Longtemps coupé du monde, le Mozambique a pansé les stigmates de la guerre pour offrir au plus blasé des voyageurs un paradis balnéaire d’une rare beauté et une culture souriante qui font de ce pays le  » Brésil africain « . Rodés au luxe intimiste, les Sud-Africains ont imaginé ici des lodges enchanteurs, à découvrir sans tarder.

Un parfum d’aventure plane sur ce Mozambique qui s’ouvre au monde. Sait-on que ce pays possède des langues de sable à perte de vue, des fonds marins préservés, des accents brésiliens qui donnent envie de danser, une cuisine savoureuse ? On y va pour ses îles dunes inviolées, peuplées d’oiseaux, de coquillages précieux… et de tranquillité. Mais il serait dommage de ne pas faire une halte dans la capitale, qualifiée de plus belle d’Afrique. Il faut en profiter : on a de moins en moins l’occasion de marcher sur le tarmac à la descente d’avion. Il en est encore ainsi à l’aéroport de Maputo, et l’arrivée au Mozambique se déroule de façon romanesque.

La capitale, autrefois appelée Lourenço-Marques (du nom du premier navigateur qui explora sa baie en 1544), a pansé les blessures de la guerre civile, qui aura duré de 1976 (dans la foulée de l’indépendance, acquise le 25 juin 1975) à 1992. Dans les années 1960, ce port sur l’océan Indien était un haut lieu de plaisirs, de fêtes et d’insouciance. Aujourd’hui, la ville renoue avec ce passé souriant. On aime ses longues avenues bordées d’immeubles coloniaux, son avenida Marginal, quatorze kilomètres en bord de mer, où se succèdent des guinguettes, des terrasses de restaurants, des discothèques en plein air, mais aussi le quartier central aux villas Arts déco de marbre et de teck, ombragées de flamboyants. Le mythique hôtel Polana a rouvert ses portes et offre à l’heure du dîner une atmosphère fitzgeraldienne, au son d’un orchestre ressuscité des années 1950. Dans l’une des rues principales, le Café Continental a conservé son charme européen (ses piliers ornés d’un bât et d’une cloche de vache !), et l’on y déguste un vrai expresso à l’italienne.

Place de l’Indépendance, la cathédrale Notre-Dame-de-la-Conception a des allures baroques. Non loin de là, avenida Samora Machel, on aura une pensée émue pour cette maison Eiffel tout en fer (même la façade), construite en 1892 pour le gouverneur du Portugal, qui ne la trouva pas à son goût et ne l’habita jamais ! Le Mercado Central, quant à lui, ressemble aux vieux marchés provençaux : on y trouve du basilic, de la roquette, de la coriandre, de la menthe et du persil. Et, bien sûr, des crevettes, les meilleures du monde. Les Portugais le savent bien, qui en importent 75 % de la production. Mais ici, on la mange fraîche. Ultrafraîche, pourrait-on dire, tant l’odeur et la couleur des beaux monticules présentés sur les étals du Mercado do Peixe sont une invitation à les manger sur place, immédiatement, dans l’une des petites guinguettes attenantes au marché. Le restaurateur les fera griller sous vos yeux en vous faisant payer seulement la cuisson, autant dire presque rien. Crabes, palourdes et poissons peuvent s’ajouter au menu…

Balades gourmandes

Autre lieu, autres agapes, voici Vilanculos, un gros village côtier à sept cents kilomètres au nord de Maputo, soit une heure et quart d’avion. C’est le point de départ vers les îles vierges qui s’égrènent non loin des côtes. Du ciel, on aperçoit une immense baie couverte de palmes, comme un paradis perdu… Des chèvres gambadent sur une plage bordée de cocotiers, envahie de barques de pêcheurs, plage à la fois sauvage et accueillante qui donne au lieu un air de petit port du bout du monde. Là encore, on se régale d’un déjeuner au bord de l’eau : le plateau de fruits de mer est ce que l’on fait de mieux dans le genre. C’est Mélanie, la patronne du Casa Rex, qui nous conseille cette bonne table située non loin de son hôtel de charme. Mélanie a fui le Zimbabwe il y a deux ans et tient désormais le plus joli lodge de Vilanculos, face à la mer, rafraîchi par les alizés. Un catamaran nous attend pour une demi-heure de mer vers l’archipel de Bazaruto que l’on distingue depuis les terrasses du Casa Rex. Classé parc national, Bazaruto protège les oiseaux, les coraux et les immenses dunes. L’archipel est une halte pour des milliers d’oiseaux migrateurs. Vu d’avion, le paysage est un festival de couleurs : blanc des dunes, bleu du ciel, émeraude des fonds marins et rouge des coraux. L’île de Benguerra apparaît alors, avec ses villas au milieu des arbres, disséminées aux abords de la savane. Un petit coin de paradis, dix kilomètres de plages où marchent quelques femmes vêtues de voiles, des paniers sur la tête remplis de coquillages, qu’elles vont faire cuire au village. Cuisinées au curry, on retrouve les crevettes, au buffet dressé dans les jardins du Benguerra Lodge. Une véranda de bois ouvre sur un vaste salon-bar au mobilier afro-mauresque. Des kilims ornent les planchers, des statues africaines montent la garde et des fauteuils zébrés accueillent les hôtes de ce lieu intimiste au luxe feutré.

