Et si votre robe à paillettes essayait de vous tuer?

Les robes à paillettes et sequins sont-elles dangereuses pour la santé? Getty Images
Les robes à paillettes et sequins sont-elles dangereuses pour la santé? Getty Images
Kathleen Wuyard-Jadot
Kathleen Wuyard-Jadot Journaliste

Associés à la fête dans l’imaginaire collectif, sequins, paillettes et autres tissus qui scintillent ont pourtant une face plus sombre. C’est qu’ils ne sont pas seulement néfastes pour l’environnement, mais peuvent aussi nuire à notre santé.

Si une hirondelle ne fait pas le printemps, l’arrivée des sequins dans les vitrines des boutiques annonce toutefois bien que le décompte vers les fêtes de fin d’année est lancé. Argentée façon boule à facettes, dorée pour se la jouer lingot, multicolore pour celles qui osent ou même noire, pour une approche festive mais pas trop, la robe à paillettes est de tous les rendez-vous de décembre, du réveillon de la Noël à celui du Nouvel an en passant par l’apéro du boulot ou encore le traditionnel selfie de saison.

C’est qu’avec son tissu chatoyant qui attire la lumière et les regards, elle n’a pas son pareil pour mettre dans l’ambiance en deux temps trois mouvements, ou plutôt, un mouvement seulement, celui de revêtir sa tenue pailletée. Certes, selon leur composition et le fait qu’elles soient ou non doublées, celles-ci grattent un peu parfois, et puis il arrive que des sequins se fassent la malle, mais bon, ce n’est pas bien grave.

Ce qui est nettement plus préoccupant, par contre, c’est l’impact de ces vêtements sur l’environnement, mais aussi, sur la santé des personnes qui les portent.

Tout ce qui brille…

Pour rappel, au cas où l’info vous aurait échappé, cela fait plusieurs saisons déjà que paillettes, sequins et autres matières chamarrées sont dans le viseur des défenseurs de la planète. En cause: la composition de la plupart d’entre elles. Lesquelles, malgré leurs reflets métalliques, sont en réalité faites en grande majorité de disques de plastique, lesquels contiennent sans surprise des microplastiques, qui sont non seulement non biodégradables, mais aussi, non recyclables.

Comprendre: une catastrophe pour l’environnement.

Raison pour laquelle, depuis le 15 octobre 2023, ces paillettes polluantes sont bannies de tous les pays membres de l’Union européenne. Lors de l’annonce de cette mesure, la Commission européenne avait partagé que cette interdiction permettrait d’empêcher chaque année la diffusion de 500.000 tonnes (soit l’équivalent de 100.000 éléphants, ou 1.5 Boeing, à titre de comparaison) de microplastiques dans l’environnement, où ils polluent sols, écosystèmes et toute la chaîne alimentaire qui en découle des décennies durant.

Problème: la mesure ciblait spécifiquement les « paillettes libres », utilisées par l’industrie de la beauté, ce qui explique pourquoi les rayons des boutiques scintillent autant que les années précédentes en ce mois de décembre. Et ce alors même qu’il n’y a pas que pour la planète que ces tenues de fête sont nocives, mais bien aussi, pour notre santé.

Et la santé dans tout ça?

Ces maudits microplastiques, d’autant plus dangereux qu’ils sont invisibles à l’oeil nu, n’ont en effet pas leur pareil pour être ingérés. Ces dernières années, des études ont révélé qu’on en retrouvait dans nos systèmes digestifs, dans le lait maternel, mais aussi dans le placenta et dans le cerveau, entre autres endroits qu’on aimerait vraiment garder préservés des invasions de polluants.

Or non seulement ces particules font effet de perturbateur endocrinien, en prime, « le plastique est un vecteur d’autres contaminants chimiques. Il peut en effet absorber des contaminants de par ses propriétés hydrophobes. Il peut transporter des antibiotiques mais également des bactéries pathogènes, qui peuvent se retrouver dans la chaîne alimentaire » met-on en garde du côté de l’Université de Toulouse.

Et même si, a priori, il y a peu de chances pour que vous décidiez de gober un bout de votre robe pailletée si vous vous ennuyez à un moment de la soirée, son processus de fabrication implique une pollution de l’air et du sol avoisinants, avec le risque que des animaux ingèrent sequins et microparticules, et qu’une fois ceux-ci tués pour être consommés, et bien ce soit au tour des humains de manger ces mêmes microplastiques tout sauf appétissants.

« Les paillettes étant synthétiques et fabriquées à partir d’un matériau qui contient très certainement des produits chimiques toxiques, tout ce qui se retrouve dans l’air, l’eau ou le sol est potentiellement dangereux », alertait récemment Jane Patton une activiste du Centre for International Environmental Law britannique.

On l’aura compris: derrière leur apparence festive, ces tenues ne brillent pas par leur impact positif. Mais quoi, alors, on enfile un vieux pull et tant pis?

Briller, oui, mais pas avec n’importe quelles paillettes

Pas si vite: il existe en effet des paillettes qui ne sont pas faites de plastique. Au Canada, un étudiant en ingénierie a ainsi récemment mis au point le ChiralGlitter, 100% biodégradable grâce à sa composition en cellulose, une molécule que l’on trouve notamment dans le bois ou le papier. Brillante à souhait, sa trouvaille n’a toutefois pas encore été exploitée par le monde de la mode.

Chez Stella McCartney, dont le label aussi applaudi pour ses créations à l’élégante modernité que pour son engagement en faveur de l’environnement, on opte pour les BioSequins, fabriqués à base de matières végétales sans que cela n’enlève rien à leur scintillement. Lors du lancement de sa première gamme de vêtements chatoyants au printemps 2023, la créatrice rappelait que « les femmes britanniques achètent 33 millions de vêtements à paillettes à chaque saison festive, dont 1,7 million finissent à la décharge après seulement 5 ans et 35 % des microplastiques sont rejetés dans les océans de la planète. Ces paillettes conventionnelles sont fabriquées à partir de films de polyester ou de vinyle, qui contiennent des produits chimiques toxiques et cancérigènes présentant des risques importants pour l’environnement et la santé ».

Problème: à 790 euros le pull pailleté et plus de 2.000 euros la cape moirée, on est sur un budget nettement plus conséquent que celui de la petite robe fast-fashion achetée sur un coup de tête à la pause midi. Mais si c’était ça, justement, le prix véritable d’une tenue de fête responsable?

Comprendre: tout le monde ne peut pas se l’offrir, et même si c’est frustrant et injuste, ce n’est pas plus mal, parce que cela veut dire qu’on contribue en prime à diminuer la pollution textile. En s’abstenant de vider son compte épargne pour scintiller en sequins bio estampillés Stella McCartney, mais aussi, si on n’aime rien tant que se la jouer boule à facettes, en optant plutôt pour une tenue pailletée de seconde main.

Selon les derniers chiffres diffusés par Gondola, les Belges jetteraient en moyenne 15 kilos de vêtements (l’équivalent de 60 articles) par an et par personne , ce qui nous vaut le triste record du pire score d’Europe. Et si on décidait d’y remédier en prenant dès décembre la résolution d’acheter autrement, moins mais mieux, et de préférence, de manière circulaire? Bonus, en optant pour une robe à paillettes recyclée, vous avez la garantie de ne croiser personne dans la même tenue que vous sur le dancefloor. Un bon point pour l’allure et pour la planète, même si pour la santé, malheureusement, on repassera…

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