L’été 2010 en avant-première

Milan et Paris ont livré leur verdict : l’homme de 2010 est un voyageur, plus que jamais curieux du vaste monde. Qu’il fantasme en colorant son dressing d’accents doucement exotiques.

Dès le premier jour des défilés de prêt-à-porter masculin pour l’été 2010 à Milan, la tendance était posée. Ermenegildo Zegna ouvrait la fashion week avec ce mantra :  » faire du nomadisme une seconde nature « . Les créateurs semblent s’être effectivement donné le mot pour transformer le vestiaire des mecs en fenêtre sur le monde. En le mâtinant de motifs ethniques pour certains, comme Dries Van Noten qui revient à sa passion pour les imprimés, piqués quelque part entre l’Inde et le Japon. Ou comme chez Missoni où l’on invoque Bruce Chatwin –  » Le voyage n’élargit pas l’âme. Il fonde l’âme  » – pour bétonner l’esprit d’un défilé qui puise son inspiration dans la collection de textiles ethnographiques compilés depuis plusieurs années par la maison.

D’autres stylistes nous racontent l’histoire de bourlingueurs, celle du gentleman explorateur franco-italien Pierre Savorgnan de Brazza chez Kenzo, celle de légionnaires sentant bon le sable chaud chez Versace, ou celle des troupes napoléoniennes en expédition sur les terres des pharaons chez John Galliano. Une tendance en appelant une autre, étant donné qu’il est à nouveau politiquement correct d’aimer les Etats-Unis, plusieurs designers s’en vont chercher leur inspiration chez l’Oncle Sam. Paul Helbers (Louis Vuitton) a ainsi pensé aux coursiers à vélo new-yorkais pour cette nouvelle collection parcourue de jaune taxi, Gaspard Yurkievich, lui, rehausse les épaules des tee-shirts à la manière des footballeurs américains et Domenico Dolce et Stefano Gabbana signent pour D&G une saison tout en cuir, bottes et jeans, taillée pour le Wild Wild West.

Doit-on voir dans ces soudaines envies d’ailleurs une manière d’échapper à l’atmosphère économiquement plombée ? Peut-être. Une chose est certaine, la crise touche le monde du luxe et les marques ont clairement décidé de l’affronter en proposant aux hommes des vêtements qui les fassent rêver sans trahir le moindre défaut fonctionnel. Car par-delà son inspiration généralement exotique, la mode masculine de l’été 2010 est une saison extrêmement portable, réaliste et très axée sur le confort. C’est une règle bien connue des professionnels du secteur : les hommes qui aiment la mode sont des esthètes, mais restent pragmatiques, l’utilité avant tout. Cela n’a jamais été aussi vrai. Voici donc dix tendances pour être fashion en tempsà utiles.

1. On se met au blanc

Expression la plus flagrante d’un été 2010 qui s’annonce tout en teintes claires, le blanc glacier apporte une note à la fois  » fresh  » et éclatante au vestiaire masculin. En total look, costume-mocassin chez Gucci, clin d’£il de Frida Giannini à l’architecture immaculée d’Oscar Niemeyer au Brésil. De long en large chez Jil Sander. Design chez Hugo by Hugo Boss, branchic chez Martin Margiela. Souple et décontracté comme une djellaba chez Kris Van Assche et Gianni Versace.

2. On retaille son costume

Il y a bien sûr les maîtres incontestés du genre, à l’instar de Giorgio Armani, qui se concentre cette année sur ce qu’il sait le mieux faire : de superbes costumes à l’italienne, taillés à la perfection, classiques, indémodables. A côté, toute une série de designers s’amusent à revisiter cette pièce-phare jusqu’à en démonter le mécanisme, comme Kriss Van Assche pour Dior Homme, qui lui ôte sa structure pour en fluidifier la silhouette. Lucas Ossendrijver le coupe très sport pour Lanvin, quand Raf Simons le sangle. Mention pour Alessandro Sartori qui remixe l’élégance dandy avec grâce pour Z Zegna.

3. On est à fleur de peau

Pour dompter la touffeur des grandes villes et aérer les esprits chagrinés, Miuccia Prada perfore chapeaux, chemises et pantalons. Chez Calvin Klein, Italo Zucchelli laisse deviner la peau sous les manches transparentes de ses vestons. Ennio Capasa dessine un tee-shirt à col bénitier chez Costume National. Quant à Roberto Cavalli, il s’emballe pour le marcel transparent à porter sur une combi de motard en cuir déchiré, avec vue sur derme.

4. On roule son froc

Ce petit détail est le nouveau signe de reconnaissance des fashionistos. Mode d’emploi : roulotter parfaitement son pantalon au niveau de la malléole comme chez C.P. Company, Dolce & Gabbana, Les Hommes, Vivienne Westwood, Missoni ou Lanvin. A porter avec une chaussure de ville, c’est tout simplement trop cool. PS : Comme pour toutes les questions essentielles, il y a deux écoles, celle de la chaussette et du pied nu. A vous de voir, seule la socquette de sport est proscrite, évidemment. PPS : vu aussi çà et là, les manches de costume retroussées sur le coude, très Miami Vice.

5. On ose l’orange

C’est la couleur à la mode du dressing actuel de la femme qui migre vers celui des mâles en 2010. Le porter en total look, comme chez Bottega Veneta, Jean Paul Gaultier ou Paul Smith est peut-être un peu osé si vous ne vous appelez pas Kanye West. On s’en servira par contre abondamment pour égayer sa tenue à la manière de l’homme Louis Vuitton, Salvatore Ferragamo ou Emporio Armani.

6. On use son jeans

L’inusable denim se portera  » vécu « . Délavé chez Missoni et Louis Vuitton. Déchiré chez D&G, Dolce & Gabbana, John Richmond ou Dirk Bikkembergs.

7. On se sandale

Sandale d’écolier chez Hermès. Spartiates tout-terrain chez Givenchy et Kris Van Assche. Tongs chez Louis Vuitton et Yves Saint Laurent, bonne nouvelle, c’est redevenu chic de montrer ses orteils.

8. On se glisse dans du Nylon

La toile de parachute déferle sur la garde-robe des hommes. Sous forme d’imperméable pour affronter le crachin british chez Paul Smith ou Burberry Prorsum, en version costume chez Calvin Klein ou associé au coton sur un cardigan C.P. Company. Jean Paul Gaultier, lui, revisite sa célèbre marinière en version coupe-vent.

9. On adopte le short

Plus de doutes là-dessus, la culotte courte est définitivement mode. Les frères Dsquared2 lui font honneur à la faveur d’un défilé dédié aux boy-scouts, Miuccia Prada déchire les pantalons pour les transformer en tout petits shorts, Giorgio Armani invente le bermuda « écailles de poisson » ,Gianfranco Ferré et Trussardi 1911 l’associent, eux, à la veste de costume pour un look preppy furieusement dans l’air du temps.

10. On tente la peinture sur soi

Tendance consacrée depuis quelques saisons, elle perdure. L’homme Moschino porte chemisette, veste, chapeau et pantalon tachetés de couleurs à la Jackson Pollock. Les vêtements sont maculés de peinture chez Alexander McQueen et Dirk Bikkembergs. Ce dernier signe une collection inspirée des tableaux du jeune artiste australien Scott Elk. Pour Jil Sander, Raf Simons rend hommage au peintre japonais Foujita à la faveur d’imprimés sensuels. A noter aussi, une nouvelle collection de sacs et sneakers Hogan recouverts de graffitis.

Baudouin Galler

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