Un havre de sérénité

Une douceur de vivre enveloppe l’endroit, à laquelle les deux sympathiques managers, Lu et Rob, tous deux sud-africains, ne sont pas étrangers. Les villas, bien hautes sur leurs pilotis, respirent la tranquillité. Grand lit à moustiquaire, meubles africains, stores de rotin, vue panoramique sur les îles dunes. Une seule envie : prendre un livre et s’enfoncer dans une chaise longue, face à ce décor de rêve. Des musiques s’échappent du village, derrière les bungalows. Les Mozambicains aiment la fête : ce sont bien les  » Brésiliens de l’Afrique « , comme on les qualifie souvent. Vers 17 heures, une flambée illumine la véranda, la nuit tombe avant 18 heures, les hôtes se retrouvent devant un grand feu de bois et un bon punch, sur des fauteuils de toile : on pourrait se croire dans la savane africaine autour d’un feu de camp. Plus tard, les derniers convives s’accouderont au dhow (petit bateau de pêcheurs) posé sur la plage et faisant office de bar. Au-dessus d’eux brille la Croix du Sud.

Le lendemain, une excursion en Land Rover est prévue à l’intérieur de l’île. La piste est bordée d’arbres à noix de cajou, dont l’amande est un poison lorsqu’elle n’est pas grillée. Disséminés çà et là, des petits villages de huttes de trois ou quatre familles semblent endormis sous le soleil. Une école a été construite grâce à un fonds créé par les deux hôtels de l’île, le Benguerra Lodge et le Marlin Lodge. Le 4 x 4 contourne un lac d’eau douce, dominé par une immense dune. Près du lac, s’organisent des pique-niques. On peut tomber sur un crocodile, mais les gardiens veillent !

Il faudra bien s’arracher de ce havre de sérénité que constitue le Benguerra pour rejoindre en bateau le continent, à la pointe d’une petite péninsule où se cache un autre refuge de charme : le Dugong Beach Lodge, véritable temple du bien-être. A notre arrivée, un concours de ramassage de coquillages est organisé. Pour une cueillette fructueuse, une petite île à quarante-cinq minutes de bateau rapide est idéale : c’est Pansy Island, du nom anglais de ce coquillage magnifique qui n’est autre qu’un oursin des sables. Sur sa coquille desséchée se dessine un trèfle à cinq feuilles et deux yeux bridés symétriques. Le coquillage vaut dix dollars (environ 7 euros) à Johannesburg et sur cette île, on marche dessus ! Au retour, un banc de dauphins fait une escorte joyeuse à proximité du bateau.  » Cela n’est pas rare, nous dit le skipper, les dauphins sont nombreux par ici.  » L’ambiance du Dugong est bon enfant, décontractée, on y pratique beaucoup le snorkeling : pas la peine d’aller bien loin pour voir des centaines de poissons tropicaux. L’endroit est très prisé des jeunes mariés. Le large pont de bois qui surplombe la plage fait office de restaurant le soir venu, les tables sont disposées sous les branches d’un grand arbre et sous les effluves du large. Bien sûr, il y aura de la langouste ! Et le matin sera bercé par les notes de musique d’oiseaux totalement inconnus. Retour en avionnette à Maputo. Sur la terrasse de l’hôtel Polana, un orchestre joue Desafinado. On dit de la ville qu’elle était, sous les Portugais, La Havane africaine. C’est sans doute exagéré. Mais qui sait ? Cela pourrait le redevenir…

Carnet de voyage en pages 70.

Franc Nichèle Photos : Emmanuel Valentin

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