6 châteaux autour de Paris qui réservent bien des surprises

Sceaux, Vaux-le-Vicomte, Maisons-Laffitte, Vincennes, Rambouillet, Saint-Germain : six lieux qui réservent bien des surprises.

Domaine de Sceaux

C’est un petit château entouré d’un grand parc, à 6 km au sud de Paris. Une oasis de verdure pour les amoureux d’art, d’histoire, de hauts arbres, de canaux rectilignes et de perspectives insolites.

Lorsque Colbert rachète, en 1670, le vieux manoir local et ses terres environnantes, Sceaux n’est alors qu’un village perdu en pleine campagne. Le terrain étant particulièrement accidenté, Le Nôtre doit y faire preuve, avant de s’attaquer à Versailles, de tout son génie paysagiste pour s’adapter aux contraintes du sol. D’où le plan atypique de Sceaux, dont le grand canal se trouveà derrière le château. Et ces jardins qui ménagent des vues étonnantes au détour des 14 km d’allées d’arbres taillés en rideau.

Au charme des lieux s’ajoute celui de la femme qui en fit la gloire : la duchesse du Maine, épouse du fils naturel de Louis XIV, à qui le souverain offrit le château en 1700. Esprit libre avant l’heure, cette intellectuelle entretient à Sceaux une cour brillante, où paraît, notamment, Voltaire. Afin de singer les académiciens, elle s’amuse à créer l’ordre de la Mouche à miel (avec une médaille en or pour chacun de ses 40 membres !), dont elle se proclame « dictatrice perpétuelle »à jusqu’à sa disgrâce, à la suite d’un complot contre le Régent, Philippe d’Orléans.

A 6 km de Paris, Colbert a fait construire en 1670 un petit château dont le parc a été aménagé par Le Nôtre.(Photo by Catherine BIBOLLET/Gamma-Rapho via Getty Images)

Le château sera rasé par un bourgeois après la Révolution et ses pierres seront vendues. Le bâtiment que l’on connaît aujourd’hui est construit vingt ans plus tard parà les descendants du dépeceur, puis cédé au département de la Seine, qui y crée le musée de l’Ile-de-France, en 1937. Une passionnante et unique collection de tableaux champêtres, encore visible aujourd’hui, représentant la région avant la révolution industrielle et le passage des impressionnistes.

Mais le bijou méconnu de Sceaux est son pavillon de l’Aurore, situé à l’extrémité orientale du parc. Seul bâtiment restant du temps de Colbert, il est le dernier témoin du génie que déploya Le Brun dans la décoration de la propriété du ministre du roi. Au plafond de cette rotonde percée de 12 ouvertures représentant les 12 mois de l’année, l’admirable allégorie de la lumière dominant les ténèbres reste une des £uvres les plus fascinantes de l’artiste. N’était le risque d’attraper un torticolis, on passerait des heures à lire cette voûte céleste chargée de symboles, où le char du soleil levant incarne Louis XIV, tandis que la nuit se retire, en repliant son manteau couleur de crépuscule. Une merveille !

domaine-de-sceaux.hauts-de-seine.net

Château de Vaux-le-Vicomte

Quand, le 17 août 1661, à la demande expresse de Louis XIV, le surintendant des finances Nicolas Fouquet donne en son château de Vaux-le-Vicomte – tout juste achevé – l’une des plus somptueuses fêtes qu’ait connues le royaume, il ne se doute pas que le roi vient de lui tendre un piège. Et que Vaux, sa fierté, va se transformer ce soir-là en souricière. La plus fabuleuse souricière qu’un homme ait jamais bâtie.

Cinq ans plus tôt, donc, le grand rival de Colbert possède un pouvoir tel qu’il décide d’élever, entre les résidences royales de Vincennes et de Fontainebleau, un château et des jardins d’un luxe à la hauteur de sa mégalomanie. Avant même que Sceaux ou Versailles ne soient mis en chantier, Fouquet commande donc aux meilleurs artistes de son temps – Le Vau pour le bâtiment, Le Brun pour les décors peints, Le Nôtre pour les jardins – la demeure « moderne » à l’italienne que l’on connaît, avec ses perspectives traversantes et ses jardins admirables. Aussi aveugle qu’ambitieux, il médite même de se faire représenter, au plafond de la coupole centrale, en soleil, privilège réservé au roi.

