Des restaurants d’avant-garde côtoient des marques britanniques plus que centenaires. Alors que les anciens briguent la nouvelle branchitude, les modernes recherchent la présence de telles institutions pour conforter leur succès. Chronique d’une artère autrefois mythique qui est en passe de le redevenir.

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W1, un des quartiers les plus huppés du centre de Londres. A l’ouest, l’élégant Mayfair, à l’est, le Soho trendy. Et au milieu coule Regent Street… Entre Oxford Circus, au nord, et Piccadilly, au sud. Particularité toute anglo-saxonne : ici, le sol appartient au  » Crown Estate « , le domaine de la couronne d’Angleterre. C’est elle qui, en 1811, en la personne du prince régent, futur George IV, commande à l’architecte John Nash de tracer une avenue reliant sa résidence de Carlton House à Regent’s Park. C’est ainsi que Regent Street voit le jour, recouvrant de ses méandres le cours d’une rivière. En 1825, un grand nombre de commerces s’installent sur cette artère qui devient rapidement une des plus en vogue de la capitale anglaise. Aujourd’hui, le  » Crown Estate  » vient d’investir 500 millions de livres sterling (730 millions d’euros) pour revitaliser cette mythique artère commerçante. Car, outre son intérêt architectural, Regent Street continue à être le passage obligé des shopping-addicts. A deux pas de Bond Street, dans une rue qui, au moment de Noël brille de mille feux, Weekend Le Vif/L’Express a sélectionné ses adresses les plus insolites, entre tradition et modernité.

Les anciens

Ils sont là depuis plus des décennies. En ligne de mire, l’imposant magasin Liberty dont la sublime façade, réalisée à partir du bois de navires militaires du xixe siècle, trône majestueusement sur Malborough Street, à l’angle de Regent street. Ses contemporains se nomment Aquascutum et Burberry, des enseignes vieilles comme le trench-coat. Plus loin, le flagshipstore de Wedgwood rappelle que la porcelaine fait la gloire du royaume depuis plus de deux siècles. A l’extrémité nord de la rue, sur Portland Place, le Langham, le premier grand hôtel de Londres dont les balcons donnent sur Regent Street depuis 1865, accueille le visiteur dans la plus pure tradition britannique, avec des grooms habillés en tenue d’époque. Tous ces clichés de la vieille Angleterre continuent à ravir le touriste à la recherche d’ambiance british. A coups de modernisation, ces institutions ne se contentent pas de vivre aujourd’hui sur leurs acquis, mais misent sur la réconciliation de l’ancien et du moderne. Ainsi, le grand magasin Liberty a développé un corner vintage, devenu un des plus fashion de la ville. Aquascutum a entièrement revu sa boutique en offrant aux clients un salon VIP et Burberry ne cesse de soigner son image de marque. Wedgwood, de son côté, s’associe avec les créateurs anglais du moment pour proposer une nouvelle ère de porcelaine. Bref, on joue à fond la carte vintage.

1. Liberty (210-220, Regent Street)

On doit ce grand magasin tout à fait magique tant par ses façades extérieures à colombages que par son ambiance intérieure des plus cosy à sir Arthur Liberty qui fit construire le précieux édifice en 1875. Aujourd’hui, Liberty vient de créer un espace vintage où l’on déniche notamment des robes victoriennes mais, aussi, concept tout à fait inédit, un rayon dédié aux cadeaux d’époque : vieux miroirs, porte-plumes, horloges… et accueille par ailleurs les marques de prêt-à-porter les plus pointues : Marc Jacobs, Missoni, Jil Sander, Sophia Kokosalaki ou encore Ann Valérie Hash. Au quatrième étage, l’espace décoration a été complètement réaménagé. Liberty, qui est une étape incontournable dans le shopping touristique à Londres, est aussi redevenu un passage obligé chez les branchés. Et vient de lancer sa propre marque, Liberty of London : une ligne de sacs à main, papeterie, linge de maison, ligne de bain, écharpes et chapeaux dans des imprimés  » maison « , réalisés sous la direction artistique de Tamara Salman.

