Réussir ses vacances avec des enfants: les conseils d’Isabelle Filliozat

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Rares sont les escapades « mômes friendly » à se dérouler les doigts de pieds en éventail. Isabelle Filliozat, nouveau gourou en matière de parentalité positive, livre sa feuille de route pour que les vacances riment avec bonne ambiance plutôt que rouspétance.

Epuisement dû à une rentrée trop rythmée, stress des valises à boucler, trajet éreintant avec des passagers impatients… Vous vous réjouissiez de pouvoir enfin souffler ? Changez d’objectif immédiatement ! Si vous partez avec vos/des enfants et que vous voulez revenir avec le sourire plutôt qu’un ulcère, commencez par faire un trait sur… votre transat ! « Vacances est un terme dérivé de vacant qui signifie « vide ».

Or, dans le cas d’une famille, c’est, à l’inverse, un moment où l’on est ensemble, souligne Isabelle Filliozat, psychothérapeute et auteur à succès de livres éducatifs. Il est probable que les premiers jours, l’enfant, qui retrouve enfin ses parents, fasse des crises et se comporte de façon extrême : il se libère de la tension causée, tout le reste du temps, par le manque de disponibilité de son père et sa mère. Maintenant qu’ils sont là, il peut l’exprimer. »

La meilleure façon d’atténuer considérablement cette phase critique, c’est de l’anticiper. Et de consacrer le début des vacances à s’occuper entièrement des petits, pour remplir leurs réservoirs d’amour et d’attachement. « Pour éviter que le cirque ne dure trop longtemps et arriver à ce que cela se passe bien rapidement, il faut commencer par une écoute et une attention intenses, conseille la psychothérapeute. Jouez ensemble, soyez en interaction, proposez des activités qui lui sont dédiées, soyez corporel et physique. Plus vous ferez de bagarres de coussins, moins vous aurez de crise de frustration. » L’explication du phénomène ? Chimique. Ou plutôt hormonale : grâce aux corps à corps, enfants comme adultes créeront d’avantage de dopamine, de sérotonine et d’ocytocine. Des hormones qui apaiseront les uns et les autres.

La recette miracle n’existe pas…

« … Mais il y a des recettes qui peuvent faire des miracles, sourit avec malice l’auteur de J’ai tout essayé et Il me cherche (JC Lattès). La première, vous l’avez : c’est l’attachement. Pensez à remplir leurs réserves immédiatement et régulièrement. La seconde, c’est de ne pas avoir d’attentes, ni d’objectifs extérieurs. Il est essentiel de se souvenir que le plus important, c’est d’être en famille ! » D’ailleurs, notre agacement provient souvent de la pression que l’on se met – « Nous sommes à la mer, alors il faut profiter de la mer ! ». Et on s’énerve parce que les gosses, eux, préfèrent ramasser des cailloux dans la forêt. Forcément, notre esprit pragmatique se demande pourquoi on est venus si loin pour jouer au Petit Poucet… « La créativité, c’est cesser de croire que si on part dans un endroit, c’est pour en profiter. Il est indispensable de gagner cette liberté d’esprit, affirme Isabelle Filliozat. Quelque fois, il faut aller loin pour faire des choses simples. L’ailleurs sort les parents de leur quotidien et les aide à changer leurs habitudes, comme accorder plus de temps à leurs proches. » Pour s’en convaincre, gardons à l’esprit que les petits sont plus intéressés par le processus que le contenu. Par le chemin, pour autant que celui-ci soit agréable, plutôt que l’arrivée. Quatre heures de voiture pour atteindre un endroit paradisiaque ? Changez de plan à moins de regorger d’idées merveilleuses pour les animer en route ! Simplifiez-vous la vie et cherchez des activités dans un champ d’action limité.

Apprenez aussi à repérer les moments critiques. Prenons le cas d’une journée « Disney » où l’on part du principe que ce sera « l’éclate totale ». Les kids reçoivent tout ce qu’ils demandent : gaufres, jouets, manèges, barbe à papa… Sourires XXL jusqu’au moment du retour, où c’est la crise et les hurlements. Les parents sont démunis, désespérés, exaspérés. « Ils font quasiment tous la même erreur, explique Isabelle Filliozat. Il est important de mesurer que cette journée a généré beaucoup de stress, positif certes, mais du stress quand même. Or, c’est lorsqu’on est dans une situation de contrainte, comme le fait de ne plus pouvoir bouger, que celui-ci émerge enfin. »

Donc si vous faites de longs trajets, quel que soit le moyen de transport, vous pouvez d’office vous attendre à des crises. Elles sont naturelles ! Le mieux est de les prévoir en fournissant à Junior de quoi s’occuper suffisamment. « Les parents craignent que leurs rejetons bougent, mais ils en ont besoin. D’ailleurs rien ne l’interdit ! » Facile à dire quand les autres passagers vous lancent des regards assassins rien qu’à la vue de vos trois mouflets dans le wagon… « Le regard des autres ? Ils préfèreront voir vos enfants bouger qu’hurler, s’amuse la psy, Néanmoins, vous pouvez leur donner des règles simples. Jusqu’à 7 ans, ils adorent s’y plier. Dites-leur, par exemple, que dans le compartiment du train, il faut chuchoter, et que si on veut parler plus fort, il faut se rendre dans le couloir… Si par contre vous lui ordonnez « Tais-toi ! », à coup sûr, cela ne marchera pas ! »

