Objet porté, objet posé

Anne-Françoise Moyson © KAREL DUERINCKX

Il ne faut jamais s’embarrasser des frontières et l’on n’est nullement obligé de s’enfermer dans une case. C’est précieux de le rappeler et de repérer celles et ceux qui s’aventurent hors des chemins balisés. Natalia Brilli, par exemple, elle qui est venue à l’accessoire par le truchement de la scénographie. S’il lui faut se définir, pour mieux englober ses champs d’explorations faussement épars, elle choisit le terme générique de « designer ». Et lorsqu’elle est face à ses étudiants de l’Institut Français de la Mode à Paris, elle se plaît à leur proposer de considérer avant tout l’accessoire comme un objet. Elle leur conseille de le regarder de tous les côtés. Car sa tridimensionnalité n’est pas anodine. Il faut penser aux multiples facettes d’un bijou, d’un sac, d’une barrette, d’un escarpin. « Tout doit être important, répète-t-elle. Tout doit être réfléchi. Et l’intérieur doit être aussi beau que l’extérieur. » Quand elle crée un accessoire, à sa façon inspirée du ready-made qui la voit gainer de cuir et d’autres matières nobles des bijoux chinés, des montres obsolètes, des sifflets ou des capsules cabossées, des chaînes XXL et des skateboards, elle le pense d’abord comme un objet posé avant d’être un objet porté. De sorte que le va-et-vient entre ces deux états permet une réflexion au long cours. Et transforme sa réalisation en une petite oeuvre transcendante. Ainsi la fonctionnalité est au rendez-vous, la perfection dans les détails et dans l’ensemble l’est aussi. A l’image du chapeau-chaussures d’Elsa Schiaparelli ou du bracelet en fourrure de Meret Oppenheim, les lignes ont bougé. Et si cette création accessoirise parfaitement une silhouette, un état d’âme, elle peut dès lors également trôner sur votre cheminée. Vous aurez alors, sans fétichisme aucun, votre musée intime à portée de main.

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