Face à la brusque disparition de sa mère, Delphine de Vigan reconstitue l’histoire de sa famille. Un roman vibrant, sensible, nourri de tendresse et faisant resurgir les souvenirs les plus lumineux comme les secrets les plus enfouis.

Quelle lumière fait émerger l’écriture ?

Ce livre se veut un voyage vers ma mère. Grâce à l’écriture, j’ai pu la découvrir dans ses aspects les plus lumineux. La plume est un corps-à-corps avec les choses qui nous préoccupent, nous émeuvent ou nous perturbent.

De quoi ne peut-on pas se protéger ?

De ses parents. Quel que soit leur âge, les enfants restent vulnérables vis-à-vis d’eux. Devenir adulte revient à se connaître, se protéger. J’assume désormais ma fragilité et mon émotivité. Ce livre m’aide à apprivoiser le suicide de ma mère, mais ce n’est pas une thérapie.

Quel est le sens du mot famille ?

J’aime l’idée que ce livre soit un hommage à la famille, qui est à la fois unique et ordinaire. Il est important d’en avoir une, celle qui nous précède ou celle qu’on construit avec ses enfants. Ce ne sont pas tant les liens du sang qui priment, que les histoires qu’on vit et celles dont on est issu. En dépit des tragédies, ma famille possède une aptitude à la joie.

Une odeur d’enfance ?

L’odeur crayeuse et humide de la maison de Pierremont, un fief familial où j’ai passé des étés entiers. Malheureusement, cette ruine était impossible à restaurer.

Vos rêves d’enfant ?

Je faisais plutôt des cauchemars… Petite, j’envisageais d’avoir un salon de coiffure. Ce n’est que plus tard que j’ai voulu faire quelque chose autour de l’écriture, mais je ne le formulais pas ainsi.

De quoi êtes-vous fière ?

D’être allée au bout de ce livre, avec tout ce que ça m’a coûté de déballer mon passé, mes failles et mes boîtes intérieures. Cela peut constituer une mise en danger, mais j’ai pu le faire parce que je vis une période d’épanouissement. Je suis fière de laisser une trace à mes enfants.

Et honteuse ?

De rien, même si je regrette de ne pas avoir mesuré la solitude de ma mère. Sa vie est un gâchis. Tout lui était possible, mais elle a basculé dans la folie.

Que vous a-t-elle transmis ?

Je ne lui ressemble pas physiquement, mais nous avons la même voix, l’humour et la fantaisie.

Devenir mère c’est…

Un désir fort qui s’est imposé très jeune. Bien qu’étant terrorisée à l’idée de reproduire l’identique, j’avais un fantasme de réparation. La maternité m’a apaisée et permis d’être plus indulgente envers ma mère.

Qu’est-ce qui vous fait tenir debout ?

L’amour. Celui de mes parents était peut-être imparfait, maladroit et destructeur, mais il constitue une base. Ce livre est une déclaration d’amour à ma mère.

Si vous étiez une couleur ?

Le rouge de la passion, du sang de la naissance, de l’amour et des moments importants de la vie. On me surnomme  » la survivante « , mais il y a des histoires familiales bien plus violentes que la mienne. Je me lève chaque matin en me sentant chanceuse et terriblement vivante !

Rien ne s’oppose à la nuit, par Delphine de Vigan, JC Lattès, 440 pages.

KERENN ELKAÏM

CE LIVRE EST UNE DÉCLARATION D’AMOUR À MA MÈRE.

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