En se baladant dans cette vallée ardennaise, on découvre un vrai paradis de la nature. Le spectacle est féerique. Ici, de foisonnantes floraisons s’offrent en de superbes tableaux rythmés par la ronde des saisons.

Carnet d’adresses en page 72.

 » C e que j’aime dans cet endroit, c’est l’hiver, lorsque la rivière voisine déborde, quitte son lit et vient couvrir d’un grand miroir une partie des prés inondables.  » Pour le paysagiste Philippe Renac, ce projet, qui l’occupe depuis plusieurs années déjà, est sans aucun doute le plus cher à son c£ur. En évoquant ce petit paradis niché au creux des forêts d’Ardenne, le grand professionnel cède rapidement aux émotions, avouant qu’y passer quelques heures est pour lui le plus doux des ressourcements.

Dans ces moments privilégiés, il a parfois l’occasion d’apercevoir le manège de quelques chevreuils venus paître dans la prairie. La propriété étant entourée de forêts où l’on chasse, la clairière qui la compose constitue donc un refuge pour les animaux sauvages, dont les redoutables sangliers. C’est pour contenir leur fougue qu’une clôture artisanale, réalisée en rondins équarris, délimite le territoire de chacun. Aux bêtes la prairie, aux hommes les champs de fleurs. C’est cette image idyllique qui s’offre au regard depuis la terrasse de la maison.

Le propriétaire et le paysagiste n’ont pas ménagé leurs efforts.  » A l’exception d’une cabane sur l’île (confectionnée en chêne par un artisan anglais) et de quelques pontons en bois, les interventions ont essentiellement été botaniques, explique Philippe Renac. Nous avons beaucoup travaillé sur la végétation des berges, par exemple.  » Mais la nature n’est pas toujours bienveillante.  » Un temps, nous avons été infestés par des rats musqués, poursuit Philippe Renac. Ils adorent toutes ces plantes et leurs racines. Les Iris mis à part, ils ont saccagé dans un même élan les Sagittaria, Pontederia, Zizania et autres Caltha que nous avions plantés. On voyait, impuissants, leurs résidus flotter à la surface de l’eau.  »

Fort heureusement, d’autres plantations effectuées dans ce secteur n’ont pas souffert de ce vandalisme. Et pour cause, puisqu’il s’agit d’arbres déjà bien développés.  » Nous les avons sélectionnés notamment pour leurs couleurs d’automne, note Philippe Renac. Il y a le chêne des marais, le Liquidambar, le Parrotia ou encore des érables, comme Acer buergerianum, Acer davidii, Acer rubrum. Certaines espèces ont aussi été choisies pour l’intérêt qu’elles offrent également au printemps, ce qui est le cas d’arbustes comme l’amélanchier ou le cornouiller américain.  » A noter aussi : le même type d’essences printanières a été planté en masse de l’autre côté de la maison, en lisière de la forêt existante, formant ainsi une continuité colorée avec la végétation locale.

Les plus grands aménagements ont toutefois été effectués en relation immédiate avec l’habitation. Afin de pouvoir profiter au maximum de la vue sur la nature environnante, un jeu de terrasses en pierre bleue, comprenant un salon d’extérieur et son indispensable barbecue, a été imaginé. Pour mieux assurer la symbiose entre le minéral et le végétal, des plans d’eaux, reliés entre eux par de petites cascades, ont été créés. Leurs berges sont aujourd’hui colonisées par des plantes aquatiques, comme Equisetum, Typha, Pontederia…

A l’origine, la clôture en bois était davantage rapprochée de la maison. C’est tout récemment qu’elle a été éloignée, pour permettre de créer un champ de vivaces fleuri. Devant la prairie existante, celle du fond de la parcelle, Philippe Renac a décidé d’implanter une végétation plus démonstrative. C’est ainsi que l’on peut voir pousser, parmi tant d’autres, de grandes gerbes de Miscanthus sinensis, d’Eupatorium purpureum, de Monarda  » Beauty of Cobham « , de Rudbeckia  » Herbstsonne  » ou de Echinacea purpurea.

Restait la nouvelle bande de terrain conquise sur la prairie naturelle. C’est là que Philippe Renac a réalisé un coup de maître. Dans l’attente de plantations à plus long terme, il a semé une large bande de terrain avec un mélange d’annuelles et de vivaces, en privilégiant dès la première saison le chrysanthème des moissons (Chrysanthemum segetum).  » Avant que la floraison ne démarre réellement, mon client était sceptique face à cette grande masse de feuillages verdâtres, confie Philippe Renac. Tout cela est oublié depuis l’ouverture des premiers boutons floraux.  »

A la fin de l’été, le chrysanthème des moissons offre un immense bouquet jaune pâle. Au fil des heures, de la rosée au crépuscule, il joue gracieusement avec la course du soleil déployant ainsi un charme fou. Ce tableau monochrome évoluera dans un futur proche. Epaulé par des phytosociologues, le paysagiste compte faire pousser une prairie fleurie où abonderont des espèces indigènes, de manière à favoriser la transition entre jardin cultivé et milieu naturel.  » Nous avons d’autres projets, comme l’implantation de bulbeuses, précise Philippe Renac. Il y aura des fritillaires, des anémones, des narcisses, des scillas. Pour les coins les plus ombragés, nous avons pensé aux fougères. Il en existe une variété innombrable, toutes adaptées à nos climats.  »

Tous ces projets visent à rencontrer un des souhaits du propriétaire : voir fleurir son jardin toute l’année. Quoi qu’il en soit, un des plus beaux moments restera sans nul doute l’automne, égrenant, entre brumes et lumières, les mille feux de ses feuillages.

Texte et photos : Jean-Pierre Gabriel

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