Le grand retour du bomber
Il a fait la guerre, la révolution, la fête et son cinéma comme personne d’autre. Ce printemps-été, l’historique bomber signe son grand retour sur le devant de la scène mode.
D’aucuns l’ignorent peut-être: bon nombre de pièces emblématiques de la garde-robe masculine se sont échappées du vestiaire militaire. A l’instar du bob, des desert boots ou du caban, le bomber n’échappe pas à la règle. Cadet de la longue lignée des vestes d’aviation, son histoire est intrinsèquement liée à celle des avions à réaction. Avec leur introduction au sein de la United States Air Force, il est dorénavant possible de voler à des altitudes plus élevées et, dès lors, dans des conditions plus rudes. Seulement, lorsque les traditionnels blousons en cuir se retrouvent mouillés par la pluie ou la transpiration, ils gèlent. Second problème: les cockpits des jets sont plus étroits, désormais. Il est donc impératif d’imaginer un nouveau vêtement utilitaire peu encombrant, poids plume mais chaud.
Après quelques ajustements, la MA-1 jacket voit le jour au début des années 50. Elle est en Nylon — une matière possédant un faible pouvoir absorbant et séchant rapidement — bleu marine ou vert olive, doublée d’une épaisse couche de polyester léger, réversible (son intérieur orange permet au pilote d’être facilement visible en cas de pépin) ; son col est en tricot, pour éviter tout désagrément avec les harnais des parachutes. En 1963, Alpha Industries remporte le contrat de manufacture des MA-1 et en conçoit à destination du grand public, au moment où la pièce gagne une popularité mondiale due aux images omniprésentes de pilotes américains bombardant le Viêt Nam.
Au cours de cette décennie et des suivantes, l’habit devient un marqueur identitaire pour les sous-cultures révoltées et acquiert, au passage, une mauvaise réputation. Les skinheads l’arborent pour revendiquer un ancrage prolétaire tandis que les punks l’apprécient tout particulièrement parce qu’il est difficile à agripper lors des échauffourées avec la police. A partir des nineties, ce sont les gabbers néerlandais, les ravers berlinois et autres fêtards du Vieux Continent qui se l’approprient pour sa praticité. En boîte, comme à la guerre.
Aussi, il est important de noter que le fameux blouson s’illustrera à maintes reprises au cinéma. Sur le dos des sex symbols, s’il vous plaît. Marlon Brando, himself, en porte un en cuir dans Un Tramway Nommé Désir. Steve McQueen endosse sa quintessence dans Le Chasseur. Et, plus récemment, c’est Ryan Gosling qui se pare, dans Drive, d’une interprétation en satin, matelassée et ornée d’un scorpion jaune brodé à l’arrière, devenue mythique… Une liste non exhaustive qui démontre autant le côté protéiforme de l’objet que son aura virile.
Si le retour du bomber ce printemps-été tient davantage de la récurrence que de la tendance, force est de constater qu’il a inspiré les créateurs plus que jamais. Semblant posséder le don d’ubiquité, il était présent chez A-Cold-Wall, Ambush, Boss, Ermenegildo Zegna, Martine Rose, Philipp Plein et Wooyoungmi. Nul doute qu’à la belle saison il investira les rues comme il le fit, autrefois, avec les cieux.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici