Il se rêvait en cow-boy, il est devenu agriculteur et pourvoyeur d’images. À 35 ans, Édouard Genestar, fils de l’ex-directeur de Paris Match, préside avec sa sour à la destinée de Polka, la galerie photo parisienne dont tout le monde parle.

Dans la famille Genes-tar, qui demander ? Prenons Édouard, 35 ans. Beau gosse, blazer et pantalon flanelle, cofondateur de Polka, la galerie photo qui fait parler d’elle à Paris (*). Cet ancien étudiant d’une école de commerce a un nom qui ne passe pas inaperçu… En 2006, son père, Alain Genestar, fut démis avec fracas de ses fonctions de directeur de la rédaction de Paris Match peu de temps après avoir publié des photos compromettantes de Cécilia Sarkozy, la future ex-femme du président. Une éviction dont le grand manitou de la presse eut du mal à se remettre.  » La blessure fut celle d’un homme qui se retrouve licencié abusivement alors qu’il n’a fait que son travail « , confie pudiquement Édouard.

Qui dit Polka, dit Genestar. Au sens large. Car on y trouve réunis le fils aîné donc (Édouard), le père (Alain), conseiller et éditeur de Polka magazine, un trimestriel sur l’image, la s£ur cadette (Adélie) cocréatrice de la galerie, la maman (Brigitte), gestionnaire officielle, ou encore le petit dernier (Victor), collaborateur épisodique. L’arbre généalogique est un pilier dans l’aventure et dans cette équipe transgénérationnelle,  » on fait peu de réunions mais on se parle beaucoup et surtout, chacun a un rôle bien défini « , résume Édouard.

Les mauvaises langues prétendent que c’est grâce au carnet d’adresses du père que Polka a pu monter en trois courtes années d’existence des expositions de premier plan. Parmi les habitués des cimaises, on compte des ténors de l’objectif comme Bruno Barbey, François Huguier, Sebastião Salgado, Reza ou encore Marc Riboud et des étoiles montantes aussi prisées que l’Américain Ethan Levitas, remarqué aux Rencontres d’Arles, ou le Russe Alexander Gronsky. Du beau monde. On y recense aussi des exclusivités jalousées. Combien de personnes sur la place parisienne auraient pu convaincre William Klein, 80 ans passés, légende du 24 X 36 et ami de la famille, de créer des £uvres spécifiquement pour la jeune galerie ?  » De nombreux photographes d’envergure sont déjà liés par contrat ou représentés par d’autres galeries. Nous n’avons pas accès à leurs £uvres antérieures mais pour ce qui est des nouvelles, nous pouvons nous entendre « , répond avec malice Édouard qui rappelle que la maison partage à 50 % les produits des ventes avec ses photographes. Le cofinancement de reportages en partenariat avec des investisseurs est aussi à l’étude. Pas facile de survivre dans la jungle du marché de la photo d’art…

Après s’être fait un nom en tant que galerie itinérante dans de nombreux lieux VIP, dont l’hôtel Byblos à Saint-Tropez, l’enseigne a posé il y a deux ans ses tirages dans une jolie courpavée du IIIe arrondissement de Paris, à l’ombre d’un vieux chêne courbé qui aurait côtoyé Marie-Antoinette.  » Nous avons aménagé un lieu pour asseoir la marque et recevoir tranquillement les collectionneurs mais cela ne nous empêche pas de monter une quinzaine d’expos migratrices hors nos murs « , souligne l’entrepreneur trentenaire.

Tombé très jeune dans le bain argentique, Édouard se souvient des murs de sa chambre d’enfant, tapissés de photos de presse récupérées sur les tables de la rédaction de L’Écho républicain que dirigeait son père. Et puis l’odeur des encres de l’imprimerie. Elle monte à la tête. On se rêve en cow-boy, comme tous les petits garçons mais à la différence des camarades de préau, on ne lâche pas l’affaire. À 18 ans, Édouard part manier le lasso et travailler son anglais dans un ranch américain puis joue les prolongations en arpentant la pampa argentine durant son service militaire. Le frisson de la grande terre ne l’a jamais quitté. Avec son grand-père, ancien herbager, il a repris il y a peu l’exploitation familiale dans le Calvados. Comptage du bétail, moissons des céréales et bottes en caoutchouc, on ne l’imaginait pas ainsi. Un garçon imprévisible finalement.

(*) Jusqu’au 19 mai prochain, Polka expose une série de ses photographes sur le thème du cinéma au Sofitel, à Bruxelles. On-set/Off-set, www.sofitel.be

ANTOINE MORENO

On fait peu de réunions mais on se parle beaucoup et surtout, chacun a un rôle bien défini.

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