Nos favoris de l’été: le bikini, petit par sa taille, grand par son destin
Qui se souvient encore que ce minuscule bout de tissu fit couler autant d’encre, à sa création, en France, en 1946 ? Retour sur l’histoire de ce deux-pièces aussi subversif que mythique.
C’est sur une plage, tiens donc, que Louis Réard a l’idée de créer le Bikini. L’ingénieur automobile y observe les femmes en train de retrousser leur maillot de bain, histoire d’optimiser leur bronzage. Nous sommes en 1946. Les années de guerre viennent de se terminer ; les congés payés, entérinés dix ans plus tôt, favorisent le développement du tourisme… et le Français imagine ce qu’il souhaite être une bombe anatomique, soit un soutien-gorge et une culotte composée de deux triangles de tissu reliés par une corde. Le tout peut tenir dans une boîte d’allumettes et est baptisé du nom d’un microscopique atoll du Pacifique sud, sur lequel les Américains viennent d’effectuer un essai nucléaire.
Le défilé de présentation se veut aussi explosif que ce nouveau modèle. A la piscine Molitor, c’est une strip-teaseuse du Casino de Paris qui est réquisitionnée pour l’occasion, aucun mannequin n’acceptant de porter ce deux-pièces. Ce qui crée la polémique ? Non pas le haut, qui ressemble aux vêtements de baignade des années 40, mais bien le bas, qui dévoile éhontément hanches, fesses et surtout le nombril, tout proche de la toison pubienne.
Scandale, la mode le juge trop vulgaire, et de nombreux pays catholiques, comme la Belgique, l’Espagne, l’Allemagne ou l’Italie vont même jusqu’à l’interdire pendant de longues années, oubliant au passage qu’une tenue assez similaire était déjà adoptée à l’époque néolithique, comme en attestent des représentations découvertes par des archéologues.
A la piscine Molitor, c’est une strip-teaseuse du Casino de Paris qui est réquisitionnée pour l’occasion, aucun mannequin n’acceptant de porter ce deux-pièces
Il faudra attendre l’intervention de deux stars du cinéma pour rendre cette pièce aussi désirable et populaire. La première n’est autre que Brigitte Bardot, 18 ans à l’époque, qui se fait photographier, lors du Festival de Cannes de 1953, dans une parure balnéaire fleurie rouge et blanc.
De quoi donner envie à tous les people de Saint-Trop’ d’arborer également cet ensemble rikiki, encore jugé immoral. En 1962, c’est au tour de l’actrice Ursula Andress d’attirer tous les regards sur ces bouts de tissu mouillés, dans une désormais mythique scène de James Bond 007 contre Dr. No., où la belle blonde sort des flots, dans un modèle blanc ultrasexy. Plus question, ici, de jouer les faire-valoir. Pour la première fois, le maillot est porté par une personnalité indépendante, tout sauf femme-objet. Mai 68 est tout proche…
Ce n’est qu’après cette révolution sociétale que ce symbole de l’émancipation féminine se retrouve sur les plages familiales, sans plus vraiment les quitter depuis. Toutes les déclinaisons sont désormais possibles, comme le monokini (seins nus), le trikini (qui relie les deux pièces du maillot sur le devant par une bande de tissu ou un anneau), le sexykini (échancré au maximum), et même le controversé Burkini (contraction de burqa et Bikini, il ne laisse passer que le visage, les mains et les pieds) qui fit beaucoup parler de lui dernièrement.
Indémodable, il revient sur les devants de la scène cet été orné de motifs fleuris, animaliers ou ethniques. La culotte se porte assez haute pour mettre l’accent sur les hanches. Reste que le Bikini entretient par sa forme un culte du corps et s’accompagne donc aussi d’un nouveau type de servitude pour la femme, contrainte de cacher par ici ce petit ventre, par là ces fesses un peu flasques, ces poils qui tapent l’incruste ou ces marques de cellulite. Ou comment remplacer un corset par un autre, d’un nouveau genre.
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