2. Aquascutum (100, Regent Street)

John Emary est le fondateur de cette marque qui voit le jour en 1851. Inventeur du trench-coat, il baptise sa compagnie Aquascutum qui réunit les deux mots latins,  » aqua  » et  » scutum  » signifiant respectivement  » eau  » et  » protection « . A l’époque, le prince de Galles, futur Edouard VII, est un des premiers clients. Mais, avec les années, Aquascutum avait un peu pris la pluie… Depuis deux saisons, la griffe s’est complètement relancée en faisant appel à deux nouveaux stylistes, Graeme Fidler et Michael Herz, qui ont créé l’événement à la semaine de la mode de Londres en présentant, en mars dernier, leur première collection automne-hiver 2005-2006. Le trench est toujours là, mais revu et corrigé : décliné en mauve ou en rouge, avec une cape amovible, il s’orne également de jolis imprimés graphiques. A côté des classiques de la marque, Aquascutum, connu au départ pour ses vêtements pour l’homme, développe désormais une garde-robe moderne et féminine offrant cet hiver, jupons et robes en tulle.

3. Burberry (157-167, Regent Street)

Fondée par Thomas Burberry en 1856, Burberry est une des premières grandes marques britanniques à s’être  » rebranchisée  » en faisant appel, d’abord à Roberto Menichetti en 1999 puis à Christopher Bailey en 2001, comme directeurs artistiques. Ce dernier vient d’être d’ailleurs élu meilleur créateur de l’année aux British Fashion Awards. En octobre dernier, à la semaine de la mode de Milan, où Burberry Prorsum présentait sa collection printemps-été 2006, le défilé de l’Anglais a été un des plus remarqués de la semaine : à la fois romantique et raffiné, il faisait appel aux codes de la vieille Angleterre, piochant tour à tour dans le Swinging London ou dans le Londres des faubourgs d’Oliver Twist. En choisissant ces dernières années les tops Kate Moss et Gemma Ward comme égéries, Burberry s’est offert une nouvelle jeunesse. Toutefois, on préférera à la boutique de Regent Street, celle de Bond Street, plus moderne.

4. Wedgwood (158, Regent Street)

Depuis le xviiie siècle, Wedgwood est la porcelaine qui fait la gloire des Anglais. A côté des collections anciennes, le nouveau flagshipstore de Regent Street présente des objets dessinés par les créateurs britanniques Jasper Conran et Zandra Rhodes. Un bel exemple de mode vintage appliqué à la décoration.

5. Veeraswamy (99, Regent Street)

C’est le restaurant indien le plus ancien de Londres. Veeraswamy fête cette année ses 75 ans. Le lieu a rouvert en novembre dernier, rénové dans le style des années 1920, retrouvant ainsi son décor d’origine.

6. Langham Hotel (1c, Portland Place)

En 1865, le Langham Hotel est le premier  » Grand hôtel de Londres « . Cet édifice, qui a conservé son charme britannique des débuts, associe avec élégance des petites touches de modernité par le biais d’un spa, d’une piscine, mais aussi d’un restaurant et d’un bar. En février 2005, l’extension  » The New Infinity suite « , baptisée  » le nouveau Langham « , ouvrait ses portes, intégrant dans ses chambres des éléments avant-gardistes tels que la colothérapie. Quelques dates clés dans l’histoire du Langham Hotel : en 1880, il reçoit les visites de Napoleon III, d’Oscar Wilde et de l’explorateur Richard Burton. En 1890, sir Arthur Conan Doyle en fait le lieu de l’intrigue de certains de ses Sherlock Holmes. Au début du xxe siècle, il s’impose comme le rendez-vous d’auteurs célèbres comme Arnold Benett, Mark Twain ou Frank Harris. Dans les années 1920-1930, le Langham devient la résidence d’artistes comme Noel Coward, Grace Fields et Anna Neagle. En 1945, la BBC y déplace même ses bureaux et quelques-uns de ses studios d’enregistrement. Bref, de quoi largement peupler son sommeil…

