Hussein Chalayan

Résolument « à part » sur la planète mode, Hussein Chalayan est l’un des créateurs phares de la création contemporaine. Formé au prestigieux Central Saint Martins College of Art & Design de Londres, ce Chypriote turc né en 1970 à Nicosie a élu domicile dans la capitale britannique à l’âge de 12 ans sans renier, bien au contraire, ses origines méditerranéennes. Sa double nationalité et sa recherche constante d’identité sont d’ailleurs au centre de son travail créatif que les plumes spécialisées qualifient volontiers d’expérimental. Il est vrai que Hussein Chalayan a déjà réussi l’exploit de faire parler plusieurs fois de lui à coups de silhouettes chocs.

L’homme se défend toutefois d’être un provocateur. Certes, sa vision aiguisée de la mode contemporaine bouscule souvent le carcan des certitudes textiles, mais l’idée n’est pas, en définitive, de jouer la carte de la provocation facile juste pour le plaisir. Ainsi, lorsqu’il revisite le tchador pour sa collection de l’été 1998, Hussein Chalayan explore davantage la notion de territoire culturel que celle de la nudité proprement dite. De même, lorsqu’il fait défiler, en 1999, un mannequin dont la jupe était, de prime abord, une table de salon, c’est avant tout l’idée de l’exode qu’il veut transmettre au public.

Bien sûr, les réfractaires crient d’emblée au scandale, arguant que les vêtements de ce créateur atypique sont tout bonnement importables. Mais Hussein Chalayan s’en moque. Car l’important, pour lui, est de développer un concept abstrait à travers un vêtement finalement palpable. Peu importe, dit-il, si les gens n’ont pas toujours la clé pour déchiffrer le message : le vêtement doit se suffire à lui-même et son intellectualisation ne concerne, après tout, que son géniteur. Oui, Hussein Chalayan est un intello de la mode, même s’il refuse de se prêter au jeu dangereux des étiquettes trop souvent réductrices. Au même titre que Martin Margiela ou Rei Kawakubo, sa vision du vêtement passe obligatoirement par une réflexion pointue qui glorifie l’idée dans sa traduction textile, au risque d’être souvent catalogué « art contemporain ». Son engagement est toutefois sincère et ses années de création élitiste traduisent, en définitive, une réelle envie d’apporter un regard original sur le monde qui nous entoure.

F.B.

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