Le design du III Reich nazi exposé aux Pays-Bas, polémique à la clé (en images)

Expo sur le design du IIIe Reich au Design Museum Den Bosch © Kenzo Tribouillard, AFP

Un buffet de Hitler, des couverts gravés de croix gammées, l’emblématique coccinelle de Volkswagen: ces objets de « design nazi » sont actuellement exposés dans un musée aux Pays-Bas, au grand dam de certains, qui voient là un risque de « glorification » du nazisme.

L’exposition, intitulée « Design du IIIe Reich », est clivante. Son succès est grand : tous les billets disponibles depuis l’ouverture début septembre ont été vendus, soit déjà 10.000 au total. Mais elle est également sujette à des critiques virulentes. Des militants de gauche et antifascistes, qui ont manifesté devant le musée à Bois-le-Duc (sud), estiment que l’exposition ressemble à un sanctuaire du régime.

Jamais autant d’artefacts nazis n’avaient été disposés côte à côte, selon les observateurs. Quelque 277 articles, allant d’une Volkswagen Beetle des années 1940 aux statues du sculpteur préféré d’Hitler, Arno Breker, en passant par des affiches de propagande, des films de la réalisatrice nazie Leni Riefenstahl, des timbres-poste et une mitrailleuse MG42.

L’exposition a une visée didactique, explique le musée, qui a pris une mesure exceptionnelle pour éviter que son message soit « mal interprété » : il est interdit de prendre des photos, et donc des selfies, chose devenue rare dans un lieu à caractère touristique.

« Chaque objet est placé dans un contexte historique qui met en lumière l’horrible dessein du régime nazi. Si les objets sont sortis de leur contexte, cela pourrait être mal interprété », explique Maan Leo, porte-parole du musée. Ce dernier ne laisse entrer que 50 visiteurs à la fois, sous les yeux d’une sécurité renforcée. Quant à la vente des billets, elle se fait exclusivement en ligne.

Design nazi

Si, par malheur, un visiteur n’en faisait qu’à sa tête et décidait de faire un selfie aux côtés d’un poster de Hitler pour alimenter son compte Instagram, il risque d’être banni du musée. « Mais les néo-nazis ne portent généralement pas une grosse croix gammée sur le front. Il faut être vraiment malade » pour défendre les valeurs du nazisme, lâche-t-elle auprès de l’AFP.

Les organisateurs de l’exposition — à voir jusqu’au 19 janvier 2020 — souhaitent qu’elle suscite une réflexion sur les différentes manières dont le IIIe Reich a réussi à gagner les coeurs et les esprits en Allemagne. « Cette exposition montre comment le design nazi a imprégné chaque recoin de la société entre 1933 et 1945 », raconte Maan Leo. « Il est « important de savoir comment ce processus de séduction a fonctionné et quel rôle le design a joué » dans l’apogée du nazisme, estime-t-elle.

Le musée a mis deux ans pour mettre l’exposition sur pied, une période durant laquelle il a beaucoup échangé avec la communauté juive de Bois-le-Duc et avec des organisations représentant la population juive aux Pays-Bas. Le musée a également consulté le Centre d’information et de documentation d’Israël (CIDI), qui surveille l’antisémitisme dans le pays.

« C’est évidemment un sujet très délicat », déclare Paul van der Bas, porte-parole du CIDI. « Mais tant que cela se fait dans un contexte approprié, cela ne nous pose pas de problème », ajoute-t-il auprès de l’AFP.

Beau déguisement

L’exposition couvre deux étages du musée. Les visiteurs sont tout d’abord plongés dans un film qui explique la conception de la coccinelle mais aussi celle des chambres à gaz des camps d’extermination.

Un étage plus bas, trône une statue d’un homme nu sculptée par Arno Breker. A ses côtés, un gigantesque meuble de 5 mètres de long qui occupait le bureau d’Adolf Hitler. Sur les murs, des posters représentant le dictateur et des affiches de propagande. « L’exposition montre à quel point tout était planifié et à quel point la vie quotidienne était sous l’emprise totale du régime nazi », observe Ralf Bordewieck, un visiteur allemand.

« Une telle exposition doit pouvoir avoir sa place dans le monde d’aujourd’hui », estime Jan de Vries, professeur d’histoire néerlandais. « Elle contient un message très puissant : la terreur peut être dissimulée sous un beau déguisement ».

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