La province de Limbourg cache le seul Parc national du royaume… Un endroit magnifique que l’on parcourt à pied, à vélo ou à cheval. A découvrir absolument !

Le Limbourg, on le connaît mal. Parce que monsieur Météo y fait allusion dans son bulletin quotidien, on sait que c’est là-bas, du côté de Maastricht et de Genk. Il y a bien un club de foot dont le nom est déjà arrivé jusqu’à nos oreilles. Et puis les modeuses connaissent Maasmechelen Village, oui. Mais savent-elles qu’à quelques centaines de mètres à vol d’oiseau du palais de la dégriffe se déploie sur des milliers d’hectares le seul Parc national belge ? Un lieu où l’on peut se promener des heures et des jours sous les pins parasol et dans la bruyère violette. Etonnant, non ? Ce magnifique domaine a ouvert ses portes en 2006 et compte désormais 80 000 visiteurs par an, venus du nord et de l’est. Ils profitent de l’immensité du territoire, boisé et ombragé la plupart du temps, exposé et sablonneux souvent, paisible et plat, presque toujours.

Ce jour d’été où nous tentons la belle affaire, on annonce un soleil de plomb, 29 degrés (32 en Campine a dit monsieur Météo) et des orages en soirée… Pas forcément le jour idéal pour affiner ses mollets à coups de pédales, mais bon… même pas peur ! Le Parc compte cinq entrées officielles alors qu’une sixième va bientôt être inaugurée. Chaque porte représente à la fois un accès à la nature préservée, et un endroit de multiples activités, notamment avec les enfants : parcours pieds nus, musée des insectes, exposition de dinosaures, histoire du parc, ruches, mini-golf, ferme pédagogique, sentier des lutins, rail bike… L’entrée de Kattevennen (point 30 sur la carte) où nous nous rendons est idéale pour aborder le Parc à cheval, mais nos connaissances équestres nous ont fait préférer le vélo. Rendez-vous avec Johan, notre ranger pour la journée qui va nous emmener dans ce domaine dont il connaît les moindres recoins. Pour cause : il est, avec d’autres, à l’initiative de sa création, depuis plus de quinze ans.

10h00

Présentations, check. Crème solaire, check. Hauteur de selle, check. Gourde, check. Nous enfourchons nos montures pour nous engager dans la forêt dense et rafraîchissante, sur des sentiers balisés charmants et sinueux. Et c’est très bizarre. Nous plongeons tout de go dans une ambiance méridionale : d’immenses pins se mêlent aux feuillus, le sol est un peu sablonneux (la piste, elle, est macadamisée), et par ce beau temps, tout le monde a revêtu sa tenue estivale. Nous croisons encore quelques maisons, longeons un magnifique golf, et Johan nous arrête avant de traverser une route pour nous expliquer que le parc a été créé avec une double ambition :  » préserver cette étendue au biotope unique en Belgique et améliorer l’activité touristique tout en respectant l’économie locale.  » La solution fut de créer autour du noyau préservé une sorte de ceinture verte, une zone tampon large de quelques kilomètres, qui englobe les agglomérations avoisinantes, et qui se veut plus tranquille et désengorgée de voitures.  » La route sur laquelle nous nous trouvons était, jusqu’il y a peu, très fréquentée. On a réussi à obtenir de la fermer pour plus de calme.  » Tout le travail de Johan consiste d’une part à négocier la délocalisation des entreprises situées dans cette zone verte et d’autre part, pour augmenter la surface du territoire, à défragmenter les différentes zones réparties sur les communes qui entourent le coeur du Parc. C’est par exemple le rôle de l’Eco-Recreaduct, qui passe au-dessus de l’autoroute et sur lequel Johan décide de nous arrêter une nouvelle fois :  » On a conçu ce pont comme une voie naturelle qui permet le passage des hommes, mais aussi celui des animaux. Il y a donc, outre une piste cyclable, une large bande par laquelle les sangliers, les lièvres et autres chevreuils peuvent passer pour aller d’une zone à l’autre.  » Très beau et très malin !

11h00

A grandes foulées, nous continuons notre route, rythmée par des passages arides aux herbes jaunies et des zones d’ombre salutaires. Au détour d’un virage, nous tombons sur un berger s’occupant de ses moutons. Une image bucolique, sauvage et charmante. A l’origine, avant de disparaître petit à petit, les bergers étaient ici légion. Depuis quelques mois, le Parc les accueille pour relancer cette activité régionale. Nous redémarrons de plus belle avec notre ranger pressé : nous avons encore tant de choses à voir avant de nous arrêter pour manger. Nous filons dans les bois, pour arriver à la porte de Station as (point 41), inaccessible ce jour-là pour cause de travaux. Nous continuons alors à découvert, en longeant une route plus importante au milieu de laquelle Johan nous fait bifurquer à droite, hors piste, sur une rue qui nous mène plus clairement dans la bruyère torride. Dans cette vaste étendue aux allures de steppe, le regard porte tout à coup beaucoup plus loin. La végétation est plus basse, assez fleurie (en août et septembre, la bruyère y est violette !), mais surtout extrêmement sèche. L’été, les incendies ne sont pas rares et un gros travail de prévention est envisagé depuis quelque temps. Le paradis des lézards et petites vipères… et des chemins de sables idéaux pour des balades à cheval sillonnent le maquis. Mais un jour comme aujourd’hui, on préfère définitivement le vélo sous les arbres !