Rapporteur de la maison

Un souci récurrent de ces vacances épuisantes ? Jouer au flic et gérer les disputes de la fratrie. Toutefois tenter de les éviter est une illusion. « En réalité, les conflits sont constructifs puisqu’ils nous permettent d’enseigner des valeurs et, aux enfants, de sociabiliser, rassure la psychothérapeute. Il est intéressant de savoir qu’avec ses neurones « miroir », l’enfant vit les sensations de celui qui utilise le jouet. Il ressent le besoin d’avoir l’outil qui va avec la fonction. Raison pour laquelle, dès qu’il a réussi à choper ledit jouet, il s’en désintéresse aussitôt qu’il en voit un autre. Contrairement à ce que les parents pensent, l’enfant ne se bat pas pour un objet, mais pour le plaisir qu’il procure ! »

Une fois le concept assimilé, cela permet de conserver son sang-froid. Et de gérer l’altercation différemment. « Vous voyez deux gamins qui veulent le même jeu. Vous êtes capables de trouver une issue au conflit, mais vous leur demandez « qui a une solution ? » et notez leurs idées. » Même à 2 ou 3 ans, ils savent résoudre un problème. Ne jugez pas. Une fois cinq suggestions inscrites sur votre carnet, évaluez chacune d’elle. Au final, il faut que cela plaise à tous. « Si vous voyez qu’ils butent, proposez alors au minimum deux pistes. Afin qu’ils puissent choisir et qu’ils se sentent investis de la décision. Si vous n’en donnez qu’une, elle sera suivie par soumission, et la bagarre repartira de plus belle. Si vous les responsabilisez, vous aurez la chance qu’ils puissent le faire seul par la suite. »

Autre classique désespérant : le manque d’enthousiasme du pré-ado qui trouve tout « nuuul ». Le mieux, dans ce cas, reste l’activité commune. « Mais on a intérêt à commencer un peu avant l’adolescence, sinon on a zéro chance. Si on a habitué son enfant à faire de grandes balades le dimanche dans les bois, il viendra avec plaisir se promener, parce que c’est un rituel. La plupart sont désireux de passer du temps avec leurs parents, suggérez-leur une activité intéressante, comme un jeu de société. L’important, c’est de manifester l’intérêt que vous avez d’être avec eux. » Plutôt que de leur dire d’éteindre leur tablette, esquissez une alternative. Même en insistant un peu. « Surtout, n’affirmez pas « c’est pour ton bien ». Là, vous vous occupez de ce qui se passe dans leur tête, et ils vont vous renvoyer à vos pénates. En revanche, si vous leur montrez le plaisir que cela vous procure à vous, ils seront plus enclins à participer. »

Toutefois, Isabelle Filliozat pense également que le problème de démotivation dépasse les capacités parentales et rejoint le docteur Sax dont elle a traduit l’ouvrage Pourquoi les garçons perdent pied et les filles se mettent en danger. Selon lui, une des causes de la démotivation des boys pourrait être la quantité trop importante d’oestrogènes assimilés via l’alimentation. Invitation supplémentaire à être indulgent face à la bof attitude de votre morveux. Idem chez les plus jeunes. L’influence de la nourriture sur le comportement de nos enfants est une notion importante à prendre en compte. Colorants, sucres blancs, phosphates, sel, lait et gluten peuvent avoir une incidence sur l’hyperactivité de votre petit(e) chéri(e). Or, en vacances, on a tendance à être plus laxiste sur la consommation de « crasses ». Ce qui n’est pas forcément une riche idée. « S’il est sensible au sucre et au lait et qu’on lui donne chaque jour une glace, alors on va passer des vacances horribles… et lui aussi !, souligne la psy. Le mieux est d’observer votre enfant. La réaction est assez rapide. Si une heure après avoir ingurgité son cornet, il devient insupportable, c’est qu’il y a un lien. »

Deux familles, deux mode de vie

Maintenant qu’on a les enfants sous contrôle, comment faire pour gérer… les autres – la famille, les amis, ceux avec qui on a choisi de partager ses vacances, alors que leur politique parentale se révèle diamétralement opposée à la nôtre.

« Primo, si on veut des vacances un peu sympas, on a intérêt à en parler avant. Pour choisir ensemble un modus vivendi et régler les occasions de frictions, comme l’heure du coucher, la nourriture et l’argent de poche. Cela évite de se crêper le chignon le jour J devant les gosses. Secundo, on ne juge pas la culture familiale de l’autre et on accepte d’expérimenter un mode de vie alternatif. Il n’est pas question qu’une famille prenne le dessus, mais que chacun fasse un pas vers l’autre. On peut choisir de coucher la marmaille un peu plus tard, par exemple, en revanche on réduira les bonbons. Il suffit d’expliquer à ceux qui ont l’habitude de recevoir plus de friandises qu’on est en vacances et qu’on s’initie à une pratique différente. » Et ô joie, on découvrira peut-être une façon de vivre plus efficace, à adopter tout au long de l’année. Par Valentine Van Gestel

Les bons trucs pour garder son calme

– Expirer puis inspirer profondément pendant quelques secondes.

– Souffler en faisant un petit trou avec les lèvres (comme pour gonfler un ballon de baudruche).

– Boire un verre d’eau, de préférence à la paille.

– S’étirer.

– Caresser un chat ou un chien pendant 20 secondes.

– Rouler une balle de tennis sous ses plantes de pied.

– Sortir sur le balcon, respirer et regarder la verdure.

– Faire des mouvements amples.

– Fermer les yeux et porter son attention sur ses sensations corporelles pour relâcher les tensions.

– Sourire.

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