Sugar daddy/sugar baby : mécénat ou prostitution?

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Stagiaire

La Belgique compte près de 16.200 jeunes à la recherche d’un riche mécène. Retour sur une tendance controversée qui fait de plus en plus parler d’elle, celle des Sugar Daddies.

Le site SeekingArrangement.com, vient d’effectuer son rapport annuel. Alors que chez nous, les frais universitaires sont loin d’être exorbitants (le minerval s’élève à environ 850 €), on compterait tout de même près de 16.200 Sugar Babies en Belgique. D’après le rapport, cette année 35 % de la population universitaire de SeekingArrangement est issue de familles de classe moyenne élevée et élevée.

Pour rappel, les sugar daddies ou sugar mummies sont des adultes au niveau de vie assez élevé qui financent les sugar babies, jeune personne, étudiante ou non, à la recherche d’une source de revenu supplémentaire. Pour ce qui est des termes de la relation, ils doivent être impérativement définis à l’avance de façon très claire par les deux parties. Contrairement aux idées reçues, il n’est pas forcément question de relations sexuelles, mais des réflexions d’ordre éthique se posent quand même.

Sugar Daddy vient à la rescousse

Des centaines de milliers, voire des millions, d’arrangements ont aidé les étudiants à obtenir leur diplôme sans dette. C’est plus que ce que n’importe qui peut dire du gouvernement

Pretty Woman serait en fait une étudiante. Tout comme le célèbre film de Garry Marshall, la mode du sugaring peut passer pour une romantisation de la prostitution, sinon de l’escorting. Cette pratique n’a évidemment pas vu le jour avec ce site. Ce qui change désormais, c’est l’aisance avec laquelle on aborde le phénomène, qui en est dès lors banalisé.

A lire les propos du CEO de SeekingArrangement.com, le Sugar Daddy est perçu comme un mécène, un homme providentiel venu sauver les étudiant(e)s à court d’argent. Ici, c’est par un « glissement sémantique » que Brandon Wade, le CEO rend cette pratique tout à fait acceptable en utilisant pour la définir le terme d’ « arrangement ».

De son côté, la Sugar Baby moyenne est âgée entre 21 et 27 ans et reçoit 28.000 euros par an de la part de son Sugar Daddy, à travers des cadeaux et allocations mensuelles.

« Certains y voient un sujet à controverse, en particulier en tant que solution aux dettes étudiantes. Cependant, le site a permis de mettre en place des centaines de milliers, voire des millions, d’arrangements qui ont aidé les étudiants à obtenir leur diplôme sans dette, » affirme Wade. « C’est plus que ce que n’importe quel gouvernement peut se vanter de faire » confie-t-il.

Lors d’une interview télévisée, relayée par le Business Insider, Brandon Wade dément toute forme de prostitution. Pour lui « ce n’est pas parce qu’il y a de l’argent en échange d’une relation que cela en fait de la prostitution. Ma mère est restée à la maison et recevait une allocation de mon père. D’autres couvrent leurs petites amies de cadeaux… »

La journalisteMelanie Berliet est très bien documentée sur le sujet puisqu’elle a effectué l’expérience du sugaring en personne et partage l’avis du CEO. Elle affirme que toute relation repose sur un échange entre les partenaires, que ce soit une bague de fiançailles, un repas ou encore un massage. Interviewée par une chaîne de télévision américaine, elle explique que selon elle, cette pratique est une « réalité nécessaire pour les individus concernés. »

Pourquoi un tel engouement ?

Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce phénomène. Dans un certain contexte sociologique, fait de crises identitaire et économique, la marchandisation des êtres et de leur corps peut venir comme une réponse facile, presque spontanée à un besoin financier.

La société actuelle n’est cependant pas tout à fait à blâmer. De tout temps, on a assisté à une marchandisation des êtres ou de leurs corps, même si ce n’est pas exactement le cas ici. La différence par rapport au passé est que dans le cas présent, les êtres, en l’occurrence les étudiant(e)s, se « marchandent » eux-mêmes.

Par ailleurs, le facteur psychologique de cette pratique apparaît presque comme évident aux yeux du tout venant. Outre le besoin affectif, l’aspect inconscient de la démarche trouve un écho dans les phantasmes où le « sugar-objet » devient propice à leur satisfaction. Il y a là des aspects oedipiens, mais aussi des enjeux de recherche de protection, de vengeance envers les parents, de valorisation narcissique ou encore de lutte contre des angoisses de mort. Reste à savoir quelles sont les conséquences sur le futur des sugar babies, une fois le dipôme en poche.

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MH Dufays

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