Barbara Witkowska Journaliste

Parfum le plus célèbre au monde, N°5 de Chanel se réinvente en Eau Première. Zoom sur une fabuleuse success story en quatre dates.

2007 – Eau Première. A l’aube du IIIe millénaire, Jacques Polge a voulu rajeunir le mythe.  » Le N° 5, c’est la grammaire du style Chanel, note-t-il. Chaque année qui passe lui apporte du mystère. Cela dit, il faut le replacer dans le contexte de l’avant-garde de l’époque, de façon à susciter l’intérêt de toutes les jeunes femmes qui aimeraient le porter.  » Durant le xxe siècle, la parfumerie a énormément évolué. Le parfumeur dispose de molécules nouvelles qui lui ont permis de réécrire la partition de la fragrance, en la rendant plus fraîche et plus transparente. L’accord floral a été réinterprété, les aldéhydes ont été redosés. Différente mais pareille à elle-même, l’Eau Première (*) fleure, bien sûr, le N° 5, mais de façon plus subtile et plus moderne. Son mystère reste intact et les vers de René Char qui définissent si bien le N° 5 sont plus que jamais d’actualité :  » Un poète doit laisser les traces de son passage, pas des preuves. Seules les traces font rêver « .

1921 – Extrait N° 5. Après avoir transformé la mode féminine, Coco Chanel voulait révolutionner le monde des parfums. Elle demanda donc à Ernest Beaux, le plus grand compositeur des parfums de l’époque, de lui créer une  » bonne odeur  » unique, ne ressemblant à aucune autre. Le bouquet de jasmin, de rose et d’ylang-ylang fut admirable, mais n’a pas vraiment donné satisfaction au parfumeur. Il a donc arrosé le tout avec des aldéhydes, un peu comme on met du citron sur les fraises. Bingo ! Ce sont justement ces molécules de synthèse qui brouillent les cartes, participent à la magie et à l’abstraction de la fragrance.

1924 – Eau de Toilette N° 5. L’extrait (concentration la plus forte et la plus courante à l’époque) s’impose tout de suite comme chef de file des grands parfums. Pour se différencier de la concurrence, Coco Chanel a demandé à Ernest Beaux d’imaginer une Eau de Toilette, plus légère. Tout en allégeant la recette, le parfumeur a un peu forcé sur le bois de santal, pour la rendre différente et ne pas cannibaliser l’extrait.

1986 – Eau de Parfum N° 5. Jacques Polge £uvre chez Chanel depuis 1979. Les temps et les gestes de parfumage ont changé. De surcroît, l’extrait est devenu très cher. Pour ajouter un nouveau produit dans l’air du temps, le compositeur crée une Eau de Parfum, en gardant une conformité olfactive avec l’extrait. Surdosée en vanille, l’Eau de Parfum reste pourtant très proche de l’original. Et aujourd’hui, avec l’Eau Première, s’écrit un nouveau chapitre de cette belle histoire…

(*) Disponible dès la mi-octobre.

Barbara Witkowska

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