La pièce la plus somptueuse du château de Vaux-le-Vicomte. Elle est décorée de stucs dorés à la feuille. Louis XIV n'y a jamais séjourné.
La pièce la plus somptueuse du château de Vaux-le-Vicomte. Elle est décorée de stucs dorés à la feuille. Louis XIV n’y a jamais séjourné. © DR/WWW.VAUX-LE-VICOMTE

Ce fameux 17 août, donc, le roi a depuis quatre mois déjà envisagé d’arrêter Fouquet, sur les conseils de Colbert. Et cela d’autant plus que sa jalousie a grandi à mesure que le chef-d’£uvre de son surintendant progressait. En lui commandant une fête, Louis XIV cherche à endormir la méfiance de son financier et, tout fier, Fouquet se surpasse en offrant au roi ce qu’il y a de mieux. Même les protégés du souverain – Molière et La Fontaine – participent au spectacle, si grandiose que Louis XIV, ivre de jalousie, vide les lieux plus tôt que prévu. Le 5 septembre, le surintendant est arrêté. Il mourra en prison.

Construit en seulement cinq ans – et miraculeusement épargné par les incendies, les pillages, la Révolution ou les guerres – , Vaux présente une unité architecturale exceptionnelle, contrairement aux nombreux autres châteaux d’Ile-de-France, bien souvent remaniés. C’est le château XVIIe par excellence, où Le Vau et Le Nôtre ont particulièrement soigné les complémentarités entre résidence et jardins. Tout n’y est que grâce, raffinement, surprises, illusions d’optique. Et si les meubles d’origine ont pratiquement tous disparu, les plafonds de Le Vau, au rez-de-chaussée, sont intacts.

De nos jours, le charme du lieu tient aussi à ses propriétaires. Passé à la famille Sommier (aujourd’hui Vogüé, du fait du mariage d’une fille Sommier), Vaux, encore habité jusqu’en 1971, est resté un lieu un peu à part, voire intime, avec ses photos de famille et ses objets personnels posés sur les tables. Les Vogüé organisent même dans leur château à taille humaine des soirées aux chandelles, des fêtes de Noël, des concerts. Si bien que, n’était le prix du billet d’entrée, les visiteurs finiraient par croire qu’ils sont leurs invités.

www.vaux-le-vicomte.com

Château de Vincennes

Recensé dans les textes dès 840, Vincennes est, en France, le plus ancien château royal encore debout. Au manoir initial, saint Louis ajoute une fontaine, Philippe VI, le donjon. Et Charles V, qui se méfie des Parisiens, des murailles rythmées par neuf tours, afin d’y séjourner en toute sécurité.

Tous les rois de France viendront chasser à Vincennes. Et si Napoléon, ensuite, convertit cette résidence en fort militaire, la sainte chapelle et le donjon, en revanche, n’ont guère changé. La première, petite s£ur de celle de l’île de la Cité à Paris, a gardé ses énigmatiques décors sculptés, ses superbes vitraux, sa tribune, quelques décors peints et l’étonnant monument funéraire à la mémoire du duc d’Enghien, dont l’une des figures aurait inspiré Bartholdi pour sa statue de la Liberté.

Le donjon, lui, est le royaume des enfants, avec sa vue sur Paris, sa reconstitution en 3D du cabinet de travail de Charles V, avec meubles et décor d’époque, ou encore ses cellules de luxe du temps où le château servait de prison. Une geôle pour people – et mixte, de surcroît ! -, où les princesses traîtresses et les intellectuels trop remuants, comme Sade ou Diderot, déambulaient, à l’heure de la promenade, dans la chambre royale, et pouvaient disposer d’un cuisinier, voire de leur douce moitié. Autant dire que, à Vincennes, même les graffitis sont d’époque. Et méritent la visite.

www.chateau-vincennes.fr

Château de Rambouillet

Rambouillet est le dernier témoin de ce que pouvait être un tel domaine sous l’Ancien Régime.© DR

Avec son château acquis à grands frais par Louis XVI, sa forêt, son parc, ses chasses, ses étangs, ses fermes, ses granges, sa bergerie, sa laiterie, ses anciennes glacières, Rambouillet est, en France, le dernier témoin de ce que pouvait être un domaine royal sous l’Ancien Régime.

Fiers des 800 hectares d’enceinte boisée, des 3 090 m2 de réception et des 27 chambres de leur château, les Rambolitains s’enorgueillissaient, jusqu’à une époque récente, que cette résidence qui vit mourir François Ier ait aussi été celle où la République accueillait les grands de ce monde, de l’empereur d’Ethiopie Hailé Sélassié à Bush, en passant par Gorbatchev et à le couple Ceausescu.

