Pour agrandir et moderniser cette maison construite dans les années 1970, l’architecte anversois Werner Van Dermeersch a imaginé une boîte bleue qui  » flotte  » au milieu d’une verdure superbement maîtrisée. Ingénieux et très contemporain.

Carnet d’adresses en page 73.

Grandes artères tracées au cordeau, demeures pimpantes ou fermettes de charme, jardins tirés à quatre épingles… Cette banlieue chic anversoise se caractérise par son style  » kaléidoscope « . L’une de ces maisons, construite dans les années 1970, nous ouvre ses portes. A l’arrière, un volume lisse et contemporain : une boîte bleue généreusement vitrée. On a l’impression de glisser sur l’eau, on a envie de se fondre au c£ur de la nature environnante. L’ambiance trompe-l’£il  » dehors-dedans  » est admirablement réussie. Dans ce nouvel espace enchanteur et serein, on regarde la télé, on écoute de la musique ou on médite face au jardin, les pieds quasiment dans l’eau.

Les maîtres des lieux se sont sentis, un jour, à l’étroit dans leur salon. Ils ont donc décidé de créer une extension, une pièce qui accueillerait les accros de la télé et de la musique tandis que le salon serait rendu à ses vraies fonctions : repos devant la cheminée ou conversations entre amis.  » Lorsqu’il s’agit de construire une extension, les propriétaires veulent souvent adopter le même style que celui de la maison, analyse l’architecte Werner Van Dermeersch. Ici, nous avons eu carte blanche. Avec Carla Van Mileghem, architecte d’intérieur qui me seconde souvent, nous avons fait un choix diamétralement opposé. D’où ce volume actuel et très épuré qui tranche avec l’aspect fermette de la maison.  »

L’architecte constate que les toutes petites fenêtres de la façade arrière rendent la vue sur le jardin partielle et réductrice. Or, pour cet amoureux de la nature, le contact avec la végétation est essentiel. Werner Van Dermeersch propose donc un concept global et très cohérent pour l’agrandissement de la maison et pour le remaniement de la façade arrière. L’extension s’inscrit dans un volume rectangulaire, situé un peu plus haut que le salon. Elle se prolonge, à l’extérieur, par un plan d’eau divisé en deux parties. Dans le bassin le plus proche s’épanouissent des poissons rouges, plus loin, c’est le royaume des iris.  » En plaçant le volume légèrement en hauteur, on tire l’intérieur vers l’extérieur et on crée l’impression de flottement sur l’eau, explique l’architecte. J’ai voulu animer les murs latéraux d’un bleu vif ( NDLR : le bleu  » Yves Klein « , du nom du peintre français û 1928-1962 û célèbre pour ses monochromes). C’est une couleur apaisante qui donne de la profondeur et s’harmonise très bien avec la verdure. La grande baie vitrée est prise dans un châssis en aluminium naturel anodisé mat. On dirait, ainsi, un tableau, entouré d’un cadre gris argent.  » A l’intérieur, les murs blancs sont vierges de tout ornement. Un canapé et un fauteuil constituent tout le mobilier. Livres, cassettes, CD et DVD sont invisibles, soigneusement rangés dans des placards parfaitement lisses, dessinés par l’architecte.

Motivés par cet aménagement très contemporain, les propriétaires en ont profité pour revoir et moderniser la déco du salon et de la salle à manger. Le premier, dépouillé et allégé, fait cohabiter un ensemble esthétique composé d’un long canapé Flexform de couleur anthracite, de deux fauteuils signés Le Corbusier et de deux tables basses sur roulettes. Pas de bibelots, pas d’objets inutiles. Quand ce n’est pas le spectacle des flammes dans la cheminée, un seul tableau, signé Anne Chapelle, crée diversion et attire le regard. La même sobriété règne dans la salle à manger où une ancienne table de ferme s’entoure de chaises signées Arne Jacobsen.

Werner Van Dermeersch a aussi revu et corrigé la façade côté jardin. L’étage n’a subi aucune intervention. En revanche, la façade du rez-de-chaussée a cédé la place à une solution plus moderne : de larges baies vitrées ont remplacé les toutes petites fenêtres d’origine, offrant ainsi un accès direct au jardin. Les murs ont été peints en deux couleurs : anthracite et gris métallisé, un duo raffiné qui crée un joli jeu de volumes.

Dehors, belles perspectives, géométrie recherchée et échiquier de verdure créent un jardin propice au rêve. Werner Van Dermeersch a conçu une atmosphère sophistiquée où la structure le dispute à l’exubérance. On y retrouve l’harmonie des couleurs, fondée sur le blanc et le bleu mauve. Le plan général est construit sur l’idée du carré et du rectangle. Des parcelles thématiques, composées d’hortensias, de buis, de rhododendrons, de lavande ou d’iris, sont rythmées par des cloisons composées de hêtres, à la silhouette disciplinée. Dans le fond, la rigueur fait place à plus de fantaisie. Placés à l’extrémité de la perspective, des tilleuls et des noisetiers étendent leurs branches protectrices au-dessus des herbes sauvages et des parterres d’iris blanc. Un vrai décor de théâtre. Un sentier promenade fait le tour de la propriété.  » Avant, les propriétaires n’utilisaient jamais le jardin, conclut l’architecte. Aujourd’hui, ils s’y promènent avant de rentrer à la maison.  » On pénètre ici sur la pointe des pieds, car tout en étant simple et accessible, le jardin a quelque chose du parcours initiatique. C’est, par excellence, le jardin de l’imaginaire.

Barbara Witkowska

Une extension adopte généralement le style de la maison. Mais, ici, les architectes ont eu carte blanche et ont fait un choix diamétralement opposé. D’où ce volume actuel et très épuré qui tranche avec l’aspect fermette de l’habitation.

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