Les modernes

De nouvelles enseignes élisent domicile sur Regent Street, de Petit Bateau à Lacoste en passant par les chaînes Mango et Zara. On note aussi la présence de la créatrice britannique Karen Millen. Certains modernes chassent même les anciens : Habitat annonce sa venue pour 2006, Dickins & Jones parle de fermeture. Quant au magasin Laura Ashley, il laissera bientôt sa place à Mamas and Papas, une enseigne dédiée aux nouveau-nés. Depuis peu, Regent Street abrite aussi le plus grand Apple Store d’Europe. Mais la modernité se manifeste surtout à travers les restaurants, concentrés dans le quartier fooding de Regent Street, dans une minuscule rue adjacente, Heddon Street. Autre particularité : de Heddon Street à Conduit Street en passant par Waterloo Place, les Français ont investi les cuisines trendy de Mayfair. Les frères Pourcel du sud de la France, en collaboration avec Olivier Château, ont ouvert W’Sens, rendez-vous hype et gastronomique de la place de Waterloo. Dans Conduit Street, Sketch, que l’on doit au Français Mourad Mazouz, fait appel au chef non moins frenchy Pierre Gagnaire. Dans Heddon Street, la brasserie Gabrielle’s propose également une assiette 100 % française tandis que Momo ravit les people en vogue avec ses accents franco-marocains. Quant au restaurant Cocoon, sa décoration complètement inédite est signée par le Français Stéphane Dupoux.

7. Le Living Room (6-9, Heddon Street)

C’est le dernier-né des restaurants et bars branchés du quartier. Le Living Room a ouvert ses portes fin novembre sur le site d’un ancien bureau de poste qui, pour l’anecdote, figurait sur la couverture de l’album de David Bowie  » Ziggy Stardust and the Spiders from Mars « . La décoration de ce lieu, dominé par un grand comptoir, est signée Shidey Shaygan.

8. Le Ice bar (29-33, Heddon Street)

Londres a désormais son adresse ice. Après Milan, c’est au tour de la capitale britannique d’accueillir ce concept de bar des plus givrés. Pour résumer : – 5 ° C, une capacité de 60 visiteurs à la fois. Ici, vu le froid glacial, on mise sur le turn over de la clientèle. Des bottes et une parka fourrés sont fournis à l’entrée, la vodka est servie dans des verres en glace. Le ice bar va-t-il détrôner le légendaire pub ?

9. W’Sens (12, Waterloo Place)

C’est la nouvelle adresse des frères Pourcel (propriétaires de l’hôtel-restaurant Les Jardins des Sens à Montpellier). Il y a un an, les deux jumeaux ouvraient ce restaurant en collaboration avec Olivier Château. Décoré par Imaad Rahmouni, disciple de Philippe Starck, l’adresse est très hype et joue sur un imposant bar au rez-de-chaussée où les tables sont habillées de croco. A l’étage, des petits coins aménagés en alcôves sont réservés aux dîners en tête à tête. Ce qui n’empêche pas des magazines de mode d’y organiser leurs soirées tant l’adresse oscille entre bar de nuit et restaurant. On y accueille régulièrement des acteurs français de passage comme, dernièrement, Gérard Depardieu. L’assiette, raffinée, est très french cuisine… du sud.

10. Cocoon (65, Regent Street)

Depuis décembre 2004, date de sa création, l’adresse est devenue incontournable. Décoré par Stéphane Dupoux, ce lieu intimiste est basé sur l’idée de cocon. La décoration se nourrit du cycle du papillon : un mélange de soie, de bois et de fleurs associés à des matériaux contemporains, crée une atmosphère dont le but recherché est l’apaisement. On note aussi avec intérêt le coin  » butterfly cocoon « , le bar central ainsi que l’espace lounge.

11. Sketch (9, Conduit Street)

Le restaurant de Mourad Mazouz, qui a fait la joie des célébrités au moment de son ouverture il y a deux ans, vient de lancer un nouvel espace lunch baptisé  » The Glade at Sketch « . L’assiette est signée par le chef français Pierre Gagnaire.

12. Momo (25-27, Heddon Street)

Belle décoration d’inspiration marocaine pour ce restaurant qui est devenue l’adresse chouchou des branchés. On comprend aisément pourquoi.

13. Apple Store (235, Regent Street)

La dernière grande nouveauté de Regent Street. On vient du monde entier pour y dénicher le dernier iPod à la mode. Au premier étage, le  » Genius Bar  » permet de demander tout type de conseil pour son Mac. L’ultime adresse high-tech derrière une splendide façade du xixe siècle… Preuve qu’ici, la querelle des anciens et des modernes, c’est de l’histoire ancienne. Isn’t it ?

Agnès Trémoulet

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