si je n’avais pas eu Frédéric avec moi, j’aurais hésité à commencer une telle aventure, seule et si vite. Travailler en duo procure une force, une énergie supplémentaire, surtout dans un métier comme celui-ci. Nous faisons pratiquement tout nous-mêmes, depuis la sélection des tissus dans les salons professionnels à la gestion de la production des vêtements, en passant par le contrôle de la qualité du produit fini ou encore les diverses tâches administratives.  » Sacré boulot en perspective et qui ferait perdre à plus d’un(e) sa sérénité…  » Dans notre travail comme dans notre relation, nous privilégions la communication et la sincérité absolue, argumente Frédéric. C’est pour cela aussi que nous nous comprenons tellement bien. Nous nous disons mutuellement ce que nous pensons, nous acceptons la critique de l’autre parce qu’elle est forcément constructive. En outre, même si nous gardons les pieds sur terre, nous évitons de trop nous poser de questions et nous agissons de manière instinctive. « 

Du flair, Camila et Frédéric en ont, et l’instinct dont ils parlent ne les a pas trompés: en 1999, les tourtereaux décident de s’installer au centre de la capitale belge dont le cosmopolitisme culturel et humain ont illico plu à Camila.  » Ça me rappelle le Brésil « , déclare-t-elle.  » Et Bruxelles, par son aspect central et son ouverture, constitue l’endroit idéal pour démarrer un business comme celui-ci « , ajoute Frédéric. En été 2000, une première collection, composée seulement de 16 pièces, voit donc le jour. Immédiatement, elle séduit le public par sa portabilité et son allure simultanément rétro et très contemporaine.  » Notre démarche créative a quelque chose d’émotionnel, reprennent Camila Perez et Frédéric Marien. Nous ne partons pas d’un thème précis, nous captons plutôt des « instantanés » du quotidien – une musique, une attitude, la forme d’un objet, la densité d’une couleur, une sensation de froid ou de chaleur, etc. – qui rejoignent notre sensibilité personnelle, et nous les réinterprétons dans nos croquis et nos vêtements.  » Articulée autour de la robe et de la jupe, la collection Marien Perez de l’été 2001 joue ouvertement la carte de la sensualité affirmée et raffinée. Les tissus légers (mousseline, organza, satin…), la palette de tons tendres et gourmands (rouge, rose, mauve, lilas, gris perle à reflet rosé), les imprimés délicats et les petits  » plus  » comme les boutons en nacre, la manche kimono ou les bords en paillettes confèrent aux diverses tenues une aura poétique. Dans une leçon de style impeccable, Marien Perez nous apprend à tomber amoureuses d’un vêtement.

Marianne Hublet Carnet d’adresses en page 160.

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