
Des festivals aux défilés, le kimono est partout cet été
À la maison, à la plage, en top ample ou en veste légère : de nos jours, le kimono est partout. Et c’est une excellente raison de s’intéresser à ce qui rend ce vêtement séculaire si populaire.
Traduit de manière littérale, le terme kimono signifie « ce que l’on porte ». Et ce vêtement non genré est devenu si populaire sous nos latitudes que cette appellation n’est pas usurpée. Mais comment expliquer que ce vêtement traditionnel originaire du Japon soit devenu si apprécié en Occident? Pour le comprendre, il faut s’intéresser à son histoire.
Big in Japan
Laquelle commence donc au Japon, où à la fin du XVIe siècle, tout le monde le portait, quel que soit son sexe ou son statut. La pièce n’avait (et n’a toujours) aucune signification cérémonielle ou religieuse, mais était alors un vêtement de tous les jours. Et au milieu du XVIIe siècle, il est devenu un véritable article de mode, évolution des tendances oblige. A cette époque, le Japon subissait de grands changements sociaux, économiques et culturels: pendant la dictature militaire de la période Edo, le pays était en effet coupé du reste du monde tout en connaissance une stabilité relative, ce qui a contribué à créer une culture unique. Grâce à la classe marchande croissante, l’art et la culture, mais aussi la mode, ont pris un coup de pouce. Et le kimono en a bénéficié.
Tendance transcontinentale
C’est à la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC), qui était autorisée à faire du commerce au Japon, qu’on doit l’arrivée du kimono à l’étranger. Ces vestes droites et sans silhouettes aux motifs fantastiques ont rencontré un succès instantané dans l’Europe des corsets et de la mode près du corps. Les Hollandais y virent immédiatement un marché potentiel et firent fabriquer par les Japonais des spécimens plus adaptés à notre climat. La demande étant supérieure à l’offre, des tailleurs indiens, et plus tard européens, ont également été approchés pour répondre à l’engouement pour ce vêtement considéré alors comme le comble de l’exotisme et du chic. Tant et si bien que la VOC a également expédié des textiles d’Inde, de France et de Grande-Bretagne vers le Japon, où les créateurs locaux les ont à leur tour utilisés pour créer des kimonos à la mode.
La mode et Monet
Le Japon a rouvert à la fin du XIXe siècle, et en Occident, tout ce qui était japonais est devenu à la mode. Le pays a donc commencé à fabriquer des kimonos pour l’exportation, en soie brodée de couleurs, très populaires auprès de la classe supérieure en Europe et aux États-Unis. Témoin de la tendance, Claude Monet a capturé sa femme en kimono rouge dans le tableau « La Japonaise » en 1876. Au début du 20e siècle, le kimono inspire les créateurs européens tels que Poiret, Lanvin et Vionnet. Qui ne l’ont pas copié aveuglément, mais ont fait preuve de créativité en intégrant des éléments de ce dernier.
Imitation et flatterie
Au Japon, ces variantes occidentales sont considérées comme une appréciation du kimono. Et parce que les robes (de chambre), les hauts et les cache-maillots qui pendent dans notre magasin ne sont pas considérés comme de véritables kimonos, personne – à l’exception d’une minorité conservatrice – n’en perd le sommeil.
D’autant que les Japonais sont désireux de partager leur culture, notamment par le biais du kimono, entre autres. On n’est donc pas dans un scénario d’appropriation culturelle, où une minorité se sent volée, puisque le Japon lui-même a joué un rôle dans son commerce et que l’Histoire montre une influence mutuelle.
#KimOhNo
Ce qui ne veut pas dire que le maire de Kyoto n’était pas légitime lorsqu’il a réagi avec virulence à la volonté de Kim Kardashian de détourner la fierté nationale japonaise en tant que marque de commerce pour son shapewear. Avant de s’appeler Skims, controverse oblige, la ligne de gaines et autres sous-vêtement répondait en effet au nom de Kimono… Mais c’était sans compter sur l’outrage suscité.
Pour rappel, enfiler un kimono pour stéréotyper la culture japonaise n’est pas non plus acceptable – par exemple lors d’une soirée costumée, dans une copie d’une boutique de costumes ou de souvenirs. Encore moins avec du maquillage jaune, comme Katy Perry aux American Music Awards en 2013. Mais si vous le portez en tant que déclaration de mode, c’est OK.
Une tendance persistante
Après que l’Amérique a forcé le Japon à ouvrir ses ports en 1853, la manière occidentale de s’habiller est devenue à la mode. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le kimono avait pratiquement disparu de la vie quotidienne et était devenu un symbole de la tradition. Et ce alors même que chez nous, le kimono n’est jamais vraiment passé de mode depuis le 17ème siècle. Des designers tels que John Galliano, Alexander McQueen, Thom Browne et bien d’autres l’ont ainsi réimaginé récemment.
Plus frais que jamais
Mais comment expliquer que maintenant les magasins en sont pleins ? En 2020, le London V&A a présenté l’exposition « Kimono : Kyoto to Catwalk ». Soit pile le genre d’évènements culturels qui détectent et déclenchent souvent de nouvelles tendances. Peut-être que le changement climatique a aussi quelque chose à voir avec notre engouement, à moins qu’il ne s’agisse de notre envie de voyager ou encore de la fièvre des festivals.
Sans oublier que le kimono est une façon de rester chic quand il fait (très) chaud. Et que depuis la pandémie, nos préférences vont clairement vers tout ce qui allie confort et esthétisme.
Le comeback du kimono
Ce qui est certain, c’est qu’il y a eu un regain d’intérêt pour le kimono au Japon ces dernières années. Pas en tant que costume traditionnel, mais encore une fois comme véritable article de mode. Les jeunes japonaises achètent des pièces vintage pour lutter contre la fast fashion et marquer leur appréciation du métier, mais elles les portent de manière personnelle.
En parallèle, les créateurs japonais vont retravailler dessus et implanter le kimono dans le vestiaire contemporain. Et comme ce qui est branché au Japon est aussi très populaire chez nous aujourd’hui, nous avons fait un peu de shopping…
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici