L’artiste

Wesley Meuris est né à Lier (Anvers) en 1977. Il a étudié la sculpture au Sint-Lukas Instituut à Bruxelles avant d’entamer un troisième cycle à l’Institut supérieur des beaux-arts d’Anvers. L’architecture est son objet d’étude principal, bien qu’il ne soit lui-même aucunement bâtisseur.  » Je préfère voir l’architecture que d’en faire « , dit-il. C’est en effet le regard qu’il porte sur l’art de bâtir et ses conventions qui se trouve au c£ur de ses dessins, maquettes et interventions à échelle réelle dans l’espace. Les édifices dédiés au divertissement, comme les zoos ou les musées, excitent particulièrement sa réflexion sur le rôle du 1er art dans  » notre société du spectacle « . Ses installations – critiques sans être agressives – interrogent les codes en vogue dans un contexte d’exposition ; animaux dans un zoo, £uvres d’art dans un musée, donc. À la source de ses investigations conceptuelles, on trouve les théories de rationalisation et de standardisation de l’architecture énoncées dans les années 30 par l’architecte allemand Ernst Neufert. En 2009, son installation The World’s Most Important Artists, pastiche de salle d’archives rassemblant dans ses tiroirs (condamnés…) une liste subjective des meilleurs plasticiens de tous les temps, résumait avec panache et mordant ses questionnements sur une éventuelle dérive taxinomique dont l’architecture se ferait le miroir et le relais.

L’expo

Le centre culturel Scharpoord, à Knokke, montre jusqu’au 16 janvier prochain une large sélection d’£uvres d’art africain acquises depuis le début des années 60 par le collectionneur Joseph Schelfhout, un homme d’affaires belge ayant longtemps vécu au Congo. L’£uvre de Wesley Meuris tient ici dans son intervention sur la scénographie de l’événement. Installation en soi, le décorum grouille de références aux éléments architectoniques standards des musées contemporains. Certains d’entre eux, comme le tourniquet ou le  » meeting point « , n’ont ici pas d’utilité, seule leur présence, pour le coup incongrue, subsiste. Et attire d’autant plus notre attention sur la place que ces éléments occupent dans la structure codée des lieux d’exposition. Partant, l’artiste nous interpelle sur la  » disneyfication  » sourde et feutrée du  » parc  » muséal. Plus loin, en plaçant sous verre les pièces chéries du collectionneur, il souligne l’effet Mona Lisa, la mise en vitrine immuable des dits chefs-d’£uvre. Questions : qu’est-ce qui sous-tend cette hiérarchisation systématique de l’art ? L’architecture conditionne-t-elle l’écriture de l’histoire de l’art ? La présentation des £uvres leur donne-t-elle plus ou moins de valeur ? Une interrogation sur notre tendance à la classification et notre désir inquiet de faire main basse sur la fugacité et la part imperceptible de la création. Autour de l’espace d’exposition proprement dit, Wesley Meuris a reconstitué à échelle réelle une réserve et des locaux d’étude d’£uvres d’art. Un simulacre d’environnement muséal typique qui surligne par l’absurde – ces locaux n’ayant aucune fonction réelle – notre horreur de l’oubli et de l’incontrôlable.

Collection Congo. Collection privée dans un musée imaginaire de Wesley Meuris. Cultuurcentrum Scharpoord, 32, Meerlaan, à 8300 Knokke. Tél. : 050 630 430. Jusqu’au 16 janvier prochain. Chaque mois, Le Vif Weekend vous propose le décryptage d’une exposition. Parce que l’art contemporain est souvent taxé d’hermétisme, nous vous donnons les clés de lecture pour passer les portes des galeries et apprécier le meilleur de l’art vivant.

Baudouin Galler

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content