Kristina De Coninck: « Je vois mes rides et mes cheveux gris, mais vieillir, c’est tellement plus que cela »

© Renaud Callebaut

La top belge a travaillé pour de grands créateurs tels que Dries Van Noten, Yohji Yamamoto ou encore Jean Paul Gaultier. Et a été la muse de Martin Margiela durant de longues années. Elle se consacre désormais à l’art dans son studio français de Bois-le-Roi… et fête ce mois-ci ses 60 printemps.

La mode et le style ont toujours touché mon imagination. Les robes romantiques dans les films, les magazines de mode, un vernis à ongles appelé Five O’Clock in the Afternoon: adolescente, c’est ce qui me faisait rêver. L’essor de la mode belge, ainsi que la percée des Six d’Anvers, dans les années 80, m’ont donné envie de goûter à l’énergie de cette scène. Pour autant, je n’ai jamais eu l’intention de devenir mannequin. Lorsque j’avais 27 ans, le photographe Ronald Stoops m’a remarquée dans un café. C’est lui qui m’a fait participer à un casting pour le créateur Dirk Van Saene. Avant que je ne m’en rende compte, le mécanisme était lancé.

Ce n’est pas grave si tout ne fonctionne pas du premier coup. Lorsque Ronald m’a appelée, je travaillais comme créatrice graphique à Bruxelles: un boulot ennuyeux qui me rendait profondément malheureuse. A l’époque, il fallait savoir utiliser un ordinateur, mais ma formation ne m’avait absolument pas préparée à cela. Aurais-je pu embrasser davantage la technologie, faire plus d’efforts pour apprendre à travailler avec celle-ci? Sans aucun doute, mais cela n’a pas de sens de se lamenter sur des choix que vous avez faits ou des choses que vous auriez dû faire différemment. Ce qui est fait est fait, et il faut n’en tirer que le meilleur.

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Le défi est toujours de s’accepter comme on est. Alors qu’à l’époque, j’étais une fille atypique pleine d’incertitudes, le contact avec le monde de la mode m’a aidée. J’ai été impressionnée par les stylistes et les missions qu’ils m’ont confiées. Toutefois, ce que j’ai principalement retenu, c’est que j’avais le droit d’être moi-même, une fille ringarde. Par ailleurs, le fait que les Belges n’exigent aucune démarche parfaite de mannequin a également aidé. Des années plus tard, j’ai déambulé dans un costume de zèbre lors d’un immense défilé de Thierry Mugler au Japon – une expérience formidable, même si je ne devais pas être très bonne (rires).

On n’arrive à rien sans un peu de courage. Le fait de déménager à Paris, à 29 ans, était un défi énorme mais à l’époque je n’avais pas vraiment le choix: c’est là que tout s’est joué en 1990, et si je n’avais pas osé sauter le pas, je n’aurais jamais su quelles étaient mes chances. Une des personnes qui m’a dit de foncer était Martin Margiela, qui vivait déjà là-bas à l’époque — un conseil pour lequel je lui ai toujours été reconnaissante.

Le dévouement ouvre beaucoup de portes. Les premières années à Paris furent difficiles. Les missions ne me permettaient de m’y poser que quelques semaines tout au plus. Néanmoins j’ai découvert que les choses ne viennent pas toutes seules: si vous voulez voir quelque chose grandir, vous devez y consacrer toute votre attention.

Je vois mes rides et mes cheveux gris, mais vieillir, c’est tellement plus que cela. Apprendre u0026#xE0; se connau0026#xEE;tre: comment pourrais-je avoir quelque chose contre cela?

Rares sont les innovateurs radicaux dans la mode. C’est pourquoi une partie des vêtements que Martin m’a offerts au fil des années se trouve désormais dans des musées et collections privées. Je ne les considère plus comme mes biens mais plutôt comme une partie de l’histoire de la mode. Ainsi, il a été plus facile de mettre de côté mes propres souvenirs et émotions et de m’en séparer: les pièces sont entre de bonnes mains et sont conservées de la meilleure façon possible, ce qui me rassure.

Pour moi, la beauté est davantage liée à la personne intérieure. Je vois mes rides et mes cheveux gris, mais vieillir c’est tellement plus que cela. Apprendre à se connaître, comprendre un peu mieux le monde: comment pourrais-je avoir quelque chose contre cela? Vogue Italia et Gucci Beauty m’ont récemment demandé de réaliser une séance photo avec un groupe varié de jeunes filles et de femmes possédant chacune leur propre look et personnalité. Les idées sur la beauté évoluent donc également dans le monde de la mode et de la beauté.

Ma seule certitude est que tout est en constante évolution. Vers 40 ans, j’ai commencé à travailler dans des magasins de mode et j’ai pensé que je ne voudrais plus jamais faire autre chose. C’était évidemment absurde: je continuais à évoluer, tout comme mon environnement de travail. Depuis quelques années, je me concentre sur la sculpture, une passion que j’ai découverte grâce aux travaux manuels de ma fille Nina. Pouvoir créer des choses, les partager avec d’autres: c’est du pur bonheur pour moi. Mais je réalise aussi que rien n’est permanent. Les nouvelles orientations professionnelles et les recherches ne me font pas peur – l’important est de faire des choses que l’on apprécie et qui nous rendent heureux.

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