Las, depuis, le temps politique s’est accéléré. Et l’ancien président Nicolas Sarkozy, qui préférait l’élégante Lanterne de Versailles aux trophées de chasse de Rambouillet, lui a ôté son statut de résidence présidentielle. Dommage, car, si ce château n’a rien d’un nid d’amour (Marie-Antoinette l’appelait « la crapaudière » et Carla n’en pensait pas moins !), ses vieilles pierres recèlent des bijoux, comme les appartements de l’Empereur, la salle des marbres ou le cabinet des faïences.

DOMAINE ROYAL. Rambouillet est le dernier témoin de ce que pouvait être un tel domaine sous l'Ancien Régime.

Mais le véritable charme de Rambouillet est plutôt à chercher du côté de ses dépendances, toutes plus pittoresques les unes que les autres. Par exemple, l’arche en rocaille de la grotte des Amants, la merveilleuse chaumière aux Coquillages, ou encore la laiterie, qui font irrésistiblement penser au hameau de Versailles.

www.rambouillet-tourisme.fr

Château de Saint Germain en Laye

Que l’on apprécie ou non sa forme étrange – une sorte de pentagone délimitant une cour intérieure -, le château de Saint-Germain, appelé aussi « château vieux », par opposition au « château neuf », aujourd’hui disparu, qui le complétait, est un grand témoin de l’histoire de France.

Erigée dès 1124 au pied d’une forêt giboyeuse par Louis VI le Gros, cette forteresse sera flanquée par saint Louis d’une chapelle – toujours intacte – achevée un siècle plus tard.

Château de Saint-Germain-en-Laye : En s'y mariant, François Ier a mis cette résidence royale Renaissance à la mode.
Château de Saint-Germain-en-Laye : En s’y mariant, François Ier a mis cette résidence royale Renaissance à la mode. © NICOLAS THIBAUT/PHOTONONSTOP

Mais c’est François Ier qui met cette résidence royale à la mode en s’y mariant, puis en donnant à l’ensemble l’aspect Renaissance qu’on lui connaît. De nombreux souverains verront ensuite le jour à Saint-Germain, dont Louis XIV, en 1638. Avant de se passionner pour Versailles puis Marly, le Roi-Soleil y fait aménager par Le Nôtre une immense terrasse avec vue sur Paris. Et construire une extension au château, abandonnée par la suite, et finalement démolie au XIXe siècle.

Depuis, Saint-Germain a connu bien des destins. Siège d’une école militaire puis d’un pénitencier, la demeure royale abrite, à partir de 1862, le musée des Antiquités nationales, aujourd’hui rebaptisé musée d’Archéologie nationale ; cette fascinante caverne d’Ali Baba renferme quelque 30 000 pièces d’exception allant du paléolithique à la Gaule mérovingienne. Une visite qui s’impose, avant d’aller flâner le long des 2,4 kilomètres de la terrasse de Le Nôtre – l’une des plus longues du monde. Et des plus belles.

www.musee-archeologienationale.fr

Château de Saint Germain en Laye, 1680, par Gabriel Perelle (1604-77); Bibliotheque Historique de la Ville de Paris, Paris, France

Château de Maisons (ou de Maisons-Laffitte)

Château de Maisons-Laffitte, 1642-1646, concu par Francois Mansart (1598-1666),

Lorsque, sous Louis XIII, René de Longueil, capitaine des chasses du roi, achète 330 hectares de terres entre la Seine et le château de Saint-Germain, où réside le plus souvent la cour, cet homme riche et bien en vue n’a qu’un rêve : attirer le roi chez lui. Aussi commande-t-il vers 1635 à l’architecte François Mansart un château « moderne », c’est-à-dire avec de larges ouvertures, des perspectives traversantes et un jardin à la française. Mansart livre à Maisons tout son génie, avec notamment le grand vestibule d’entrée, qui, comme à Vaux, était ouvert aux quatre vents. Spécialiste du trompe-l’£il et du savant mélange entre classique et baroque, l’architecte termine son chef-d’£uvre en 1650. Entre-temps, Louis XIII est mort.

Son successeur n’occupera que deux fois les appartements qui lui sont réservés à l’étage. Passée entre de nombreuses mains depuis – notamment celles du banquier Jacques Laffitte, qui donnera son nom à la ville -, cette demeure aujourd’hui administrée par le Centre des monuments nationaux français a deux particularités. D’abord, Maisons est le seul château d’Ile-de-France encore debout témoignant du génie de Mansart. Ensuite et surtout, le lieu possède un cabinet aux miroirs qui mérite à lui seul la visite. Circulaire et doté d’une coupole peinte, d’un admirable parquet d’ébène, de citronnier, d’acajou, d’amarante, d’étain, d’os teintés et d’ivoire mêlés, avec ses glaces et décors, il est l’£uvre des meilleurs artisans de l’époque.

www.maisonslafitte.net

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