Elle est l’une des étoiles montantes de la mode belge. Valeria Siniouchkina a été recrutée comme styliste free-lance par KookaÏ et s’apprête à voir sa toute première collection vendue chez Henri Bendel, à New York. Big Apple, la ville où, dit-elle,  » elle respirerait mieux « .

Carnet d’adresses en page 153.

E lle travaille sous les combles comme une Cendrillon des temps modernes. La sonnette a rendu l’âme, l’escalier n’est pas loin d’en faire autant. Celui qui en vient à bout poussera la porte de l’atelier de Valeria Siniouchkina et découvrira un mannequin qui a déjà bien vécu, une simple table en bois, une étagère fourre-tout, un désordre qu’elle jure tout provisoire. On chercherait en vain dans cette silhouette fluette, coupe de cheveux bien sage et regard candide, la lolita provocante à qui elle a donné vie dans sa collection Omsk, la dernière de sa vie d’étudiante à La Cambre, la première de sa carrière de styliste professionnelle. Cette collection lui a permis de remporter, en avril 2002, le prix Henri Bendel au Festival international des Arts de la mode d’Hyères (France). Concrètement, cela signifie pour elle une diffusion chez Henri Bendel, célèbre enseigne new-yorkaise, et le financement partiel d’un show-room pour l’implantation duquel elle hésite toujours entre Paris et New York.  » C’est le grand saut dans le vide « , dit-elle comme pour ramasser ses émotions.

Omsk, revue et corrigée pour plaire aux jeunes New-Yorkaises, c’est une mini-collection de neuf modèles jouant l’asymétrie et la sophistication. Les lolitas provinciales, en passe de devenir femmes ou amantes, qui ont nourri les premiers croquis de Valeria Siniouchkina, vont y perdre une partie de leur  » rock n’roll attitude « , mais le succès est à ce prix. Chemise rayée en coton très fin, robe en jersey turquoise parsemée de fleurs brodées à la main, tee-shirt de même inspiration, pantalon incrusté de morceaux de laine sur les côtés, blouson de motard et robe corsage couleur nuit. Les pièces commencent à arriver des usines et Valeria s’impatiente : le 15 avril prochain, elle est attendue à New York pour la mise en orbite commerciale de sa collection. Résumé de la situation :  » Génial !  »

Curieux petit bout de femme. Interrogée sur ce qu’elle aime, elle répond en vrac, dans les volutes d’une Tigra King Size,  » la nuit, les bars… mon copain « . Le bar L’Archiduc, rue Antoine Dansaert, à Bruxelles, est son adresse fétiche. Elle y a travaillé pour financer ses études. C’est là aussi qu’en octobre 2002, en marge du dernier Parcours de Stylistes de Modo Bruxellæ, elle a organisé son propre show  » avec des copines qui portaient mes fringues et tous les gens que j’aime « . Née à Zurich, Valeria Siniouchkina a transité par le Canada et la Russie avant de s’établir en Belgique voilà dix ans. C’est à son père, représentant de la compagnie aérienne russe Aeroflot, qu’elle doit cette enfance nomade. Ce père à qui elle voue une admiration sans limites parce qu’il a toujours  » assouvi ses ambitions  » et pour qui elle avait humblement entrepris une licence en droit à l’Université libre de Bruxelles. Expérience vite enterrée.  » Maintenant qu’il voit que je suis capable d’arriver à quelque chose dans ce métier, il est super fier de moi !  »

Approchée par la griffe française Kookaï, Valeria Siniouchkina a reçu pour mission de créer une série de pièces en jersey pour la collection printemps-été 2004. Combien ? Elle ne le sait pas encore.  » L’expérience va démarrer fin mars. Le challenge consistera pour moi à équilibrer le côté inventif et le côté commercial. Ce n’est pas simple car j’ai vite l’impression de dessiner un vêtement ennuyeux.  » Adieu les gants de motard en cuir blanc, les zigzags rouges et les froufrous délurés : la lolita a grandi.

Chantal Samson

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