Nous posons nos bécanes un moment pour nous enfoncer dans la garrigue et nous rendre jusqu’à la pierre inaugurale du Parc national. Un symbole qui ne doit rien au hasard, comme nous le raconte Johan :  » C’est ce qui fait toute la différence de la Campine par rapport au reste de la Flandre : notre sol est constitué de roches et de cailloux, les gravats que la Meuse a amenés depuis les Ardennes au cours des dernières périodes glaciaires, alors qu’ailleurs, on trouve de l’argile. Ce sol a été beaucoup exploité et c’est ce qui explique les nombreux lacs de carrières désaffectées, où la nature a repris ses droits.  » Nous repartons rapidement sur nos pas pour reprendre la piste là où nous l’avions laissée. Nous abandonnons là le beau plateau de bruyère pour descendre vers la porte de Mechelse Heide (point 60).

11h30

Nous quittons une nouvelle fois la piste prévue pour faire un détour en direction du village de Eisde (voisin de Maasmechelen), en traversant la Cité-Jardin et de belles allées bordées de châtaigniers. Johan nous emmène sur le site de ConnecTerra, la sixième porte du parc en passe d’être inaugurée. Elle se situe sur l’ancienne exploitation de charbon, en activité jusque 1988. Tous les environs rappellent le passé minier : le village et ses maisons identiques, l’immense place de l’église et sa statue érigée à la mémoire des mineurs, l’ancien casino…  » Il y avait un petit hôpital, une école, une fabrique de meubles, explique Johan. Depuis deux ans, nous sommes candidats au Patrimoine mondial de l’Unesco. C’est pour cela que l’on développe l’idée de Cités Jardin (Tuinwijk), un concept inventé par un urbaniste britannique en 1898 pour repenser la ville et mieux gérer son développement. Nous sommes ici au seul endroit en Europe où l’on peut trouver côte à côte un environnement rural, avec des bergers par exemple, et une vie industrielle. Nous travaillons à ce que la nature reprenne ses droits, tout en voulant conserver l’économie locale.  »

Nous arrivons aux deux tours de la mine, un bel ascenseur vers le paradis. Montée impressionnante marche à marche, petit effort pour récompense splendide : au-dessus des arbres, on observe la canopée à perte de vue. Dans cette forêt immense, on distingue des lacs de carrière, au loin quelques terrils, et puis à l’est, la vallée de la Meuse (Maas), plus industrielle. C’est magnifique ! Nous reprenons notre chemin en sens inverse pour retraverser Mechelse Heide et continuer notre route vers l’endroit où nous allons manger un roboratif croque-monsieur au restaurant ‘t Salamanderke (au point 60).

14h30

C’est avec les jambes alourdies, le ventre rassasié et la tête un peu sonnée par la canicule que nous abordons la seconde partie de la balade, qui se prolonge par des sentiers balisés plats et ombragés. Quelques fleurs mauves colorent le paysage jusqu’au point 61 sur la carte. Là, nous prenons la piste à droite, vers la porte de Lieteberg (au point 64). A ce moment, la route est rectiligne et exposée, quel cagnard ! Il fait sec, sec, sec. Johan repère un petit coin d’ombre pour nous expliquer que nous arrivons au seul endroit du parcours qui monte : une pente à 10 %. Petite, mais costaude. Haut les coeurs, on avale une rasade d’eau et c’est parti. On a vu pire. Comme peine et comme panorama. Les quelques virages montants qui nous mènent au point culminant du parcours nous offrent un magnifique point de vue sur les lacs. La promenade se poursuit plus calmement dans la forêt pour la dizaine de kilomètres qui nous séparent du Lieteberg.

16h00

Nous dégustons une glace à la porte de Lieteberg (64), et de nombreuses familles font de même, profitant de cette pause agréable, du musée des insectes et des papillons, des ruches situées en hauteur et puis du fameux sentier de 3 km à parcourir pieds nus. Tout est prévu : les casiers pour ranger ses chaussures, le bain de pieds pour l’avant- et l’après-promenade ludique. Un super bon plan à faire avec les enfants !

Nous retournons quelque peu sur nos pas, en direction des points 29 et 30 pour rejoindre petit à petit notre ligne de départ. Nous cheminons à travers quelques villages situés dans la ceinture verte. Il nous reste 6-7 km : sans doute les plus difficiles au vu de la petite trentaine qu’on a déjà au compteur. Mais la beauté de l’itinéraire est fidèle à ce que l’on a expérimenté jusque-là et la chaleur qui décline lentement nous invite à profiter de ces agréables moments de douceur. Nous arrivons à Kattevennen pour prendre congé de notre ranger en se disant qu’il a bien de la chance de profiter au quotidien d’un tel cadre de travail.

PAR STÉPHANIE GROSJEAN – PHOTOS : ANNE-CATHERINE DE NÈVE

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