Le parfum de la rose, la légèreté de la brise et l’allure sportive mais raffinée soufflent sur les collections new-yorkaises. Les jambes prennent l’air et l’on gambadera tout l’été… perchées sur des talons plate-forme.

A l’heure où les Américains prennent la mesure – avec effroi – du réchauffement climatique, les stylistes d’outre- Atlantique imaginent un printemps 2007 romantique et souriant, parfois même féerique, comme pour exorciser la canicule et les cyclones. Pour la belle saison, ils créent des collections vives à faire pâlir de jalousie l’astre solaire, fraîches comme un bouton de rose, courtes et vaporeuses comme une brise vespérale sur le pont d’un paquebot de croisière. Cette ode au bonheur est déclinée sur les podiums en trois tendances : le retour à la nature, l’esprit électrique et vitaminé des années 1980 et le style sportif élégant, d’inspiration French Riviera.

En règle générale, les couturiers ont gardé le volume et les superpositions de l’automne dernier, mais en une version plus déshabillée. Ils épluchent délicatement la silhouette comme un beau fruit, révélant l’anatomie féminine, camouflée cet hiver sous des pulls amples, des robes sacs et des jupes boules. Les formes reviennent sous l’effet de manches ballons et de jupes en trapèze, ondulantes, dansantes, glissant sensuellement sur les cuisses. Les superpositions de tissus délicats jouent la transparence.

Plusieurs stylistes ont, eux, été bercés par un vent venu des années 1980. Le pantalon  » slim  » moulant, les épaules affirmées et les jupes et robes mini s’affirment. Le bouquet de couleurs est varié mais privilégie l’uni, en hommage à Mère Nature. Les teintes sont franches et gourmandes : jaune canari, rose fuchsia, orange vif ou violet pétant.

Eve par DVF

New York a donc reverdi avant l’heure, sous les tentes de Bryant Park où se tiennent les défilés bisannuels. Diane Von Furstenberg, donne un coup de jeune à sa griffe avec un défilé intitulé  » All about Eve « . La plus Américaine des créatrices belges rend hommage à la femme fleur, qui, comme le papillon,  » se défait de son strict habit d’hiver pour prendre son envol « . DVF décline son indémodable  » Wrap Dress « , sa robe portefeuille, sur une gamme de coloris vifs, fuchsia, orange, jaune canari, vert acidulé. Les imprimés sont cette année inspirés du jardin d’Eden : des fleurs, des pommes, des serpents, et une ravissante Madame Coccinelle. Les robes chemises raccourcissent, les jupes jouent les trapèzes. Pour le final, le pailleté, le lamé et l’imprimé léopard insufflent lumière, beauté et sensualité à cette évocation d’un paradis terrestre.

Marc Jacobs : un rêve bucolique

Sur l’air du Canon de Johann Pachelbel, dans un décor de prairie vallonnée sous la superbe voûte de la salle des Armureries de New York, les mannequins de Marc Jacobs sortent également d’un rêve bucolique.  » Nous voulions créer une collection légère, gracieuse, évoquant un peu un autre monde « , explique le designer le plus couru de New York. Marc Jacobs poursuit son travail sur l’épaisseur entamé l’hiver dernier et joue, cette fois, avec beaucoup de subtilités sur les superpositions et les détails. Il mêle dentelle, lin, satin et soie. Les accessoires sont présents de la tête aux pieds, avec d’irrésistibles petites toques, des serre-tête sarclés de bijoux, de sandales hautes lamées. Ses sarouels et jodhpurs, ses drapés aussi, évoquent une expédition dans le désert, les caravanes et les palais de Lawrence d’Arabie. La palette est entièrement naturelle : du blanc, du crème, du noir pour le contraste, des nuances de gris, du métallique pour l’exception.

Vera Wang : une nature dansante

Dans une palette de couleurs beaucoup plus sombres, blush, marine, acier et noir, la créatrice Vera Wang s’inspire à sa manière de Mère Nature. De larges fleurs apparaissent sur des tissus transparents, des n£uds de tulles, des plis d’organza, de la mousseline vaporeuse. Les volumes éclosent délicatement en froufrous ou en drapés, à partir de bustes serrés et de chauffe-c£ur qui servent de cocons aux robes d’organza et aux robes tuniques en mousseline. Vera Wang réinvente sa geisha en lui donnant pour le printemps un air de ballerine éthérée.

Zac Posen : le parfum du glamour

Le jeune designer chouchou de la jet-set américaine, Zac Posen (25 ans), est depuis plusieurs saisons un incontournable des défilés. Il signe cette fois encore une collection sexy, faites de manches ballons et de jupes bulbes virevoltantes. Il pose des bouquets de pivoines à mi-cuisses sur les ourlets des jupes ou sur une robe mini rose fuchsia, dont on se demande si elle ne dégage pas un parfum tant l’effet est réussi. Il termine avec des robes de soirée, qui, de l’avis même de la critique américaine, sont un peu  » too much « .

Calvin Klein : le futur, version 1980

L’esprit des années 1980 et son pendant le sportswear soufflent à nouveau sur les podiums. Cette touche  » sportive  » est flagrante dans la collection de Fransisco Costa pour Calvin Klein, avec des robes débardeurs, des blousons courts et larges, des matières high-tech. Les étoffes d’organza transparentes, drapées ou superposées, donnent de la féminité à ces silhouettes athlétiques. Le cuir perforé et les manteaux en alligator blanc boostent, eux, l’esprit presque futuriste de la collection.

