La villa Sandi est la fierté de la famille Polegato qui règne sur l’empire Geox tout en développant l’affaire vinicole ancestrale. Cap sur Montebelluna, en Vénétie, pour découvrir, en exclusivité, un superbe patrimoine aujourd’hui admirablement restauré.

Meraviglioso. Baignée d’une lumière séraphique, la villa Sandi, bâtie au début du XVIIe siècle, est organisée autour du vaste salon de réception central qui s’élève jusqu’au sommet de la construction. La famille Polegato a restauré l’ensemble en jouant la carte de la sobriété raffinée. Pour seule décoration murale, on trouve deux miroirs au cadre doré superbement ouvragé. Ils se font face, renvoyant les images à l’infini. Quelques fauteuils et canapés sont disposés le long des murs, formant de petits ensembles propices à l’art de la conversation. Au rez-de-chaussée, quatre pièces seulement se partagent l’espace périphérique : trois salons et une grande salle à manger. Un escalier discret conduit au balcon circulaire qui domine majestueusement le salon central. Sur le pourtour, plusieurs portes donnent accès aux couloirs qui conduisent aux chambres.

 » Notre vignoble et nos caves se trouvaient juste à côté de la villa Sandi, expliquent Giancarlo et Mario Moretti Polegato. Nous avons toujours vécu à côté de ce magnifique patrimoine, jusqu’au jour où notre père a pu l’acquérir, voici trente ans. Nous y avons alors installé, dans les sous-sols une partie de nos réserves de vins mousseux, le prosecco typique de notre région.  » Pour les deux frères Polegato, cette villa typiquement palladienne est devenue l’emblème du succès de l’affaire vinicole lancée par leur grand-père : la production atteint aujourd’hui, toutes étiquettes confondues, 18 millions de bouteilles de vin, dont une grande quantité de mousseux.

Du vigneron au chausseur

Giancarlo et Mario Moretti Polegato sont tout deux adeptes du système D. Le premier a mis au point une bouteille thermique a double fond permettant de conserver le vin au frais. Le second a créé la chaussure  » respirante  » et imperméable Geox. Le postulat est très simple : si on transpire des pieds, pourquoi ne pas faire des trous dans les semelles de ses souliers ? Après avoir présenté les produits de la famille dans une foire aux vins aux Etats-Unis, Mario Moretti souhaitait se balader dans les Rocheuses. La chaleur locale le faisant décidément trop transpirer, il décide de percer les semelles de ses chaussures de sport. Et cela marche ! Ses pieds restent au sec. L’idée fait son chemin lorsque Mario Moretti découvre le matériau ad hoc : une sorte de cellophane percé de pores microscopiques qui évacue la transpiration tout en restant imperméable. Comme souvent, les idées géniales ne persuadent personne, à commencer par les producteurs de chaussures qui sont légion en Vénétie. Pour mener à bien son projet, Mario Moretti engage 5 personnes… L’entreprise Geox compte aujourd’hui 5 000 travailleurs et est devenue, en huit ans, le premier producteur du secteur de la chaussure en Italie. Son objectif avoué : passer de la huitième place mondiale à la première…

Ce n’est pas un hasard si Giancarlo et Mario Polegato ont choisi de vivre dans les dépendances situées dans les jardins de la villa Sandi, réservant celle-ci aux fêtes et réceptions. Qui pourrait, en effet, de nos jours, s’accommoder d’espaces aussi monumentaux que ceux que recèle une villa palladienne ? Construite en 1622 par l’architecte Andrea Pagnossin, la belle demeure Sandi s’inscrit parfaitement dans le paysage viticole et agraire de la Vénétie. C’est ici que l’aristocratie vénitienne, enrichie par le commerce maritime, aimait autrefois se réfugier : pour fuir la chaleur et l’humidité de Venise et aussi pour contrôler les récoltes. Volontiers extravertis, les marchands vénitiens faisaient bâtir des résidences imposantes, offrant une vue sur la nature et… de coût abordable. Andrea di Pietro della Gondola, dit Palladio, était leur architecte de prédilection car ses constructions répondaient admirablement à cette triple exigence. Né à Padoue en 1508 et mort à Vicence en 1580, l’homme puise son inspiration dans les monuments anciens de Vérone et de Rome pour proposer un jeu impressionnant de volumes extérieurs (notamment par les colonnades de façade), des matériaux économiques (on utilise peu de pierres et de marbres) et une harmonie des espaces intérieurs.

Les constructions palladiennes se caractérisent aussi par cet immense hall central qui s’élève jusqu’au toit. Au sous-sol, on trouve quantité de caves pour le vin et les communs de la cuisine. Le bâtiment est surélevé, ce qui justifie une entrée solennelle, valorisée par un escalier théâtral. Voyez celui de la villa Sandi : sa conception en pente douce et ses marches habillées de galets permettent de rejoindre la porte d’entrée, même juché sur un cheval.

La rénovation et l’entretien de ce prestigieux domaine et de ses dépendances représentent une charge importante que la famille Polegato assure au quotidien. Comme la villa, les jardins font eux aussi l’objet de soins méticuleux. Ils sont caractérisés par un espace géométrique ordonné et maniéré, qui contraste avec la foisonnante campagne avoisinante. Parmi les statues qui l’ornent, on remarque notamment plusieurs £uvres d’époque du Vénitien Orazio Marinali.

Texte et photos :

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