L’Italie, géant mondial du cuir

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Sacs, chaussures, canapés ou intérieur de voitures… le cuir italien est omniprésent. À elle seule, la péninsule réalise 65% du chiffre d’affaires du secteur en Europe, en misant avant tout sur la qualité.

« Nous sommes un pays de grande tradition, avec quelque 1.200 entreprises. L’Italie est le premier producteur de cuir au monde en valeur, avec une part de marché de 19-20%, et en Europe, nous représentons les deux tiers de la production », souligne le président de l’Union italienne de la tannerie-mégisserie (Unic), Gianni Russo, dans un entretien à l’AFP.

La filière a largement misé sur l’export: elle vend aujourd’hui plus de 70% de sa production (3,8 sur 5,1 milliards d’euros) à l’étranger, contre seulement 35% en 1992.

Et parmi ses clients figurent naturellement les plus grands noms du luxe français, de Chanel à Hermès, l’Hegaxone représentant son troisième marché.

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La production italienne, qui représente près de 130 millions de m2 de peaux travaillées, « se situe sur la partie la plus haute du marché, avec une forte valeur ajoutée, soit les cuirs les plus précieux et innovants », assure M. Russo.

La Chine, légèrement en-dessous en terme de chiffre d’affaires, dépasse en revanche l’Italie en volume, avec une production de qualité moindre.

Mais étonnamment, les tanneurs italiens ont aussi réussi à s’imposer en Chine, plus grand pays manufacturier, grand producteur de chaussures ou sacs. Ils y expédient 12% de leurs exportations, même si le flux s’est tari dernièrement.

De manière générale, cette année 2018 est plus compliquée pour le secteur: le chiffre d’affaires, qui avait progressé de 1,8% l’an passé, a reculé de 3,8% au premier semestre, malgré la hausse de la production (+4,6%).

La raison: une chute des prix liée à « un certain refroidissement conjoncturel dû aux tensions commerciales à l’échelle mondiale, notamment entre la Chine et les États-Unis, qui créent de l’incertitude » et « un ralentissement de certains segments comme la chaussure », explique le directeur général adjoint de l’Unic, Luca Boltri.

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Mais « les tanneurs italiens ont démontré par le passé leur énorme capacité d’adaptation dans un marché qui change à une vitesse impressionnante », assure-t-il.

– Durabilité et traçabilité –

Tout en multipliant les efforts en terme de développement durable: « La durabilité est la base de tout. Réduire la quantité d’eau utilisée, ne pas utiliser de solvants, mais des produits biodégradables, est un engagement au quotidien, et ce depuis des années », note le directeur du groupe toscan Antiba, Graziano Balducci, rencontré lors du salon Lineapelle, à Milan.

Le secteur dit avoir réduit depuis 2013 sa consommation d’énergie de 28%, d’eau de 18%, et ses déchets de 13,5%.

La filière importe 95% des peaux qu’elle travaille, qui sont dans leur quasi-totalité issues d’animaux dont la viande sera consommée. Avec des critères stricts, assure-t-elle.

Antiba achète ses peaux de chèvre en Inde et a mis en place « un système de traçabilité afin d’être certain que le bien-être animal soit garanti », souligne M. Balducci.

Même discours chez Priante (groupe JBS), qui est capable de dire à ses clients pour chaque peau venant du Brésil d’où vient l’animal et où et quand il a été tué.

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Selon M. Russo, les clients recherchent autant la qualité que ce label environnemental.

La force du secteur tient dans son organisation, autour de trois « districts »: la Vénétie (nord-est), la Toscane (centre) et la Campanie (sud), et de nombreuses PME à caractère familial, comme Antiba (95 salariés) mais aussi de grands groupes industriels qui fournissent surtout l’industrie automobile.

« À l’intérieur d’un district, on ne trouve pas seulement des tanneurs, mais aussi des entreprises de technologies, des producteurs de produits chimiques… Être en contact aussi proche permet une confrontation continue, ce qui accroît la compétitivité de chaque entreprise », explique M. Russo.

Pour M. Balducci, « l’Italie est le laboratoire mondial du cuir », en permanente recherche d’innovation.

Son segment, celui de la tannerie de luxe, a beaucoup évolué ces dernières années: « Autrefois, nos clients étaient beaucoup plus petits que nous, maintenant ils sont beaucoup plus gros » et leur exigence oblige à s’améliorer sans cesse, souligne M. Balducci.

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