Proenza Shouler : surfez urbain

Le jeune duo Proenza Shouler réinvente la mode des eighties. Jack McCollough et Lazaro Hernandez, qui ont grandi dans les années 1980, désirent  » élever le style sport « , déclarent-ils au sujet de leur collection printemps-été 2007. Ils adaptent à la rue la garde-robe du surfeur professionnel, avec des coupe-vent à porter sous des vestes de chanvre, des robes stretch à bandages quasi fluo et des tee-shirts échancrés et colorés.

DKNY : New York, toujours plus

L’humeur sportive se dégage de bout en bout avec allure dans la collection DKNY. Défilant sur un rythme techno, les mannequins arborent casquettes et tee-shirts de base-ball, sur des jupes évasées ou plissées. Des blousons de soie courts alternent avec des vestes portées de façon décontractée ou des anoraks chics. La palette des couleurs vibre de bleu électrique, marine, violet, jaune citron et fuchsia. Des robes ondulantes à bretelles, versions courtes ou extra-longues, clôturent le défilé en un rayonnant feu d’artifices.

Ralph Lauren : sur la route des colonies

Le summum américain du chic et de l’élégance, on le trouve cette saison encore chez le maître Ralph Lauren. Le designer nous emmène dans les années 1930, au temps des colonies. Dans ses malles de voyage, il glisse des robes tubes noires ultrasimples mais raffinées, des costumes et des gilets à rayures, en soie ou en lin, coupés comme pour un homme. La silhouette se fait par ailleurs orientale avec de longs cardigans aux imprimés traditionnels et des turbans. Pour le grand soir, des tenues lamées très glamour ferment avec brio ce détour subtil au pays des Mille et Une Nuits.

Donna Karan : l’amazone urbaine

Dans sa collection, la styliste new-yorkaise Donna Karan propose des tenues destinées à une amazone urbaine, tout juste revenue – elle aussi – d’un voyage au Moyen-Orient. Elle débute avec des robes de soie, en portefeuille, drapées ou en écharpes croisées en larges décolletés sur le buste. Elle poursuit avec des jodhpurs stretchs, des caftans légers et finit sur de longues robes floues au tombé aérien. Les tons sont dune, kaki moiré, puis ivoire et colombe. Les tenues sont confortables mais il faudra s’habituer aux accessoires de l’été. En robe, jupe ou short court, il faudra gambader en équilibre sur des talons plate-forme, avec de grands sacs gibecières sur l’épaule. Mais rien n’est impossible aux belles de Big Apple.

Les jeunes pousses de la mode américaine

Rodarte : des cascades de fleurs

La vingtaine, Kate et Laura Mulleavy donnent à la mode made in USA ce qu’elle n’avait pas encore : un esprit haute couture. Rodarte, le duo formé par ces deux s£urs de Pasadena, en Californie, a les faveurs d’Ana Wintour, l’influente rédactrice en chef du  » Vogue  » américain. Après seulement trois saisons, celles qui sont fraîchement diplômées d’art et de littérature de l’université de Berkeley et qui ont déjà reçu plusieurs récompenses, dont le prix CFDA/Vogue, se sont imposées par leur passion pour le détail et leur obsession pour la construction de vêtements qui ont parfois l’air de costumes. Des cols noués, des fleurs faites à la main et l’application de plumes personnalisent leur travail. Leur dernière collection s’inspire d’un manoir, d’un portrait du peintre du xviiie siècle Thomas Gainsborough et d’une rose. Les créations des deux s£urs, qui vivent toujours sous le toit de leurs parents à Pasadena, ne sont pas conçues pour tout le monde : le prix moyen d’une robe signée Rodarte est 17 000 dollars (quelque 13 100 euros) dans les grands magasins de luxe de Manhattan.

Cloak : un voyage intergalactique

Comme sortis de la série télévision  » Star Trek « , les mannequins masculins du label Cloak portent fuseaux moulants et veste ou sweaters aux épaules larges. Les matières sont parfois glacées et les tons tranchés : rouge, noir, métallique, blanc. Le résultat est unique, à la fois moderne et rétro. Le designer Alexandre Plokhov, un Russe établi aux Etats-Unis, se cache derrière Cloak, une marque lancée en 2002. Spécialisé dans la coupe de costumes pour homme, il a collaboré avec Marc Jacobs et Chado by Ralph Rucci. En 2004, il s’est hissé à la deuxième place du Prix CFDA/Vogue.

Bryan Reyes : une ode à la féminité

Simplicité, modernité, élégance et sensualité caractérisent le style de la garde-robe de Bryan Reyes. A 24 ans, ce jeune autodidacte d’origine colombienne formé chez Ralph Lauren, Michael Kors et Oscar de la Renta, a séduit la critique américaine par son toupet et sa classe. Son amour de la femme est encore bien visible dans sa troisième collection : des robes bustiers courtes, dont une composée de lamelles, des chemisiers de soie transparents et une série de broderies ou d’imprimés sur des tissus rafia et toile de jute.

Elodie Perrodil

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