Signé Dior, Gaultier, Hermès

Chez LVMH et chez Dior, on met toujours les petits plats dans le grands, ici, en l’occurrence, cela ressemble à une boîte blanche construite juste à côté de l’Hôtel National des Invalides, Place Vauban, Paris 7ème.

Dedans, cinq salons, avec des jours, des fenêtres habillées de rideau d’organza aux couleurs sorbet et pour siéger, les fameuses chaises Dior mais repeintes en noir. Le règne de Raf Simons a bien commencé, le roi du minimalisme est passé par là, l’ère du show show chaud est vraiment terminée. Quoique. Le belge intronisé sait que Christian Dior a fondé sa maison de couture en 1947, à la Libération, qu’il a créé alors une mode « à contre-courant de la rigueur imposée par les années de guerre », qu’il a « pris à bras le corps la féminité, la complexité et l’émotion dans un véritable élan de liberté en rupture avec le passé » et que « l’idée même de restriction était dans les mentalités » et que « la première libération fut psychologique ».

C’est tout cela qu’il a voulu explorer. Les premières silhouettes de son printemps-été 2013 sont des réinterprétations parfaites de la veste Bar – jeu de plissés, basques qui s’évasent, broderies décalées et soudain, transformation de cette veste en mini robe, c’est là qu’est le twist. La légèreté nouvelle de Raf Simons qui s’autorise soudain de l’organza irisé avec épaule asymétrique porté sur un short très short parce que, dit-il, « il n’y a pas qu’un seul type de femmes que je souhaite attirer. » C’est culotté, un peu déroutant, mais on s’y fait. Surtout quand Raf Simons en un final grandiose marie le justaucorps noir et strict à une jupe longue et généreuse avec imprimé fleur, irisé toujours. Chassez le conceptuel, il revient au galop.

Parce qu’il ne renie rien, Jean Paul Gaultier met des talons aux gogo danseurs et Amanda Lear à poil ou presque. Le sexagénaire décoiffé a décidé que la vie serait drôle, ambiance nightclub des années 80, et qu’il partagerait sa discothèque, certes datées, mais qui fait toujours danser. Sur scène, sur le runway, se succèdent celles/ceux ( ?) qui l’inspirent encore et toujours – Grace Jones, Madonna, Mylène Farmer, Boy George, Jane Birkin, Michael Jackson, Abba et Amanda Lear. Il n’est jamais aussi fort que lorsqu’il travaille le trench, impeccable sur une petite baby doll ex fan des sixties, émeut à force d’en faire trop sur des soutifs roquette très like a virgin et cartonne quand il dessine des ensembles inspirés du training mais en lamé en hommage à la bande des quatre suédois qui chantaient Waterloo. Et quand Amanda tombe la cape pour apparaître en maillot rose à paillettes sur bas résille galbant des jambes parfaites, c’est juste le délire.

Chez Hermès, au Jeu de Paume, Christophe Lemaire a plus que jamais trouvé ses marques. Sous le signe d’un « esprit moderniste », de quelque chose d’affûté et de graphique, il poursuit la déclinaison de la grammaire maison mariée à son sens du masculin-féminin irréprochable. Sur des loafers compensées et pointues, les mannequins portent avec cette aisance et ce chic si particuliers une garde-robe qui décline tout le savoir-faire du sellier. De la cravate en soie retenue par un anneau « Chaîne d’ancre » à la robe chemisier en coton, du manteau manches trois quart retenue par un fermoir géométrique au sac-à-dos en cuir couleur cappuccino, des sacs Sillage au total look imprimé Hermès « Mosaïque » et « Echec au Roi ». Le luxe ici prend son envol. Et l’on s’émerveille d’avoir été là pour voir ça, de tout près, à pouvoir presque toucher les mannequins qui passent et vous regardent parfois dans les yeux avec un petit sourire aux lèvres, cela s’appelle peut-être la connivence, nous avons vécu ces instants-là, éphémères, rares et beaux.

A.F.M.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content