Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Aujourd’hui, en France, près de 5 % des femmes vivent en solo, plus de 1,7 million d’entre elles élèvent toutes seules leurs enfants. Les filles restent célibataires de plus en plus longtemps. Une fois mariées, vers 37 ans et dans 85 % des cas, ces épouses demandent le divorce pour goûter à une solitude choisie, vécue de plus en plus sereinement.

Selon un rapport d’Action contre la Faim (2007), presque partout dans le monde, ce sont les femmes qui travaillent les champs, s’occupent du bétail et du potager, ramassent le bois de chauffage, puisent l’eau, préparent et cuisinent les repas, prennent soin des enfants, gèrent l’argent du foyer  » assumant une grande partie de la production alimentaire des ménages « .

D’après le Programme alimentaire mondial des Nations unies, elles représentent quelque 80 % de la main-d’£uvre directe sans être – la plupart du temps – rémunérées. Survient la crise alimentaire et leur vie devient un enfer.

Je me souviens d’une jeune fille à Dacca, capitale du Bangladesh. Tous les matins, comme la plupart des mères, elle posait son petit à la crèche sur le chemin de l’usine. Au milieu de la boue et de la misère du bidonville, ce lieu d’une propreté exemplaire offrait un îlot de calme surprenant. Petite collation à midi, jeux éducatifs, gymnastique et une sieste sur des nattes en attendant le retour des mamans.

Je me souviens des sandalettes déposées sur le pas de la porte, de la gentillesse des puéricultrices, des câlins et des jouets.

Je me souviens aussi des petits matins à Dacca lorsque les grandes avenues se remplissaient de milliers de femmes drapées dans leurs voiles en allant au travail. Les ouvrières textiles rythmaient la ville de gigantesques ondulations colorées.

Ce jour-là, j’avais attendu la jeune manutentionnaire toute la journée. Nous étions rentrées chez elle : quelques planches assemblées maladroitement, des ustensiles de cuisine, le sol balayé autour de la construction fragile. Elle vivait seule. Je m’inquiétais de la savoir sans compagnon dans cet environnement hostile.  » Je suis plus heureuse comme cela « , m’avait-elle répondu.  » Je ne veux plus de mari. C’est trop difficile.  » Sa réaction m’avait déconcertée. C’était, il y a dix ans, exactement.

(*) Chaque semaine, la journaliste écrivain Isabelle Spaak (Prix Rossel 2004) pour son roman d’inspiration autobiographique ça ne se fait pas, Editions des Equateurs) nous gratifie de ses coups de c£ur et coups de griffe.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content