Retrouvez Frédéric Brébant chaque lundi matin, vers 9 h 45, dans l’émission de Jean-Pierre Hautier, sur La Première (RTBF radio).

O n vous l’a dit et répété : la régression est dans l’air du temps. Preuve en est, une fois de plus, avec ce  » nouveau  » courant informatique qui consiste à exhumer les premiers jeux simplistes des années 1980 pour une génération de trentenaires en mal de nostalgie ludique. De  » Pong  » à  » Breakout  » en passant par les mythiques  » Asteroids « , l’ex-géant Atari ressort en effet ses bons vieux divertissements préhistoriques dans une console rétro à brancher directement sur le téléviseur, tandis que les versions initiales des  » Tetris  » et autres  » Pac-Man  » s’échangent allègrement sur le Net. Pour figer cet état de fait, les spécialistes parlent déjà d’une tendance  » retro-gaming «  qui s’illustre non seulement dans la sphère informatique, mais aussi dans le monde des arts plastiques et de la musique expérimentale. Ainsi, l’esthétique pixellisée des premiers jeux vidéo séduit les graphistes des chaînes de télévision comme MTV ou MCM et sert désormais de langage singulier à quelques artistes alternatifs (comme, par exemple, le mentor de www.space-invaders.com qui tague ses mosaïques d’extraterrestres aux quatre coins du monde). Mieux, cette fascination pour l’archéologie informatique a même débouché sur un nouveau mouvement musical aux mélodies délibérément minimalistes et dirigé, cette fois, vers la faune adolescente. Baptisée  » chip music  » û un jeu de mots anglophone qui mélange les notions de  » chip  » (puce) et de  » cheap  » (bon marché) û, ce courant électronique décortique les sons générés par les tout premiers ordinateurs domestiques (Commodore 64, Amstrad et autres Atari ST) pour les transformer en mélodies primaires et répétitives. Les morceaux recomposés frisent parfois le ridicule, mais attirent néanmoins un public curieux et, surtout, amusé par ces musiquettes venues d’une autre planète. Car les bidouilleurs de la chip music ne se limitent pas à leurs petites expériences à domicile. Boostés par un matériel délicieusement obsolète, ils montent des sites Internet ( www.micromusic.net), réalisent des compilations de tonalités Gameboy ( www.relaxbeat.com) et s’aventurent même dans des représentations en public de cet art musical estampillé naïf. Certes, le phénomène est encore underground, mais les renifleurs de tendances y voient déjà les prémices d’une véritable révolution musicale. Ainsi, Malcolm Mac Laren, ancien manager des Sex Pistols et perpétuel dénicheur de talents, prédit notamment que la chip music sera le courant phare du XXIe siècle ( www.transfert.net/a9432). Pour une double raison : les adeptes de ces sons bruts font non seulement un grand pied de nez aux géants de l’informatique qui incitent à la consommation effrénée de produits toujours plus performants, mais ils résistent aussi, par leurs bips-bips ludiques, à la mondialisation ambiante de l’industrie du disque. Le tout avec une passion jubilatoire qui glorifie la simplicité et l’amusement dans un esprit franchement rebelle. Une nouvelle punk attitude, en quelque sorte…

Frédéric Brébant

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