Retrouvez Frédéric Brébant dans l’émission de Jean-Pierre Hautier chaque lundi matin, de 9 à 10 heures, sur la Première (RTBF radio).

Ils ont osé. Les matadors du luxe, les seigneurs de l’élégance, les apôtres du soi-disant bon goût ont osé réhabiliter l’imagerie punk dans les grandes tendances vestimentaires qui tisseront la mode de l’été prochain. Avé, Johnny Rotten! Toi et tes Sex Pistols avez désormais la cote sur les podiums feutrés des musts branchés. De Jean-Paul Gaultier à Christian Dior en passant par Chanel et, bien sûr, la reine Rei Kawakubo, les créateurs du XXIe siècle secouent la bourgeoise chic à coups de perfectos agressifs, de minijupes écossaises, de lacérations habiles et d’épingles à nourrice judicieusement garnies de strass raffinées. Le maquillage se veut évidemment outrancier, les canettes de bière épousent les lèvres des punkettes assassines et les clins d’oeil à la célébrissime pochette  » Nevermind the Bollocks  » se trémoussent sur le ventre des filles de Monsieur Galliano. Etonnant? Pas vraiment. A l’heure d’une croissance retrouvée et d’un enthousiasme coloré qui déborde des vitrines, il était attendu qu’un vent de provocation contrôlée ne vienne à nouveau souffler sur la douce euphorie ambiante. Faire parler de soi, d’abord. Pour faire mieux vendre, ensuite. A vrai dire, la grande machine cyclique n’a jamais cessé de tourner : les premiers punks ont émergé à la charnière des années 70 et 80 pour mieux cracher sur l’argent facile de jeunes yuppies cravatés; leurs frères virtuels baptisés hackers se servent aujourd’hui du dieu Internet pour bousiller le fric électronique des start-up arrogantes par la grâce de pétitions informatiques et d’actes de piratage délirants. On viole le site du FBI, on entarte Bill Gates, on applaudit South Park et on célèbre le punk qui est en nous, même sur le velours épais des défilés les plus huppés. Sans rire, Jean-Charles de Castelbajac s’apprête à confier une partie de sa collection haute couture à Malcom McLaren (l’ancien manager des Sex Pistols) et Sonia Rykiel ressort en version glamour les fameux badges en plastique que tout le monde a déjà enterrés. Le punk est de retour, certes, mais personne n’est dupe. Sauf si ma mère débarque demain, au GB du coin, en blouson noir sali et en bas résilles troués, une lame de rasoir à la main…

Frédéric Brébant

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